Ma traversée vers les Canaries par Joël

Ma traversée vers les Canaries par Joël

Posté par : Joel
04 Juin 2012 à 22h
Dernière mise à jour 20 Novembre 2014 à 08h
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Comme vous avez pu le comprendre, notre situation plutôt exposée à la curiosité locale dans la marina de Funchal nous a amené à partir plus tôt que prévu de Madère.

Situation, ou plutôt souricière.

Je vais vous expliquer, imaginez  2 pontons qui se rejoignent pour faire un angle plutôt aigu.

Regardez l’angle, nous sommes amarrés le long du ponton de droite, devant nous à 1 mètre un bateau de promenade-pêche coincé dans l’angle le long de notre ponton. Derrière nous, à environ 3 mètres un bateau de 10 mètres, sur pendille, perpendiculaire au ponton.

Sur le ponton de gauche des bateaux de taille croissante sur pendilles, perpendiculaires au ponton. Entre les 2 rangées de pendille, un étroit chenal de 6 mètres de large sur une cinquantaine de mètres de long pour notre bateau de 4,5 mètres de large. Ensuite le chenal tourne et s’élargit jusqu’à la sortie du port qui fait environ 20 mètres de large. Vent de travers 10 nœuds, sinon ça serait trop facile.

Après avoir remonté la dérive, on essaie de dégager notre arrière en mettant barre à tribord et avant lente sur une garde passée en double. L’arrière se dégage bien mais de façon très insuffisante pour éviter le bateau de 10 mètres qui est derrière nous (vous suivez ?). Inutile de vous dire qu’à ce moment là la moitié de Funchal est sur le port et les paris vont bon train. Eux, ils suivent très bien.

On décide donc de dégager l’arrière par une manœuvre d’aussière depuis le ponton babord (l’autre). On attache 2 aussières ensemble pour avoir la bonne longueur et Bernard et Pierre Henri partant de l’angle des 2 pontons ramènent chacun de son coté une extrémité d’aussière à l’arrière du bateau et … Pierre Henri en se dirigeant vers le ponton babord se fait aborder par une charmante jeune anglaise qui regardait depuis un moment et qui lui prend l’aussière des mains : « go back to your boat », Pierre Henri cherche à argumenter qu’elle aurait peut-être besoin d’aide ; « go back to your boat, I’m a sailor ».

Peu de temps après, grâce, entre autres, à l’action efficace de la jeune anglaise, l’arrière du bateau est déhalé dans l’axe du chenal, un merci et c’est le moment de demander de larguer les aussières tout en mettant en marche arrière. 2 choix : ou prendre rapidement de la vitesse pour être manœuvrant et grosse cata si manœuvre loupée ou petite vitesse, se déhaler sur les bateaux et minimiser la puissance des chocs mais ne pas être vraiment manœuvrant. Je choisis cette deuxième option et c’est très lentement, en marche arrière que nous nous extrayons de ce trou à rats, sans toucher personne, en quasi silence et en suant 2 ou 3 gouttes d’adrénaline.

Après une traversée sans histoire (un pare-battage à la mer et une horde de dauphins sauteurs), nous arrivons au mouillage des îles pas si Desertas que çà. Déjà 2 bateaux au mouillage et le gardien nous fait mouiller un peu en dehors de la baie car il attend un troisième bateau qui a réservé sa place. Premier mouillage ne tient pas, le deuxième sur du sable  tout près de la falaise de 500 mètres, bonne houle. La dérive baissée permet de limiter le roulis pour une bonne nuit.

Le lendemain (jeudi 31) petite promenade à terre et le long de la falaise et de ses grottes dans l’annexe. Les gardiens assurent une présence permanente et se relaient tous les 15 jours. Ils ont pour mission de préserver la faune locale en partie endémique : veaux marins, pétrels et autres oiseaux aux noms inconnus. Ils ont aménagé un petit circuit pédestre autour de leur maison pour nous expliquer la faune, la géologie et leurs missions. Ils ont même une nursery pour bébés phoques abandonnés. Le chemin pour monter en haut de la falaise nous est déconseillé comme étant trop dangereux. Une chèvre cornue comme un bouquetin ravage la rare végétation.

Au moment de remettre l’annexe à l’eau, un moment de franche incompréhension terminée par un fou rire général, je raconte : on se coordonne pour avancer l’annexe vers l’eau. On compte 1,2 et 3, on soulève l’annexe et personne n’avance. On se demande lequel de nous 4 retient la marche. On recommence : 1, 2 et 3, annexe soulevée et personne n’avance. Interloqués, on se retourne pour s’apercevoir que l’on avait oublié de détacher l’annexe de son rocher. Le soleil cogne.

Baignade, beau snorkeling à la chute de la falaise avec de nombreux poissons, mais pas encore autant qu’aux Caraïbes, puis départ vers les îles Selvagems (Sauvages).

Sauté de porc au curry accompagné de cristophines aux lardons.

Après une matinée un peu fraiche à l’ombre des falaises, nous quittons les Désertes et après midi bien chaude, bimini de rigueur. Spi capricieux dans une houle qui le dévente régulièrement. On a repris le régime de quart car notre destination est à 150 milles et vu le vent, on ne va pas faire de la route directe.

Avant de quitter le Portugal, une réflexion sur la prononciation portugaise. Ca n’a rien à voir avec celle des espagnols, ni avec la notre. En les écoutant parler, même si on sait de quoi ils parlent, on ne comprend rien. Ca me fait penser à cette définition de l’anglais par mon père : ça s’écrit élastique et ça se prononce caoutchouc. Pas étonnant qu’ils aient eu des traités d’entraide avec les anglais depuis le 13ème ou 14ème siècle (contre les français et les espagnols), ils en ont adopté la façon de traiter les sons : beaucoup de voyelles muettes en plus des « e » plutôt prononcés comme des « i », certaines ayant un son de consonne.

Journée sans cétacés mais avec un peu de vent, houle courte de période 6 à 7 secondes pas bonne pour l’équilibre des voiles qui claquent souvent.

Spi rentré, geenacker établi, empannage.

Avocats puis purée d’igname enrichie avec du lait, 2 œufs, de l’huile d’olive et des dés de jambon cru.

Très joli coucher de soleil.

0h30, je relaie Bernard. Le vent est tombé, gémissement du bateau, bruit sourd de la dérive dans son logement, la nuit est à la fois fraiche et moite, la lune illumine, claquements de voile et d’écoute, la houle résiduelle.

Je me suis fait une tisane. J’ai maladroitement réveillé Jean Paul qui dort dans la carré. Le vent tombe encore. VMG 2 à 3 nœuds, ETA demain. Le quart va être long.

Parfois le bateau entre en harmonie, il glisse à 3 nœuds avec un vent à peine supérieur à 5 nœuds, il semble réconcilié, et puis une houle plus forte et ça recommence, gémissements, grincements, claquements, chuintements, cognements, hennissements, grognements, crissements, je suis à court de mots en « ment »..

Ma position favorite, c’est debout dans l’escalier appuyé sur le capot de descente : j’ai une belle vue panoramique, bien abrité du vent et si je m’endors, ma chute doit me réveiller (ça ne m’est encore jamais arrivé).

Le  faible vent change sans arrêt de direction. J’ai mis le pilote en mode vent. La houle n’est pas trop forte, ça semble bien marcher. Enfin, pas trop longtemps.

La fin de mon quart approche, le vent semble revenir un tout petit peu, 6 à 7 nœuds et dans la bonne direction, à peine plus, mais ça fait une sacrée différence pour le bateau qui recommence à avancer. L’ETA est repassée à aujourd’hui.

4h30, le moteur démarre dans mon oreille, quel réveil désagréable. J’enfile un slip et vais maugréer un peu, contre le bruit et l’absence de vent. Ca a du me faire du bien car de retour dans ma cabine, je m’endors illico malgré le bruit pour me réveiller vers 9h30. Le moteur a été arrêté vers 6h30 avec le retour d’une faible brise, le silence retrouvé ne m’a pas réveillé.

Temps lourd et nuageux, vent 6 à 8 nœuds, que ce serait mieux avec le spi ! Mais la veille en le rentrant, le va et vient de la chaussette s’est coincé en haut de l’enrouleur de trinquette et malgré nos essais et efforts, pas moyen de le décrocher. On a rangé tout ça comme on a pu dans la soute à voile avant d’établir le geenacker pour la nuit.

Peu de vent, peu de houle, on envoie un volontaire (PH) à la hauteur des deuxièmes barres de flèche, hissé par la drisse de geenacker et assuré par la balancine de tangon. Il dégage sans problème le va et vient qui était posé sur l’ancrage de l’enrouleur sur le mat. Maintenant qu’on sait, on s’y serait pris différemment pour le décoincer depuis le pont.

On a établit le spi avec 2 bras de part et d’autre du hauban. Celui à l’intérieur du hauban est repris dans le chariot de rail d’écoute de solent, la tension vers le haut est principalement supportée par le hale-bas de tangon. Cela a été bien utile car le vent tournant sans arrêt, on  a démarré par un bon plein avec le bras extérieur au hauban pour terminer par un travers en limite de portance du spi avec le bras intérieur et en s’écartant un peu de la route directe. Mais comme le vent restait faible (8 à 10 nœuds), cela restait plus efficace en VMG que de passer sous geenacker.

Pour midi ? après la salade de scarole, chou chinois, poivron et tomate, délicieux steak madéran avec jueves revenus dans la poêle avec oignons rissolés, ail et graines de fenouil.

L’arrivée ce soir aux îles Sauvages semblent se confirmer.

Deux anecdotes me reviennent de notre court séjour à Madère :

Lorsque nous en avons fait une visite en voiture, nous nous sommes d’abord arrêtés à Camara de Lobos, célèbre pour son petit port avec ses barques de pêche rouges et bleues et par les séjours de Churchill. Quand nous sommes arrivés, il y avait un bateau un peu penché sur le coté sur la cale d’échouage en train d’être remonté par un câble actionné par un moteur. Un gros homme à bord, sans doute le patron, encourageait un petit homme âgé et maigre dont le rôle semblait être de redresser le bateau sur sa quille pendant que treuil le hâlait. Une dizaine d’hommes du village regardait la scène en commentant. Après plein d’efforts et de suées du petit homme le bateau était remonté à mi-cale. Sur l’indication du patron, le petit homme a détaché le bateau de son câble et le patron a appelé les spectateurs. La moitié d’entre eux sont venus et ont commencé à pousser le bateau vers l’eau. En profitant de la déclivité celui-là a pris de la vitesse et est rentré vivement dans l’eau. Les spectateurs ne souhaitant pas mouiller leurs chaussures ont arrêté de pousser et seul le petit homme a poursuivi l’effort pour mettre le bateau et son gros patron à l’eau. Un gros caillou immergé a stoppé l’élan du bateau. Tout était à refaire ou attendre la marée montante. Nous sommes retournés à la voiture, parking payant et prune. Ils devaient nous guetter, le spectacle n’était-il pas un coup monté ? J.

L’autre anecdote. La veille, entre deux travaux d’entretien, nous prenions une bière dans le plus proche bistro (la vraie raison n’était pas la proximité du bistro mais la serveuse accorte quoiqu’un peu boudeuse, sans doute une version locale de la saudade portugaise). Le responsable du port, celui qui avait mouillé son T-shirt pour attraper nos aussières, nous aborde et nous offre 2 casquettes de la marina de Funchal en s’excusant de ne pas en avoir 4. Je l’ai pris en  photo, avec son autorisation, en lui disant que je prenais des photos de all the nice guys I meet.

18h, encore 18 milles avant le mouillage, le soleil se couche à 21h et sous spi on ne fait pas route directe. Sous geenacker, la vitesse serait sans doute un peu juste le vent restant scotché largement en dessous des 10 nœuds. A regret mais en étant raisonnable, on rentre le spi et on met le moteur à bonne vitesse vers les Selvagems.

Extrait de l’Imray : les principaux dangers sont repérés, d’autres pas, merci de nous communiquer les coordonnées exactes de ces îles, nos chiffres sont incertains, etc, etc, de quoi encourager à arriver de nuit.

J’arrondis bien les angles des falaises au milieu de nuées d’oiseaux décollant juste devant l’étrave du bateau. Nous en observons un qui rebondit de sommet de vague en sommet de vague comme un hydravion ou un canadair en soulevant une petite gerbe d’eau à chaque fois.

Arrivée à la nuit tombante au pied de la maison des gardiens, présence réconfortante dans un mouillage rouleur avec des brisants à quelques dizaines de mètres derrière nous.

Fin du repas 22h30 pour une nuit que nous espérons calme.

Selvagem Grande est une table avec des falaises de 100 à 150 mètres. Abord hostile avec brisants et déferlantes, débarquement impossible avec cette houle d’ouest d’un ou deux mètres. Cherchons à contacter les gardiens à la VHF, sans succès.

Lever 8h, vite le bain du réveil. Le site est toujours très agité et rouleur, une couche d’écume entoure le bateau et des algues spongiformes flottent, arrachées. Au moment d’y aller, Bernard attire mon attention sur une colonie de méduses camouflées au milieu des algues. Effet frisson garanti. Douche sur la plage arrière avec des seaux d’eau de mer scrupuleusement inspectés. Ca rafraichit, mais c’est moins bon.

La houle augmente et le bateau semble chasser vers les récifs. Le relèvement montre une légère dérive du bateau. Moteur, guindeau, en route vers Selvagem Pequena.

Après une traversée de 2h au moteur vent de face, le site est encore plus impressionnant que Grande. Ca fait penser à la chaussée de Sein les courants en moins. La houle contourne les petites îles et ça déferle de tous cotés.

On mouille par 13 mètres de fond devant une plage de galets gris entourés de pierres affleurantes et une ile faite de dunes et d’un petit relief rocheux d’une cinquantaine de mètres sur lequel est planté un phare, le plus sud du Portugal. Vent d’ouest faible devant tourner nord et nous offrir un meilleur abri.

Enfin, un vrai bain, vérification de l’ancre, elle repose sur le fond, le bateau ne tire pas dessus. Programme repos tant que l’ancre tient.

On est au bout du monde, pas un bateau en vue.

L’ile est sympathique mais inaccessible vu les déferlantes de 2 mètres sur la plage.

On prend la météo, du vent à partir de la nuit de dimanche à lundi. En attendant 5 à 10 nœuds.

Nouveau bain (même Jean Paul trouve l’eau bonne), nouvelle inspection de l’ancre. La chaine semble avoir tiré dessus mais elle ne paraît pas engagée dans du sable et semble reposer sur une dalle rocheuse. Le relèvement du phare n’a pas bougé mais ce mouillage ne m’inspire pas confiance. La houle est toujours aussi forte et ça continue à déferler sur 270 degrés autour du bateau.

Malgré la perspective de 2 nuits en mer, nous décidons de lever l’ancre et de mettre le cap sur Graciosa.

Avant de relever le mouillage, nous décidons de gréer le geenacker pour profiter de la relative tranquillité du mouillage. Et c’est à ce moment que nous avons le premier pépin mécanique sérieux depuis notre départ : alors que le geenacker était pratiquement hissé, le mousqueton de drisse s’ouvre, le geenacker tombe à l’eau mais sans dommage car nous étions encore immobiles à l’ancre ;  par contre le mousqueton, brutalement libéré, est venu heurter une pièce en tête de mat dont nous récupérons un morceau cassé sur le pont. Bilan : une drisse à aller rechercher en tête de mat et identifier la pièce cassée pour commander son remplacement. Nous nous regardons, nous regardons le mouillage toujours très rouleur. Nous décidons de nous passer de spi et de geenacker et d’un bilan précis de la situation en tête de mat jusqu’à trouver un mouillage moins agité. Nous rangeons le geenacker un peu humide dans son sac.

Nous relevons l’ancre qui finit par s’accrocher au fond. On récupère l’orin plus un peu de marche avant et l’ancre se dégage et retrouve son logement. On avait décidé il y a deux mouillages de mettre un orinage à poste sur l’ancre. Comme quoi, il nous arrive de prendre des initiatives intelligentes parfois.

Nous établissons GV et solent, les maillots sont bien mouillés de sueur et la bière méritée. Une baleine vient nous saluer (à quelques dizaines ou centaines de mètres selon les estimations et la myopie de chacun). Toujours des milliers d’oiseaux prenant appui sur les vaguelettes avec leurs ailes, signature des Selvagems. Cet archipel perdu est beaucoup plus impressionnant que les Desertas, ça sera un souvenir fort de ce premier trimestre de navigation. Dommage que nous n’ayons pas pu débarquer pour discuter avec les gardiens.

Nous dinons dans le cockpit, pour la première fois en navigation (riz et calamars puis fromage et enfin fruits exotiques). Nous sommes vraiment proches du tropique maintenant.

Une étoile filante savourée avec Bernard au moment de la relève de quart.

Ça y est, 22h15, nous sommes passés au sud du 30ème parallèle.

La nuit n’est pas froide. La lune dessine l’ombre de la GV dans le cockpit. Au loin les 2 phares des Selvagems  nous disent adios.

Il va bientôt falloir amener le pavillon portugais pour hisser à nouveau l’espagnol.

Comme prévu par les fichiers météo, le vent refuse petit à petit et nous faisons route en étant de plus en plus gité mais pour la première fois à la gite, nous recevons le vent de babord. Jusqu’à présent, c’était une croisière tribord amure, qui, en plus de nous donner priorité, nous faisait giter du bon coté pour mon sommeil. Je vais être amené à mettre la toile antiroulis dans ma cabine.

Minuit, pour la troisième fois en moins d’une heure, l’alarme de la VHF retentit. Cette fois on capte, enfin. C’est un pan pan du coté de Gran Canaria d’abord en anglais puis en espagnol. On ne se sent pas trop concerné, c’est à plus de 100 milles sauf que ça réveille tout le monde. Jean Paul en profite pour se préparer pour son quart qui approche.

La rosée est tombée, les sièges sont mouillés mais la température reste douce, le quart de nuit le plus agréable so far.

Le matin par une bonne brise de travers, une houle pas très forte et avec un bonne longueur d’onde.

9h45, j’amène le pavillon portugais et je hisse celui de l’Espagne. Lors de notre arrivée à Viana, il y a si longtemps, nous avons immédiatement palpé la rivalité franco-portugaise, donc pas d’erreur diplomatique. Les premiers termes d’accueil furent à peu près ceux-ci : bienvenue au Portugal, ici vous n’êtes pas en Espagne, les magasins sont ouverts tout le temps et on travaille. Pof. C’était au moment où l’état espagnol rachetait les banques espagnoles. Ensuite, j’ai lu l’histoire du Portugal : notre rivalité avec l’Angleterre fait parfois pale figure à coté des conflits entre l’Espagne et le Portugal.

Le 4ème cargo depuis ce matin nous croise à ¼ de milles derrière. On revient vers la civilisation. Un dauphin surfe sa vague d’étrave comme dans une célèbre photo de Plisson.

A midi, après la salade en entrée, tagine de poulet aux jueves, ignames, tomates et sa semoule, puis salade de fruits en partie exotiques relevée d’une rasade de rhum versée lors d’une gite accentuée. Pour mon anniversaire, j’avais prévu de larges portions, on aurait pu inviter des bateaux-stoppeurs de pleine mer.

Un aileron de requin tourne autour du bateau, l’heure de la baignade sans doute.

La terre apparaît à 20 milles environ, bon force 4 au 120 nous propulse à plus de 7 nœuds malgré l’absence du geenacker. On dinera au mouillage.

Entrée dans la marina de Caleta del Sebo. Nous repérons une place quand un coup de sifflet impérieux attire notre regard vers le bout du ponton. Un garde en uniforme et matraque nous fait signe. Nous nous approchons et il nous indique une place un peu exigüe vers le bout de l’autre ponton. Manœuvre parfaite nous voilà amarrés. Un pêcheur proche qui nous embaumait de son diesel mal réglé a un rapide dialogue avec le garde qui nous dit que l’on est trop grand pour la place et qu’il faut qu’on aille ailleurs. Il nous indique la place repérée la première fois mais du mauvais coté par rapport au vent. Du biceps pour ramener le bateau au catway contre un vent de travers.

22h30, un bateau espagnol s’amare à coté de nous, arrivage un peu tendu à cause du vent de travers qui avait forci, mais éperonnage évité de peu. Equipage sympathique d’une dizaine d’espagnols qui comptent aller plonger aux Selvagem. Discussion multi-lingue animée.

4 juin, 9h, un gardien revient, rangers, matraque et talkie-walkie pour nous rappeler que nous devons passer au bureau du port. Je termine mon petit déjeuner et j’y vais, traversant Sociedad, ville africaine aux rues de sable, pour arriver devant une porte fermée avec cette affiche (en espagnol) : ouvert de 7h15 à 15h30. J’attends. Au bout de 10 minutes, j’aperçois le gardien du matin qui me voit, m’évite, passe au bistro, va assister au départ de 2 ferries. Je manœuvre discrètement pour être sur son chemin. Au moment de me croiser, il me dit qu’il va appeler le responsable au téléphone. Encore 10 minutes d’attente, le responsable arrive en discussion avec un skipper espagnol. Ce dernier me passe devant sans un regard et un mot et va remplir les papiers avec le responsable du port. Mon tour arrive enfin. Bien sur pas d’explications sur la raison de la fermeture du bureau pendant les heures ouvrables. Moi, calme et souriant, c’était le minimum. Sans doute au courant des pratiques locales, 2 skippers ayant guetté l’ouverture du bureau arrivent derrière moi pour remplir les papiers. Ça ressemble à un bizutage avant de pouvoir bénéficier d’un petit paradis. Une heure entre attente et remplissage des papiers, record à battre. Douches sans eau chaude, montage électrique sur les pontons ultramodernes mais pas d’électricité comme c’était déjà le cas en 2004 d’après l’Imray, apparemment il y a de l’eau douce sur le ponton. Par contre, 11€34 par jour pour la marina, nouveau record à battre.

Parlons du ponton : collection de bateaux équipés TDM, 20 à 30 ans de moyenne d’âge, beaucoup n’ayant pas navigué depuis longtemps et couverts du sable amené par le sirocco. Beaucoup occupés par leurs propriétaires. Atmosphère de bout du monde recueillant les desperados de la voile.

Pierre Henri est monté dans le mat (deux fois, car la première il avait oublié de redescendre la drisse), prendre des photos et chercher à analyser. Cela ne paraît pas trop grave mais nous téléphonons à Allures pour avoir leur avis.

En attendant, coup de vent annoncé pour plusieurs jours, on va prolonger un peu Graciosa.

Jolie traversée Aviez vous fait une réservation pour le port de La Graciosa ? Bon séjour aux Canaries Michel MASIERI

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