Traversée vers le Brésil, le pot-au-noir,

Traversée vers le Brésil, le pot-au-noir,

Posté par : Jean
21 Février 2025 à 16h
Dernière mise à jour 21 Février 2025 à 20h
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Nous avons été bien longs à quitter Mindelo. Pays attachant, gens chaleureux et souriants. À Mindelo, c'est évidemment le royaume de la musique capverdienne. Des scènes dans les bars et les restos où jouent des musiciens fabuleux. Et puis, venant de la salle, une vedette de la chanson capverdienne qui n'était pas au programme monte sur scène et chante ou joue quelques chansons avec le groupe. Et c'est ça, tous les soirs, la magie de Mindelo. Cette année, il fallait être au Colombinho, au Métallo et en fin de soirée, au Jazzybird. On a tout fait !

 

Pour cette belle traversée de Mindelo au Cap Vert vers João Pessoa au Brésil, j'ai fait un groupe WhatsApp où j'ai raconté notre traversée. Le voici, ci-après retranscrit. Avec la spontanéité des émotions à bord.

 

"Bonjour de l'océan,

 

Jour 2 de la traversée entre le Cap Vert et le Brésil.

Je crée le groupe WhatsApp, et grâce à Elon, je peux vous donner les nouvelles du jour. Si je suis trop prolixe, vous pouvez vous désabonner.

Les deux premiers jours ont été un peu agités, mais on a bien avancé. On était tous un peu patraque et les menus du bord ont été frugaux. Malgré l'absence de rhum et la fatigue, l'ambiance à bord est restée bonne.

La petite routine s'installe à bord. Beaucoup de lecture. Un peu de guitare pour Raymond et pas beaucoup de cuisine… mais j'ose trop rien dire parce qu'on me répond qu'on n'a pas de poisson à cuisiner…

La routine s'installe,

Un peu de starlink,

Un peu de cuisine,

Le vent est toujours idéal, mais la mer est encore un peu formée.

Pour la lecture, je viens de finir "Les Guerriers de l'hiver" d'Olivier Norek. Ce n'est pas le style de livre que je préfère, mais j'ai été un peu pris par l'histoire et j'ai fini par en voir le bout. Je viens de commencer "Les âmes féroces" de Marie Vintgras. Et là, c'est mieux. Il faut que j'arrive à trouver des nouveaux auteurs qui me plaisent… Raymond m'aide un peu, mais on n'a pas du tout les mêmes goûts pour la lecture.

 

Jour 3

Nuit tranquille. La mer s'est bien calmée. Le vent aussi. Tout le monde a bien dormi.

Ce matin, on a mis la grand-voile avec un ris. Jusque là, on n'avait que le génois. On a aussi remis le bimini. On avance à 6 nœuds.

Impossible de pêcher. La mer est pleine de sargasses qui se prennent dans le rapala. Raymond recommence à cuisiner. Il nous fait une pizza ce midi et refait du pain.

On est passé dans les 12 degrés de latitude. La température est bien remontée. La dernière nuit a été moins froide et agréable.

Tout va bien à bord.

 

Lundi 10 février

4ᵉ jour

962 miles à parcourir encore.

On a dépassé le tiers du parcours.

110 miles seulement ces dernières 24 heures. On s'est un peu traîné cette nuit.

Du coup, au matin, on a levé le ris et on est grand voile pleine. Exercice à peu près concluant… à améliorer. J'avais oublié de remonter la ligne de pêche et le capot avant était resté ouvert. Mais pas de dégâts. On avance bien mieux.

Position à 13 h

8 37,391 N

28 14,176 W

Vitesse 6,2 nœuds

On fait route au 190 degrés.

Il faudrait être au 220 pour passer le pot au noir au plus court, mais c'est difficile de tenir au vent arrière. Mon tangon est beaucoup trop court pour tenir le génois et la mer encore trop formée. Du coup, on reste grand largue.

Le temps se couvre un peu avec des nuages d'altitude (je ne connais pas leur nom). La température devient agréable. Les nuits sont plus humides.

Tout va bien à part ces foutues sargasses qui m'empêchent de pêcher. Il y en a tellement que même la technique de Jean-Paul ne marche pas.

Les Sargasses,

Technique anti sargasses,

Petit problème de grib pas résolu pour mes routages, mais je fais ça avec Windy et Ventusky. Je surveille maintenant quand les premiers grains vont nous tomber dessus.

Les filles et Raymond font tout ce qu'ils peuvent pour que le capitaine soit bien nourri. Et ils réussissent bien. Ce midi, quiche lorraine. Hier soir, potée de choux au jambonneau.

Seul bémol, pas d'alcool. Ça fait déjà 4 jours que l'on tient. Raymond a bien essayé de me tenter avec une bonne bière bien fraîche. Mais vous connaissez mon inflexible volonté !

Bises à tous.

 

Cinquième jour, (Raymond à la rédaction)

Il nous reste 850 miles jusqu'aux côtes du Brésil, 110 parcourus depuis hier à la même heure.

La nuit a été très calme, moins de bruit dans la coque, les voiles, les drisses et les haubans, moins de roulis, on entendait bien Isa ronfler.

Après le déjeuner, comme Jean l’a raconté, nous avons tenté un changement d’allure avec lacher du ris et voiles en ciseaux, manœuvre difficile au vent arrière, qui, après un tour complet, s’est soldée par une brève évaluation du capitaine : "merde alors, tout ça pour rien, on est revenus au point de départ !". Petite précision sur son récit d'hier qui s'imposait… Nous avons en effet rapidement renoncé au ciseau, trop inconfortable et pas bien efficace.

On mange encore assez bien à bord, malgré le rationnement en huile d’olive...

Enfin, hier soir, c'était bouillon aux restes de potée de la veille et… aux coquillettes, beaucoup de coquillettes… trop de coquillettes. Ceux qui connaissent mon goût des coquillettes apprécieront… Et le pire, c'est qu’il en reste.

 

Nous faisons maintenant pendant quelques heures cap au 250, un peu trop nord, mais cela permettra de retrouver notre itinéraire savamment calculé par le capitaine, itinéraire qui devrait éviter une zone sans vent et limiter notre temps de traversée du Pot-au-noir.

 

6ᵉ jour,

J'ai repris la rédaction.

On a rejoint la route du routage, pour éviter la plus grosse zone sans vent du pot au noir. On refait route vers le sud. Du coup, à peine plus de 100 miles vers l'objectif hier.

Maintenant, le cap est bon. Le vent juste comme il faut. On est presque à mi-chemin.

Coordonnées à 13h.

5 degrés 26,91'N

30 degrés 07'W

741 miles restants

Vitesse 5,6 nœuds

Cap 193 degrés (wpt à 212)

Merci les amis. Grâce à vos conseils culinaires avisés, Raymond et les filles ont mis au point une recette de gratin aux sargasses délicieuse.

On en mange beaucoup beaucoup et du coup, on va commencer à en faire des conserves.

Gardez cela secret. On a prévu dès notre arrivée de contacter le OICG (Organisation Internationale de la Cuisine et de la Gastronomie) pour faire breveter cette recette. On va devenir millionnaires.

Tout va bien à bord.

On va commencer à bûcher sérieusement notre chanson du carnaval. Pour ceux qui ne sont pas au courant, je vous en raconterais plus une prochaine fois. Grâce à Zaza, on devrait vivre quelque chose de fabuleux arrivés au Brésil. 

Bises à tous.

Fini le gratin de sargasses! Cathy a été persévérante pour enlever les algues de l'hameçon toutes les 5 minutes.

Ce matin, Cathy a pêché notre premier poisson après une leçon très pédagogique d’Isa sur « comment enlever les sargasses accrochées à la ligne de pêche ».

Premier petit poisson,

7eme jour

Nuit "tranquioulé", comme on dit au Cap-Vert.

Depuis le départ, seul un cargo en vue lointaine. De très très rares cargos au loin sur l'AIS.

Sauf à l'instant, une belle route de collision avec un gros cargo… empannage !

Temps calme, vent 15 nœuds portant.

Aujourd'hui, encore un contrebord. Hâte de voir à quoi ressemble cette zone d'orages, de pot au noir et de grosses pluies. Ça fait longtemps que j'ai pas vu la pluie. Et ça va faire du bien aux voiles et au bateau, ces averses. On va peut-être y arriver cette nuit ou demain. On va se tenir prêt à réduire sous le premier coup de vent du premier grain.

Il va falloir être plus attentif la nuit prochaine.

Les nuages sont de plus en plus présents.

La chaleur aussi. On est maintenant torse nu (mais pas les filles). L'eau de mer bien chaude également.

Raymond nous fait une tortilla ce midi. Il est en nage devant le fourneau.

Hier soir, nous avons mangé toute la dorade coryphène. Un délice. 

Ce matin, j'ai remonté une ligne de pêche que Cathy vérifie toutes les 5 minutes. Toujours des sargasses.

À midi.

3 degrés 24,72 N

30 degrés 16,63W

Cap 265

Cap objectif 215

Distance 622 miles en direct.

Premier grain bien costaud qui nous a surpris juste avant le lever du jour. On s'en est bien sorti. Je raconte tout ça plus tard

 

8ᵉ jour,

Fin de nuit pas tranquille du tout, cette fois.

À 6 H30 du matin, notre premier grain. Je suis de quart, allure de portant. Le vent monte rapidement en nous venant par le travers. Grosse pluie. Dans la nuit, j'essaie de me mettre vent arrière pour être plus confort et ne pas coucher le bateau, et surtout rentrer un peu de génois. Mais le vent tourne ou je suis pas attentif ? Empannage sauvage ! Heureusement, il y a le frein de bôme (merci Alain !). Pas de dégât. Puisque le génois est à contre, je me mets à la cape. Ouf ! Ça permet à Raymond de sortir avec le ciré et pour moi de changer de t-shirt et de mettre un k-way. On se remet en ordre de marche. On prend le 2ᵉ ris et on roule un peu de génois. On est trempé. 

Je m'aperçois alors que l'écoute de grande voile a dû raguer toute la nuit sur la barre d'écoute et est à deux doigts de casser.

J'ose pas imaginer si elle avait lâché dans le plus fort du grain dans la nuit.

ça ressemblait à ça !

Changement de l'écoute par un bout tout neuf que j'avais prévu pour remplacer une drisse.

Le vent tombe. Pluie, bruine. Plus de vent… c'est le pot au noir. On y est ! ! !

Les filles ont pitié de nous. Elles nous font de bonnes tartines et vont enchaîner les quarts dans la matinée.

Après le premier grain,

Au moteur maintenant pour la journée et sans doute beaucoup plus. Plus du tout de vent.

Et maintenant un grand soleil qui tape très fort! Il fait très chaud. Quand il pleut, il faut fermer les hublots et c'est encore pire dans le bateau… et dehors, on est trempé !

Heureusement, cela n'a pas duré, et en milieu de nuit, le temps s'est bien dégagé.

Temps très calme,

Dans l'après-midi, on a On a croisé un troupeau de baleines. Je viens de regarder, c'est du rorqual tropical. C'était beau comme toujours, les baleines.

Position

1 degré 20 N

31 degrés 50 W

Moteur

Cap 195

On devrait passer la ligne de l'équateur demain matin.

 

Catherine :

Est-ce qu'il n'est pas plus sécurisant par temps de grains de laisser tirer le bateau par un génois seul ou presque ? Je dis ça, mais en vrai, je n'y connais rien en grains du pot au noir.

Coucou Catherine, Il y a du vent de travers assez faible dans cette zone et plus au portant. Donc, on avance grand-voile et génois en réduisant un peu pour avancer quand même quand la nuit tombe. Parce que la nuit, on ne voit pas le grain arriver.

 

9ᵉ jour

Après une nuit au moteur, on avance doucement à la voile depuis la fin de la nuit. Il fait maintenant très chaud.

J'ai remis le génois et enlevé le ris dans mon dernier quart de nuit.

Passage de l'équateur. 

 

Chanson et offrandes à Neptune,

On mange à midi la bonite prise la veille au soir. Il fait encore plus chaud devant le fourneau. C'est Cathy qui s'y est collée.

Puis spi. Temps idéal pour le spi asymétrique.

Enfin le spi,

7 à 12 nœuds de vent au grand largue.

Neptune doit être content de nos offrandes !

 

Jour 10 et 11

Nuit pas facile.

Pas de vent, de grosses averses.

Trop chaud dedans.

Trop mouillés dehors.

Bruit du moteur.

Des squatters à plumes cette nuit. Bien bruyants.

Sommeil difficile pour tout le monde.

Le vent se relève doucement. Vent de travers. On avance à 5 nœuds. Pourvu que ça dure !

360 miles à parcourir pour arriver à l'embouchure de la rivière Jacaré.

1 degré 51,36 S

31 degrés 35,77 W

 

Routages,

Jour 11

On a bien avancé à la voile toute cette journée et la nuit, le vent est tombé doucement.

Tout le monde a bien dormi cette nuit.

On s'est un peu traîné en début de matinée.

Les squatters sont de plus en plus nombreux dans la nuit. Ils étaient huit qui ont piaillé toute la nuit et ont tapissé le panneau solaire de leurs fientes.

Moteur pour cette fin de matinée. On va croiser Fernando de Noronha en fin de journée. On ne s'arrête pas. Le mouillage est rouleur en ce moment. Et surtout, on commence à être juste pour notre arrivée avant le carnaval. On a trop traîné dans les bistrots de Mindelo ! Il nous faudra encore aller à Rio par avion depuis Joa Pessoa.

On n'est encore pas du tout au point pour la chanson que l'on doit chanter en défilant sur le sambadrome pour le carnaval de Rio.

Notre école de samba s'appelle Arranco. On défile en 2ᵉ division. Ce qui donne quand même le droit de défiler sur le sambadrome. Nos costumes sont déjà commandés par Fred, l'amie de Zaza.

Fin de matinée.

12 h 30 en France

220 miles à parcourir jusqu'à l'entrée du fleuve. 

3 degrés 23,93' S

32 degrés 37,78, W

5 nœuds au moteur

Ligne de pêche à l'eau…

On devrait arriver dans la matinée pour remonter la rivière Jacaré jusqu'à la marina.

A midi, Raymond et Cathy nous ont fait une pizza.

Bises à tous.

PS : Nos squatters, c'est des nodis bruns ou sternes bruns. Apparemment, vers Fernando de Noronha, ça arrive souvent qu'ils se posent sur le voilier la nuit.

 

Jour 13

Une nuit pas des meilleures pour tout l'équipage. Je suis descendu trop à l'ouest et il faut faire du près serré et contre le courant pour notre dernière nuit en mer. On a essayé de garder les hublots ouverts, mais l'eau de mer a commencé à rentrer dans le carré. 

Ça tape à l'intérieur du carré et, en plus, il y fait très chaud.

La dernière matinée, tout s'arrange. Vent de travers et remontée tranquille du fleuve Jacaré.

L'accueil à la marina est super ! Nicolas nous arrange tout ! Beaucoup de bateaux amis, rencontrés sur les pontons de Mindelo.

Je suis surpris par les grands buildings de la mégapole de Joa Pessoa. Coucher de soleil superbe et puis caipirinha à la marina avec les équipages voisins. On se refait la traversée et on se raconte nos projets.

Coucher de soleil à la marina,

Première caipirinha,

 

Au final, une traversée un peu moins tranquille que ce que j'avais prévu...

Beijão para todos.

Emplacement

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