Notre transat

Posté par : Fred
27 Décembre 2011 à 15h
Dernière mise à jour 31 Décembre 2014 à 14h
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4 décembre 2011: on y est: la transat.

L'avitaillement est fait, le bateau est prêt, l'équipage aussi. Fin de matinée: on largue.

 

La transat c'est quoi? Ce n'est jamais qu'une nav un peu plus longue et un peu plus loin que les autres, porteuse de beaucoup de fantasmes de marins. Les miens étaient totalement idéalisés: la transat serait calme, vents au portant (génois + balooner) donc pas de gîte, soleil, pêche et farniente... Je suis donc partie sans stress particulier (à part celui peut être d'avoir oublié quelque chose dans l'avitaillement).

Reprenons: la transat c'est quoi?

 

C'est d'abord un départ. Nous concernant le 4 décembre (alors que le capitaine voulait partir le 3, et cela ne sera pas sans conséquence....mais il a cédé à la pression générale de nos amis -et de la mienne- pour passer une dernière soirée cap verdienne. Il faut dire que la météo dans le port de Mindelo ne poussait pas au départ: vent en rafales jusqu'à 30 noeuds accompagné de vagues). Donc en fin de matinée, nos amis nous font des bisous, nous larguent les amarres, nous prennent en photos... Tout va bien.

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C'est bien sur une arrivée. La notre fut grandiose. Nous avons géré notre vitesse des dernières 24 heures pour arriver au petit matin et profiter du lever de soleil sur Salvador et la baie de tous les saints. Nous avons eu le choc du "retour à la civilisation" en voyant ces forêts de gratte-ciel seulement espacés par des favellas, des grands panneaux publicitaires, mais aussi des petites maisons du bord de mer toutes en couleurs.

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Nous avons eu en bonus: nos amis (pour ceux partis avant nous ou plus rapides et arrivés avant nous) regroupés sur le ponton qui nous saluent joyeusement, la caïpirinha qui nous est servie dès nos premiers pas sur le ponton (hips! Pour nous il est encore l'heure du p'tit dej), le bracelet brésilien qui est attaché à notre poignet par 3 noeuds pour les 3 voeux que nous devons formuler. Nous avons fait le plein de hug, de bisous, de chaleur humaine après avoir passé 13 jours en mer, comme dit Marius, dans notre petit pays de 3 habitants. Puis un petit bain dans le port...

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Entre les 2, il y a:

  • les rencontres surprise,

  • telles ces immenses tâches rouge/marron que nous avons traversées sans savoir ce que c'était, et nous ne le savons toujours pas;

  • tels ces champs d'algue qui flottent à la surface; ces algues ressemblent à la mousse que nous utilisons en Provence pour faire la crêche, ne manque que la couleur car au lieu du vert mousse, elles sont beige/caramel. Ces plaques sont solides. On a eu la surprise d'en croiser une qui portait une tong! Elles sont si nombreuses que nous nous sommes demandés si elles étaient comestibles: une nouvelle source alimentaire pour des populations souffrant de la faim? Oui, en mer on a le temps de penser à tout et de pousser la réflexion au délire.

  • tels les oiseaux qui prennent notre portique pour un lieu de repos,

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  • tels les dauphins. Plusieurs "familles" sont venues jouer avec notre étrave. Des gris uniformes, des gris tachetés, des plus foncés plus petits et ronds. Tous ont en commun leur amour du jeu.

  • La pêche

  • le congel se vidant peu à peu, Marius a repris ses activités de pêche et nous avons eu le plaisir de manger une jolie bonite et une nouvelle dorade coryphène, très jolie aussi et qui a gardé ses couleurs très longtemps après son trépas. Peut être grâce au raki que Marius lui a glissé dans les ouies?

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  • les râtés bien sur: la transat nous aura couté 3 leurres et une cane cassée.

  • Le passage de la ligne et sa solennité. En ce jour du 8 décembre à l'heure de 19h34 UTC à la latitude de 0 °N longitude 29 ° 09 780 W nous nous sommes présentés à Neptune; convaincu de nos nobles intentions il nous a ouvert la porte d'entrée des mers du sud. Bien entendu les offrandes au Dieu ont été déposées: une bouteille de champagne et quelques toasts de foie gras. Le capitaine de Django Mayosa, qui a passé la ligne depuis bien longtemps, atteste que Marius et Fred bénéficient désormais d'un visa permanent de libre accès au royaume des mers du sud.

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  • Les soucis techniques. Cette fois ce sera le groupe qui fait des siennes. D'abord le filtre à gasoil qui est percé. Mes 2 "macgyver" vont être obligés de réparer le trou avec de la colle, du sika et une baguette chinoise car les filtres que nous avons en réserve ne sont pas les bons! Hourra, après une nuit de séchage ça marche. Le groupe ne fuit plus et veut bien permettre au dessal de produire de l'eau douce (on va pouvoir continuer à se doucher... oui je tiens encore à ce confort là), mais l'embellie est de courte durée. Une vilain problème, à priori électronique, vient se greffer là dessus. C'en est fini de l'utilisation du groupe. Heureusement le plein d'eau a été fait. Pour le reste, on se débrouillera, Monsieur Perkins veillera au plein des batteries. Le convertisseur étant HS depuis avant notre départ, nous nous passerons de 220 à bord pour le reste de la nav.

  • Il y a aussi la VHF qui ne porte pas assez et la BLU qui a un problème d'installation (entre autres) ce qui réduit la communication inter bateaux au strict minimum: on n'entend rien à la VHF, on n'entend que très très peu les vacations BLU..Cela faisait longtemps que nous n'étions pas totalement seuls en navigation. Heureusement, l'organisation nous donnait par mail tous lesmatins ou presque la position des bateaux copains et cela nous permettait de nous situer dans la flotille.

  • C'est la ZIC!!!! le fameux pot au noir. L'ennemi de tout plaisancier partant pour la transat en direction du Brésil. Nous l'avons rencontrée. On y est resté 3 jours!! Et oui, si nous étions partis la veille.... si nous avions pris une route plus à l'ouest, alors tout se serait bien passé, ainsi qu'il en a été pour certains de nos copains. Mais nous sommes partis le 4 et nous avons pris une route qui nous a conduit directement dans la zic, qui toute contente de nous accueillir a décidé de grossir au fur et à mesure de notre présence. On y a fait 360 miles! Sous les grains, dont certains violents (le seul point positif c'est que le bateau est propre, surtout les hauts), par moment sans vent et contre courant (malgré toute sa bonne volonté Monsieur Perkins nous portait à 4 noeuds! Dur dur de vouloir contrer à la fois Neptune et Eole) ou bien pour d'autres moments avec vent dans le nez, mais pas assez stable pour voiler en conséquence, ou encore avec des vents tournants... La M...e quoi. Nous aurons "la chance" de nous trouver sous d'autres grains même bien longtemps après notre sortie de la ZIC. Nous avons donc navigué pendant presque 2 semaines et notre bateau est arrivé propre, non salé à Salvador! Un grand merci à Monsieur Perkins qui a relevé tous les défis et s'est montré d'une régularité de montre suisse. Toujours disponible et disponible à tout instant.

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  • Ce sont des réglage de voiles. Compte tenu de la non installation des alizées, nous avons pu (ou du) sortir toutes les voiles, avec ou sans tangon, les unes avec ou sans les autres, comme une répétition générale de nos capacités d'adaptation et un grand ballet de voilages.

  • C'est la gîte. Ma grande copine. 10 à 20° permanents, mais pas en continu. MERCI les vagues de travers. Mais qui a dit que les super maramu ne gîtaient pas??? malgré tout l'antidérapant disponible, impossible de poser quelque chose sur un plan de la cuisine et de l'y retrouver...Impossible de dormir sans les barres anti roulis. Impossible de ne pas travailler ses abdos/fessiers pour compenser les mouvements (ce dernier point étant le plus positif de tous...)

  • C'est maxsea. La bible pour les pas marins comme moi, un outil précieux pour les autres. Lui sait me dire à chaque instant où je suis, où je vais et surtout combien il me reste à parcourir.

  • C'est un nouveau rythme de vie, cadencé par les quarts de nuit, les siestes de jour, les repas pris ou pas selon l'état. Car il faut aussi traiter avec le mal de mer....J'ai testé scopoderm: un magicien. Les 3 premiers jours, alors que la mer était désagréable et que mes hommes (pour les premières 48 heures) ont été malades: moi: rien. Miracle. Au 4° jour j'ai donc enlevé ce patch magique pensant que mon corps était désormais amariné et que je ne risquai plus rien....J'avais tout faux. Au 5° jour j'étais donc de nouveau nauséeuse, sans faim, sans soif, avec mes bracelets. Je suis restée dans cet état pratiquement toute la traversée!

     

  • C'est l'apprentissage de la vie en vase clos. Nous concernant tout s'est bien passé. Chacun y a mis du sien et voilà. Mais il est vrai qu'en cas de mésentente, il doit être très compliqué de ne pas pouvoir claquer la porte d'entrée et d'aller faire un tour pour se changer les idées et faire tomber la pression.

  • C'est aussi l'apprentissage complet du bateau. Au sortir de la transat on a l'impression de mieux connaître son bateau, de ne faire qu'un, de le comprendre et de pouvoir anticiper. La confiance est au beau fixe. Finalement, avec ce bateau on peut aller au bout du bout du monde.

  • C'est également l'apprentissage de soi. On y est. On est seul à faire face à soi. On se supporte comme diraient certains de nos amis canadiens.

  • C'est de l'eau, de l'eau, de l'eau pas de là haut (sauf dans la zic) et encore de l'eau.

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  • Et puis enfin on peut enfin dire (après l'avoir si souvent imaginé, écouté, commenté) :

      ON L'A FAIT. 

    Ce n'était pas si difficile, pas si facile mais quelque part grisant et très satisfaisant.

     

    Et si l'on repartait tout de suite? Oh non, il y a trop à voir à Bahia, et on va y fêter dignement Noël, la nouvelle année et la venue de notre petite fille née le 22 décembre. Quelle fin d'année quand même! Merci la transat. Merci Alice.

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