Gibraltar - Canaries 2 – 7 septembre 2018
Dimanche 2 septembre, nous nous levons tôt, avec le jour, vers 7 heures, pour préparer notre appareillage.
Nos voisins allemands font de même et ont comme destination l’île de Lanzarote, tandis que nous espérons avoir obtenu une autorisation pour une place à quai à la Caleta del Sebo, sur l’île de Graciosa, qui constitue un parc national. Le temps de saluer une autre voisine, suisse celle-là de plus de 75 ans, qui nous souhaite bonne chance, de régler notre séjour à la marina Alcaidesa, de faire le plein de gasoil et nous voilà partis sous le ciel nuageux au milieu des navires de commerce au mouillage et à couple de leur avitailleur.
Allant à la découverte d’un nouvel océan, et nous avons choisi de suivre les conseils de Jimmy Cornell, dans son guide Routes de grande croisière : en quittant la baie de Gibraltar vers l’ouest, longer le contour des côtes espagnoles, passer au sud du phare de Tarifa, puis de Punta Paloma, avant de traverser le rail des cargos en direction d’un point au large du Cap Spartel, sur la côte marocaine, « situé en dehors de la zone de remous et de déferlantes du Cap Spartel. (…) De meilleures conditions de navigation sont généralement rencontrées plus au large de la côte africaine et donc la route devrait rester en dehors de la ligne de sonde des 200 mètres ».
Le vent est à l’Est et nous avons calculé notre départ en fonction de la marée. La mer est plate, avec un peu de houle, et le vent nous pousse. A l’approche de la pointe du phare de Tarifa, de très nombreux moutonnements nous inquiètent et nous arisons rapidement génois et artimon et passons péniblement la pointe, secoués par la mer, hachée de fait d’un courant contraire, mais heureusement poussés par le vent. Après le passage de la pointe, ce chaudron se calme et nous poursuivons notre route, comme prévu, avec toujours un vent favorable. Nous croisons de nombreux cargos et tankers en traversant le rail, mais sans que cela ne pose de problème.
Le Cap Spartel, dans la brume du matin, se dégage et nous voyons au loin ses plages de sable le long de la côte atlantique.
Cette première partie de la traversée étant achevée, nous nous préparons à 4, 5, ou 6 jours de route vers les îles Canaries. Le vent d’Est du départ nous abandonne peu à peu pour tourner à l’Ouest – Sud - Ouest, avant de devenir trop faible pour naviguer à la voile. Nous alternerons ainsi les moments de voile plus ou moins rapides et les longs moments de moteur ; nous avons même tenté un moment de nous laisser dériver pour laisser reposer le moteur, mais la houle nous poussait vers la côte marocaine à pas loin d’un nœud… Nous reprenons notre route alors au moteur, constatons une belle et longue ondulation de la houle derrière nous, comme des collines mouvantes, bien arrondies : le vent attendu ne saurait tarder à arriver, et effectivement en début d’après-midi du mardi 4, il vire à l’Ouest-Sud-Ouest et nous pouvons faire un bord de près jusqu’en début de soirée. La nuit se passe encore au moteur, par manque de vent. Mercredi 5 au matin, après 350 milles de navigation depuis Gibraltar, le vent s’établit enfin au Nord et nous pousse, mais une houle différente de la direction du vent complique le travail du pilote qui tente de maintenir le cap vers notre destination. Nous décidons de tirer des bords pour être moins secoués par la houle, rallongeant ainsi la route, qui commence à nous paraître déjà bien longue, mais nous avançons assez rapidement…
Nous finirons le trajet au moteur, et en route directe, à partir du vendredi 7 septembre, à 4 heures… pour arriver à 10h20 à Caleta del Sebo, port de l’île de Graciosa.
Fatigués, mais heureux, nous avons été accueillis par un agent de sécurité, (nous avions reçu l’autorisation de nous amarrer par mail, merci le téléphone par satellite !) et par un autre navigateur, français, qui nous ont aidés à nous amarrer au cateway.
1386 milles depuis notre départ, 631 depuis Gibraltar, le compteur commence à tourner !
Pour ce baptême de l’Atlantique, les impressions sont variées. Nous avons trouvé cette étape fatigante, secoués, en constante recherche d’équilibre, dans un bateau contrarié dans sa route par la houle.
Néanmoins, nous avons eu le plaisir d’être accompagnés presque chaque soir, par des dauphins venant jouer dans l’étrave ;
gris ou mouchetés, montrant leur ventre blanc pour nous regarder, avant de pirouetter dans l’eau, ils nous ont offert de beaux moments.
Au matin, dans le calme, un cachalot dormait vers notre tribord avant, son souffle ayant attiré notre regard ; il a fini par plonger, sans éclaboussure…
Un exocet (poisson volant) a fini sa course sur notre passavant, ainsi qu’un petit encornet. Outre cette pêche fortuite et bienvenue, une daurade coryphène de plus de 6 kilos a mordu à notre rapala !
Un passereau fatigué et affolé a fait une brève pause sur notre plage arrière….
Les couchers de soleil honoraient leur réputation.
La nuit, sur une mer d’huile, le plancton semblait prolonger la voie lactée et sa poussière d’étoiles, et l’éclat de l’écume qui pétillait, rappelait la poussière de la Fée Clochette ! Les créateurs des studios de Walt Disney avaient-ils navigué dans les nuits d’encre ? Le Carnaval des Animaux de Camille Saint-Saëns, dans la partie « Aquarium », en fin de morceau, évoque cette écume qui pétille et scintille, en faisant tinter des cloches ascendantes…
Graciosa nous accueille avec gentillesse et nous avons l’intention d’en profiter pour nous reposer, pour visiter l’île et tenter de comprendre son histoire… une belle escale s’ouvre à nous !
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