Vers le Nord, cette fois.

Posté par : Christine et Yves
26 Juin 2022 à 17h
Dernière mise à jour 27 Juin 2022 à 09h
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Vu par Yves​​​​

Oui, Petrel a repris la mer, début juin, presque discrètement.

Car nous vous avons, cette année - et jusqu’à présent ! - épargné les préparatifs. Il faut dire que nous avons été plus qu’occupés par des travaux et un déménagement que nous avons abandonné dans ses cartons pour rejoindre Petrel et l’armer, tambour battant, afin de saisir un créneau météo vers les Iles Scilly.
Contrairement à l'an dernier, la Grande Bretagne est  accessible aux français.
Yves avait passé une quinzaine de jours à Roscoff, à Pâques, pour caréner et réviser le moteur de Petrel, mais beaucoup restait à faire : embarquer les voiles, le « bib » (l’annexe pneumatique) et son moteur, re-gréer la plupart des manœuvres courantes (les cordages permettant de manœuvrer les voiles) et, au passage remplacer l’écoute de grand-voile, vider et caser dans les coffres et équipets le contenu des nombreux sacs apportés avec nous et un plein de victuailles (l’avitaillement), etc. Avec, cerise sur le gâteau, la réparation un peu compliquée d’un chandelier qui nous est resté dans les mains.

  
Avant  carénage...  

 

Objectif pour cette saison : le solstice d’été aux Iles Shetland. Avec dans l’idée d’y « monter » assez vite en espérant y être pour fêter la musique avec les phoques, puis d’en « redescendre » tranquillement, en visitant autant d’îles et de mouillages que possible. Nous avons bénéficié d’un briefing express de la part de Philippe et Claire (Bye-Bye, déjà cité), amoureux de l’Ecosse, qui nous ont donné plein d’indications pour des mouillages isolés.

Or donc, sans tambour ni trompette, nous avons quitté Roscoff le 2 juin en fin de matinée, avec une jolie brise de NE. Traversée assez rapide, sans histoire, si l’on excepte la tension consécutive à la traversée des « rails » (routes des cargos et autres pétroliers), de nuit.

Le jour se lève très tôt ici (surtout lorsqu’on n’a pas encore adopté l’heure locale !) et l’arrivée en début de matinée aux Scilly est magnifique. Nous remontons le Saint-Mary’s Sound au près, contre le courant (relativement faible), sereinement.

Après un tour à terre et une bonne nuit au mouillage sur coffre - jaunes, pas vert, plus chers et réservés aux bateaux plus longs - nous repartons en fin de matinée (eh oui, les courants…) vers le nord, par tout petit temps. Et après une navigation plutôt tranquille nous entrerons le lendemain soir dans l’étonnante baie de Milford Haven, au Pays de Galles du sud. Combinaison inédite pour nous de centrales électriques, d’usines de raffinage et de nature paisible. Les rives de cet estuaire accueillent de nombreux pétroliers et méthaniers, dont les manœuvres sont assistées par une nuée de « pousseurs » impressionnante. Le plaisancier est prié de se tenir à l’écart ! Et pourtant on ne ressent pas ici cette impression de stérilisation propre aux espaces industriels que nous connaissons.

Nous jetons notre dévolu sur une petite marina un peu à l’écart, Neyland, au débouché d’un vallon. Nous y trouvons une place, un peu exigüe, ce qui nous offre l’occasion d’un magnifique créneau. Encore une bonne nuit, suivie d’un breakfast couleur locale au restaurant du club, et nous repartons, pour profiter d’une météo toujours favorable.

Nous commençons à trouver un rythme de vie adapté à des traversées de 24 à 48h, en nous calant sur des quarts de 4 heures. Et comme les crépuscules et les aurores s’allongent sensiblement, la nuit proprement dite n’excède guère 5 heures, ce qui passe assez vite. Entre les informations fournies par l’AIS et la bonne visibilité offerte par le roof de Petrel, il n’est pas utile de rester longuement dans le cockpit et les heures de quart sont plutôt confortables.

Après une journée de petit temps, le vent forcit en soirée et nous réduisons la voilure pour la nuit : 1 ris dans la GV et génois réduit. Décidément la possibilité de rouler le génois est plaisante et limite les incursions sur l’avant. Mais la trinquette est tellement plus satisfaisante… La nuit sera tonique mais, avec un vent de SSW 5 à 6 Beaufort, nous progressons vite. Et au matin, malgré des démêlés avec un casier, probablement, nous arrivons devant Dublin et sommes bientôt au ponton de la marina de Dun Laoghaire (prononcer Dun Leary). Nous y demeurerons quatre nuits pour laisser passer une dépression et des vents forts.

Nous en profiterons pour rejoindre Dublin en train et visiter un peu la ville, qui nous parait à la fois très décomplexée en termes d’urbanisme (juxtapositions de constructions inenvisageables en France) mais très encombrée par une circulation qui nous renvoie aux années 80. Yves, qui y avait passé une semaine 45 ans plus tôt, ne reconnait pas grand-chose…

Nous profitons aussi de l’escale pour faire refaire une latte de grand-voile, inexplicablement volatilisée… et découvrons que le gousset qui la retient s’est déchiré. Il faudra faire réparer par un voilier.

Le 12 au matin le vent s’est calmé. W puis WNW et enfin NW, pas très régulier, il nous permet cependant de bien avancer et de passer sans louvoyer le « North Channel » qui consacre notre entrée dans les eaux écossaises.

Sur les conseils de Philippe et Claire, nous visions comme point d’arrivée   un mouillage rebaptisé par eux « Baie des phoques », sur la côte SE de l’île de Jura. Mais comme nous espérons pouvoir repartir rapidement vers les Hébrides extérieures, nous décidons de mouiller vers 16:00  dans l’anse de Port Ellen (Ile d’Islay), face au port, en vue de la distillerie de Laphroaig.

La situation météo ne nous enchante pas : une grosse dépression s’installe entre l’Islande et l’Irlande. Les jours à venir seront venteux. Et nous ne « sentons » pas trop la montée vers les Hébrides Extérieures avant peut-être une semaine. Un « plan B » s’impose.

Aussi, repartis en milieu de matinée pour profiter du courant, nous embouquons le « Sound of Islay ». Le fort courant pousse Petrel à des « vitesses/fond » rarement atteintes et nous offre de belles « marmites », dont le pilote se tire très honorablement.

Nous remontons ensuite la côte NW de Jura pour trouver un magnifique mouillage, rive sud du Loch Tarbert. Nous y sommes, seuls avec nos premiers phoques (Christine en rêvait) et des oiseaux. Le temps de savourer l’instant puis de débarquer, d’autres voiliers arrivent. Tant pis pour l’image d’Epinal !

Il nous faut nous décider et adopter notre plan B : quitter les Hébrides pour rejoindre Inverness par le Caledonian Canal. Une semaine dans les eaux intérieures – douces – du canal et des lochs, dont le Loch Ness de bout en bout. 96 km, beaucoup d’écluses et de ponts mobiles dénommés « swing bridges » : la langue anglaise est formidable ! Direction Oban, donc, tôt le matin (toujours pour le courant), avec une bonne brise de 17 ou 18 nœuds (force 5). Très belle arrivée, vent arrière dans le Kerrera Sound. Puis ponton de la Transit Marina (toute neuve et apparemment réservée aux bateaux de passage : 3 nuits maximum). Un bond dans le temps pour Yves qui était venu naviguer ici en 1972. 50 ans… Malgré un développement touristique important mais visiblement insuffisant, la ville ne paraît guère changée. Journée touristique : bain de chlorophylle et visite du château (Clan McDougall, héritier des Vikings installés ici il y a 1000 ans), pub (où Christine trouve aussi le cidre qu’elle apprécie, découvert en Irlande), petite langouste, …

 

Pleins de courage nous repartons à l’étale de PM, le 17 au matin, vers Fort William, point d’entré du Caledonian Canal. Mais il fait franchement mauvais : pluie drue et vent de 30 nœuds, bien au-delà des 15 kn annoncés par Windy, site météo incontournable… Constatant qu’il ne s’agit pas d’un simple grain nous rebroussons chemin et cherchons un coffre près de la Marina Kerrera. Mais nous ne trouvons qu’une bouée grise, volumineuse … dont nous serons délogés quelques heures plus tard par un bateau de pêche. Tout ce qui navigue se replie apparemment dans la baie d’Oban.

Nous trouvons finalement un coffre côté Oban, à l’ouvert du Kerrera Sound où nous encaissons de belles rafales… La  journée du 18 est passée au mouillage, enfermés, car le temps est exécrable. Les bateaux tirent sur les chaines des coffres qui sont parfaitement tendues.

Ce n’est que le dimanche 19 au matin que nous nous risquons à nouveau hors de la baie d’Oban, sous deux ris et trinquette, au près. Nous sommes l’un des rares bateaux à sortir. Le vent est toujours là, mais il ne pleut plus et la visibilité est bonne. La mer étant très atténuée au fond de ces multiples bras de mer, nous avons un peu l’impression de naviguer sur de grands lacs.

Bien nous en a pris : au fil de la journée le vent ira diminuant et nous pourrons larguer un ris. Puis affaler devant Fort William, avant de mouiller à une encablure en amont de l’écluse de Corpach, entrée du Caledonian Canal. A peine l’ancre au fond, nous avons la surprise d’entendre puis de voir un train à vapeur passer sur la berge. Il nous salue d’un coup de sifflet et de grands gestes du chauffeur ! C’est le train (touristique) qui a incarné le « Poudlard Express » de Harry Potter (le « Hogwarts Express » en anglais).

(à suivre)

 

Vu par Christine

Rien de tel qu’une petite avarie pour prendre le temps d’écrire quelques lignes.
Un méchant ponton nous ayant sauvagement agressés, nous sommes posés quelques jours à Inverness pour réparer le trou dans la coque.

C’était pourtant notre dernier jour sur le Caledonian Canal. Nous venions de le traverser depuis Fort William et ces quatre jours avaient été formidables : premier soleil (ou presque) depuis le départ, température quasi normale, c’est-à-dire autour de 18/20° C au lieu de 11/12° C.

Mais reprenons. Yves a écrit une belle bafouille sur notre périple depuis notre départ il y a maintenant presque quatre semaines.

Traversée de la Manche que je craignais : un vrai régal. Vent régulier, pas un seul bord à tirer de toute la nuit, juste viser entre les cargos et les pétroliers. Je dois dire que la grande difficulté pour moi est d’arriver à apprécier la distance juste, la nuit. Même si les instruments donnent les informations nécessaires et le point d’impact (si, si), notre frêle esquif est bien impuissant face à ces géants. Ça passe, ca passe pas, ça passe…ouf c’est passé. J’ai dû réveiller Yves un peu brutalement, une fois, car j’avais beau être à peu près sûre, je n’étais qu’à peu près sûre.

Arrivée aux Iles Scilly que nous n’avions qu’entraperçues il y a quatre ans. On ne les a pas vues beaucoup plus, car l’idée est d’avancer le plus au Nord possible tant qu’on est proche du solstice. Le bassin de mouillage était plein de bateaux pavoisant, pour cause de jubilée de cette chère Elisabeth II (95 ans. Quand on pense qu’elle a enterré des dizaines de chefs d’Etat, de rois, de reines, de papes, qu’elle a côtoyé De Gaulle, Churchill, etc. Quel destin !). Il y avait en ville des animations pour l’occasion.

Départ donc assez rapide pour le Nord : stop à Milford Haven, au Pays de Galles, petit port bucolique…. ah non pardon ! Grand port méthanier et pétrolier ?! Comment font-ils pour concilier aussi simplement et efficacement un lieu manifestement dédié aux hydrocarbures et l’impression d’être dans la nature ? Bravo. Ce genre d’endroit, chez nous, donne immédiatement envie de s’enfuir, ici on aurait presque envie d’y vivre. Nous remontons la rivière Cleddau Ddu (et oui) pour accéder à la marina du coin, Neyland Yacht Haven, et sommes d’emblée mis à niveau concernant les « marinas » anglaises. Grandes sur la carte, présentées comme des lieux capables d’accueillir les bateaux, mais nous allons découvrir au fil de notre périple que la notion française ou espagnole ou méditerranéenne de la marina n’a pas grand’chose à voir : des services oui mais en petite quantité et pas tous, très peu de places, la plupart privées. On ne sait pas bien où se mettre. Personne à la VHF ou à la radio après 17h et jamais le week-end (on se croirait dans Astérix chez les Bretons !). Bref on se débrouille comme on peut et quand on arrive à trouver quelqu’un, ce quelqu’un est par contre généralement très sympathique et accueillant.

Départ le lendemain matin après un authentique « full English breakfast ». Yes ! Rien que pour ça, ça valait le coup de venir.

 

Partout, les gens sont curieux, nous demandent d’où on vient où on va. Ça permet de reprendre contact avec l’anglais que nous n’avions pas pratiqué, ni l’un ni l’autre, depuis un certain temps. Perso, c’est une langue que j’adore, je suis contente de pouvoir la parler.

Prochaine étape, Dublin. Mais nous nous posons à la marina  de Dun Laoghaire, pas au centre-ville. (Cette fois, c’est une vraie marina, au sens que nous connaissons, le train passe devant, on peut aller en ville en 15 mn). Nous faisons un stop de deux jours pour découvrir un peu. Difficile de donner un avis en si peu de temps. L’impression générale est quand même celle d’une ville qui aurait pu être une ville française des années 90, pas encore rénovée, relookée, encore beaucoup de circulation et de pollution. Même accueil sympa, et je vais tomber amoureuse du cidre à la tireuse. Qu’on ne me parle plus de bière ! Vive le cidre !

Puis le début des côtes et iles écossaises. Là encore, puisque nous visons le Nord, nous passons rapidement pour revenir au retour, mais ce que nous traversons est superbe. Le passage le long des iles Jura, Scarba, Lunga, avec vue sur Mull de l’autre côté est magnifique  ! Je n’imaginais pas cette navigation quasi en lac. La terre n’est jamais loin. Ça augure d’un retour plein de belles choses à visiter.

Mouillage à Loch Tarbert : le loch ayant quelque chose à voir avec nos « abers » et les « rias » espagnols, ou les « fjords ». Et rencontrons nos premiers phoques : une mère et son petit. Superbe vue sur les trois monts de l’Ile Jura, les Paps.

On contournera l’ile de Islay et ses distilleries bien connues (Caol Ila, sur la photo). Idem : passage au retour.

Oban : un peu de tourisme, d’autant que la météo n’annonce rien de bon venant de l’Ouest. Grosse dépression. Visite de notre premier château en Ecosse : le château des sieurs McDougall, qui ont également donné les McDonald. J’apprends à l’occasion que Mc veut dire « fils de ». Très vieille famille descendante directe des vikings qui s’installèrent là il y a plus de 1000 ans. Retournez tous un peu à vos arbres généalogiques, il y a du travail pour entrer en concurrence ! Le dernier McDougall habite donc toujours là, mais dans une jolie maison blanche, un peu moins exposée à tous les vents. Dommage, car la vue depuis le château est exceptionnelle par cette première journée vraiment dégagée (avant le mauvais temps) .

La question se pose de savoir si nous attendons de regarder passer le mauvais temps ou si nous changeons notre fusil d’épaule et empruntons le Caledonian Canal. Je suis très partante pour ça, n’ayant jamais navigué sur des canaux ou des lacs. Yves est OK, c’est donc parti… ou presque. Première tentative de sortie d’Oban un peu ratée. Aucun de nous n’a le courage d’affronter du 30 nœuds, froid, pluvieux, chiant, demi-tour.

Comme tout le monde a fait pareil, cela nous vaudra les mésaventures de mouillage relatées par Yves.

Deux jours plus tard, nous repartons cette fois et après une belle journée de navigation, au cours de laquelle nous apercevrons cette fois une colonie de phoques, nous arrivons en… non vue du canal… Je m’explique. Là encore, les revues, guides et autres sources d’information présentent le Caledonian Canal comme la chose à voir et à faire. On s’attend à une entrée dans la première écluse du canal, au moins visible, avec des pontons d’accueil.

Par précaution, on s’est enregistré en ligne, le vendredi, sur Internet, pour un passage le lundi matin à l’ouverture, à 8h.

Une fois passé Fort William, comme il est un peu tard (autour de 18h30) et que nous sommes dimanche, nous essayons d’appeler quatre numéros de téléphone pour savoir où on se met au mouillage, ou au ponton. Personne. Nous avançons donc, le cœur vaillant, et dans un recoin boueux de la rivière on finit par apercevoir une petite porte d’écluse qui semble bien être l’entrée du grand canal écossais.

Attention, tout ça sans méchanceté. Nous mouillons l’ancre dans la vase. Personne à l’horizon, nous sommes seuls. Pas de ponton d’attente. On en profite pour regarder et écouter les oiseaux, dont un beau cygne et un magnifique héron argenté.

Et puis, tout à coup, qu’entendons-nous ? Un tchou-tchou intéressant. Débouche doucement une vieille locomotive et ses vieux wagons, dont nous savons pour l’avoir lu qu’il s’agit du vrai Poudlard Express ! Il passe très près, le long de la berge et comme nous le filmons, le chauffeur nous fait signe et tire sur son sifflet pour nous saluer.

(à suivre)

 

 

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