Gran Canaria par oël

Gran Canaria par oël

Posté par : Joel
28 Juin 2012 à 01h
Dernière mise à jour 20 Novembre 2014 à 08h
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Voilà, c’est fini pour cette première étape, si vite passée et si pleine de souvenirs.
Nous venons de terminer un petit tour en voiture sur Gran Canaria, différent des autres îles par sa végétation, terminé par une soirée bien arrosée dans les vieux quartiers de Las Palmas, à 5 km du port. Très animés, un peu fête de la musique avec 48h de retard, les femmes très belles en robes du vendredi soir, les hommes souvent plutôt bof. A nouveau ce contraste avec des vieux monuments très bien mis en valeur et des constructions neuves vulgaires et méprisantes.

J’adore l’Espagne, c’est pour cela que je suis parfois un peu critique.
J’aime la langue espagnole, la façon dont ils la chantent, la tolérance vis à vis des accents étrangers. Quel contraste avec les anglais (que j’aime bien aussi, ne serait-ce que parce que par mon coté antinapoléonien bien connu). Les espagnols ne nous embêtent pas avec l’accent, les r, les j, les rr, l’accent tonique. Quant aux anglais, si le th n’est pas bien fait, quel problème. Essayez ‘orange’ en anglais. Accent tonique français sur la deuxième syllabe, erreur en anglais, c’est sur la première. What ? Ok, accent bien mis sur la première syllabe, mais o à la française, trop long. What ? On recommence avec un o à l’anglaise mais on se plante sur l’accent tonique. What ? On recommence. Ça fait longtemps que je suis passé au jus de tomate en Angleterre. Je suis persuadé que si l’on prononce zumo de naranja à la française, plus d’un espagnol sur 2 (qui de toute façon ne parle aucune langue étrangère) va comprendre.
L’Espagne, jambons divins, vins variés (dont de très bons blancs) et fromages gouteux, fruits de mer et poissons, très bonne viande très bon marché (moins de 10 euros le kg pour les meilleurs morceaux de bœuf).
Les rencontres sont chaleureuses, souriantes, ils cherchent à aider, sont patients et nous comprennenet, nous les étrangers, ils nous pardonnent même d’avoir l’équipe de foot que l’on a.

Les Canaries, quelques secteurs consciencieusement sabotés, mais que de centres villes, bourgs, villages adorables, rues pavées, maisons blanches ou au contraire villages aux maisons de couleurs vives, italo-britannique, balcons en bois travaillé ou fer forgé, armoiries, et débordant de partout des bougainvilliers, clématites ou chèvrefeuilles odorants, églises claires, aux statuaires naïves et émouvantes, avec, dans un coin, une peinture, une sculpture, un détail qui rend la rencontre précieuse. Places centrales équilibrées avec l’église, la mairie, le presbytère et un coté ouvert vers la rambla , petites cours et patios, loin des touristes, qui évoquent un art de vivre au soleil et dans le vent (le vrai, celui qui souffle du nord-est sans arrêt).
Les paysages sont surprenants, édifices volcaniques travaillés par le vent et la pluie, mis en valeur depuis des siècles par l’homme, nature opiniâtre et adaptée, routes et chemins improbables, calme et volupté loin des plages et de leurs crevettes, refuges de montagne pour un café ou une bière, terrasse panoramique, seuls, hors saison, en juin.
Impérieuse présence du minéral, jailli des fonds marins qui impose sa masse et sa hauteur à une mer calme ou tempétueuse, cheminées, tentures, drapés, dentelles, structures composites, alvéolées, couleurs majestueuses au coucher du soleil. Plein les yeux.

Las Galletas, Tenerife, j’ai oublié de parler de Sabrina, française, tenancière de bistro un peu chaud, mariée à un anglais, installée depuis 9 ans à Las Galletas, née le même jour que Zidane (26 juin 1972), armée d’une vuvuzela pour fêter la victoire des français sur les suédois (raté, mais on a quand même eu droit à l’engin pour se défouler), reine autoproclamée du mojito avec livre d’or sur drapeaux bretons l’attestant (voir aussi un blog sur STWs doute du même breton). Un des rares endroit du village avec une âme même si elle est un peu perdue.

Les derniers mouillages sur Gran Canaria : Puerto Aldea, l’Imray m’avait fait me méfier : « très bon mouillage, mettre une deuxième ancre pour ne pas être drossé sur les cailloux ». On arrive, c’est tout à fait ça, accélération du vent dans l’axe, rochers proches, pas de place pour l’évitement, même pas essayé de planter la pioche. D’après l’Imray, Puerto de las Nieves est pire. Mais environnement est plus rassurant. On mouille dans 3 mètres derrière une jetée sur des cailloux, ça ripe et on dégage avec 1 mètre de fond sans toucher. On remouille dans 6 mètres dans l’anse délimitée par la même jetée et une balise verte. L’ancre tient dans un amoncellement de caillou, vent jusqu’à 20 nœuds tourbillonnant (l’orin s’est d’ailleurs entouré autour du bateau), grincements perpétuels de la chaîne, mal dormis mais bien tenu à 50 mètres des rochers. Et curieusement aucune difficulté pour relever l’ancre, juste un peu plus dur pour récupérer l’orin enroulé sur le safran.
Le ponton, j’avais lu sur la vie des pontons. Je découvre, c’est comme c’est écrit. A Graciosa, nous étions restés très peu à bord, passant l’essentiel du temps à visiter l’île et les conversations avaient donc été limitées. Ici, bricolage, entretien, réparation, nettoyage, tous les plaisirs de la plaisance nous rivent au ponton pendant de longues heures.
Ponton à majorité francophone, beaucoup de couples avec des enfants de 1 mois à 13/14 ans qui jouent ensemble, ne parlent pas toujours la même langue mais s’en foutent. Des vieux, comme nous, en couple ou entre amis, de vieux loups (de mer) solitaires mais bavards. Les espagnols parlent avec la colonie française et réciproquement. Pour le bateau allemand, c’est plus dur et sans doute surpris, il ne me répond pas quand j’essaie de lui parler allemand, mais au bout de 4 jours, on finit par se dire bonjour avec la femme qui recoud une voile. Petit village d’une trentaine de bateaux, dont la moitié est vide, équipage à la maison. Quelques bateaux de passage, le lendemain, on s’aperçoit du trou à leur place. Le week end, des mamies et des papys viennent visiter les jeunes couples et nous regardent, nous de leur âge, de façon mi-envieuse, mi-interloquée. Des apéros, les uns chez les autres. Je te prête mon vélo, je t’emprunte ton barbecue. Nous ne sommes pas tout à fait intégré, car notre bateau est rangé, le pont vide, sur la plupart des autres bateaux, c’est un peu différent, ça déborde de tous cotés, des hamacs, du linge à sécher, des matelas, des bâches, des vélos, le barbecue, les jouets des enfants, des chaises et fauteuils, de la nourriture dans des filets, une glacière, une planche à voile, … tout un tas de signes qui montre qu’ils ne sont pas sur le départ.
Radio ponton par touches impressionnistes. En arrivant, nous avons dit que nous sommes à la recherche d’un réparateur de voile. Tous nous parle de celui de la marina, bon mais cher, et disent qu’il en existe un autre, en ville… Quelques heures plus tard, quelqu’un passe et nous dit qu’il est du coté de la calle Alemania. Le lendemain, un monsieur que l’on n’avait pas encore vu, nous dit qu’il est calle Calderon (qui est effectivement perpendiculaire à la calle Alemania). J’y vais ce dimanche en reconnaissance, petite porte qui donne sur un sous-sol, enseigne défraichie, velas Linton. Pas envie d’y laisser ma voile. Je vais sur internet. Plus de 400 000 références par google dont le rallye de l‘ARC. Ça doit donc exister vraiment. On verra mardi (lundi férié aux Canaries).
Je cherchais une riveteuse, je l’aurai mardi (en fait non). Je cherche quelqu’un pour nettoyer la coque, je crois que le conseil, c’est d’attendre octobre et d’appeler un canarien qui a un narguilé. Notre voisin a la même éolienne que nous et l’a démontée. Ça nous aide pour démonter la notre. 3 bateaux plus loin, un belge organise des cours pour les enfants scolarisables. J’ai parlé au russe pour lui demander de me donner des pièces de 1€ en échange de mes pièces de 2€ pour aller au pressing automatique. Anglais un peu difficile. Le professeur d’informatique (français, en couple, retraité, ancien légionnaire, sur un centurion, ici depuis 3 mois et demi, en train de prendre son élan pour un dernier tour du monde) me montre qu’en poussant un peu violemment la porte du ponton on peut se passer de clé et se plaint que c’est la cause de vols répétés sur le ponton (bonne mise en confiance pour y laisser son bateau 3 mois).
Je donne des bouteilles de lait périmées (au légionnaire finalement). Ça me permet de créer des liens avec les bateaux espagnols bien qu’ils ne boivent pas de lait. J’échange des conseils sur la façon de calmer un bébé de 1 mois qui pleure avec notre voisin espagnol en ménage avec une toulousaine. Personne ne parle foot et c’est très bien. Personne ne met sa musique à fond, ce n’est pas le cas du ponton 100% espagnol (ou presque) à 50 mètres, on en profite à donf. C’est vrai qu’un espagnol c’est souvent un peu bruyant selon nos critères français, mais nos voisins, ça va.
Dimanche soir, nous sommes retournés au restaurant puerto grill de la marina où les mojitos sont offerts en fin de repas. Prolongations et tirs au but, pour nous faire patienter on a eu droit à un deuxième mojito. L’inconvénient, c’est que cela nous fait paraître les serveuses très jolies et ensuite on exagère sur le pourboire.
Lundi, journée rouge, le soleil est dans un halo d’humidité et de sable, le bateau prend 20 ans. Sur le pont, le pied de Bernard, la chaussure de Pierre Henri, on se suit à la trace. Les palmiers sont rouges. J‘arrête les retouches de peintures, le bateau est sensé être blanc. On est a peu près en ligne avec le planning des travaux. Demain grand jour, les magasins rouvrent après ce pont de 3 jours. Bousculade en perspective.
Mardi, troisième journée grise rosée, 24 degrés dans la cabine, il fait froid. Le soir, 22 degrés, la serveuse allume le gaz en terrasse. Le retour à Paris va être dur.
Invasions de méduses sur la plage de Las Canteras, ça devient glauque.
Les pales de l’éolienne sont en douane. J’anticipe 3 mois de retard. Tuyau ponton : du coté du môle des pêcheurs, on trouve de tout moins cher. On y va, 3 km, on ne trouve rien. Retour. En fait, c’était 2 km plus loin. Ce mardi, on oublie.
Mercredi, on récupère les pales d’éolienne moyennant dédouanement de 30€ en liquide, le réparateur de voile avait oublié son rendez-vous mais finit par venir avec 2 heures de retard et embarque le geenacker, je termine les retouches de peintures malgré le vent, coup d’essai, pas coup de maître (pour la peinture). On achète le pare-battage perdu, on entame la check-list = quitter le bateau. Bernard et Pierre Henri, juchés sur le bastingage, remplacent la pale d’éolienne cassée. Bravo. Deuxième mi-temps Espagne-Portugal, rarement vu quelque chose d’aussi ch…heureusement 2 mojitos gratuits pour accompagner. Du vent, de la brume, de l’humidité, c’est déprimant. On va vite regretter tout ça demain soir à Paris.
Un nouveau voisin, bateau immatriculé en Andorre, 14 ans sur l’eau suite à un cancer vaincu, on refait sa vie. Des tuyaux sur le Cap Vert, le Guatemala, la Colombie et les plus belles femmes du monde. Tout cela nous donne envie de continuer….
Radio ponton a fonctionné, tout le monde sait que l’on cherche des plongeurs en septembre pour nettoyer la carène et resserrer les boulons de la dérive. Les adresses et les recommandations pleuvent. On verra dans 3 mois. Au revoir Tri Martolod, à dans 3 mois.

Ça sent le départ et l’heure d’un bilan pour cette première étape depuis Cherbourg :
- 2400 milles environ depuis Cherbourg (le loch est faux d’environ 10% et propose 2639 milles)
- 41 jours de croisière entre 2h30 et 24h chacun.
- 159 heures de moteur dont un record de 11 heures le mercredi 20 juin.
- 11 équipiers et équipières invités pour des durées de 1 à 30 jours pour un maximum de 9 à bord le 10 mai et un minimum de 2 les 10 et 16 juin.
- 22 ports avec quai ou catway pour 52 nuits dont Sanxenxo avec 6 nuits, Viveiro, San Sebastian de Gomera et Vilagarcia de Arousa avec 5 nuits.
- 12 mouillages forains pour la nuit dont la moitié aux Canaries
- 11 nuits passées en mer dont 4 entre Sines et Porto Santo, notre plus longue traversée.
- les avaries : écoute trinquette endommagée mais réparée, écoute geenacker détruite enroulée autour de l’hélice (mais récupérée en 2 morceaux qui nous sert à doubler le bras de spi), geenacker deux fois à l’eau, déchiré la deuxième fois, pale d’éolienne cassée, poulie geenacker tête de mat endommagée, de nombreuses retouches de peinture à faire et faites (mal) (5), goupille axe de moteur hors-bord perdue, 2 rivets échelle de bain cassés et un pare-battage perdu en mer. J’oublie X matériel de pêche, planchettes et mitraillettes donnés en offrande à Neptune. A part l’énorme connerie du geenacker et de ses dommages collatéraux, bilan somme toute honorable.

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