Brindisi - Croatie 21 - 27 Juillet
Nous appareillons donc de Brindisi vers 9 h le vendredi 21 Juillet, après avoir fini le plein des approvisionnements avec le besoin de se faire une idée de la production locale : le vin blanc sur Hédonist qui sera bien sûr partagé et gouté avec modération et le gasoil dans nos bateaux.
Nous suivons donc la route optimisée que notre logiciel de météo nous a proposée, tenant compte de la variation des vents et des performances de nos bateaux. Au lieu de nous fixer un cap direct à 5°, soit quasiment plein Nord, nous partons cap au 300° soit plutôt au Nord-Ouest, avant d’incurver notre route au 345 °, puis au 25°, pour cette traversée de 147 milles nautiques.
Nous avons choisi de faire les formalités d’entrée en territoire Croate à Cavtat, à 5,5 milles nautiques au Sud de Dubrovnik, afin d’éviter les grands quais pour paquebots du port de commerce de Dubrovnik : Gruž.
Nous quittons Brindisi sans vent et devons attendre midi, l’arrivée du vent prévu pour établir notre spi et couper le moteur. Nous ajusterons notre route pour optimiser route et vitesse au spi, et avancerons de manière sereine à 4 ou 5 nœuds durant toute cette fin de journée de traversée. A 18 h 15, nous fêterons nos 1000 milles de croisière, depuis notre départ le 25 Juin de Marseille.
Mais le vent faiblissant, nous affalerons vite le spi, pour poursuivre sous génois, grand-voile et artimon appuyés par le moteur.
Nous anticipons aussi sur le prochain point tournant de manière à nous extraire rapidement du rail de navigation des bateaux marchands qui sont assez nombreux dans cette partie de l’Adriatique, faisant route entre Venise et le Sud de l’Italie ou la Croatie.
Nous admirons une fois encore le coucher du soleil, bien rond et bien rouge au-dessus des côtes italiennes.
Durant la nuit nous alternons les passages au moteur, les temps de pause pour permettre au moteur de refroidir, et les tentatives de navigation à la voile avec vent faible. Ce n’est que vers 4 h samedi 22 Juillet que le vent recommence à nous porter, soufflant de l’Est et se renforçant nous permettant d’effectuer les derniers milles de cette traversée au près, puis au près bon plein entre 6 et 7 nœuds.
Vers 11h, nous sommes en approche de Cavtat, caché derrière des îles et une presqu’île, et nous terminons cette partie au moteur, pour mieux passer la houle, le vent faiblissant un peu.
Vers 12h30, nous nous amarrons arrière à quai après avoir mouillé notre ancre, au quai des formalités de Cavtat. L’exercice est un peu compliqué par un vent de travers, mais nous sommes bien secondés par l’équipage d’Hédonist déjà en place. Après s’être acquitté d’un droit pour débarquer sur ce quai, Dominique fait les formalités douanières et administratives : liste de l’équipage, papiers d’identité des membres de l’équipage, acquittement des différentes taxes pour être autorisés à naviguer en Croatie. Seul le capitaine a le droit de passer à terre pour réaliser tout cela. Une fois ces formalités terminées, nous sommes priés de repartir immédiatement, car les bateaux sont nombreux à attendre leur tour dans la baie et ce quai n’est qu’un quai d’accueil le temps des formalités.
Cela nous a laissé le temps de découvrir ce paysage croate : des constructions en pierre claire, des églises, des bâtiments plus modernes, plus ou moins bien intégrés dans le paysage, des pins très verts, et des cigales toujours célébrant les jours d’été.
Hédonist qui est reparti avant nous de Cavtat, rejoint une anse au Sud de l’île Lopud, qui est située au Nord de Dubrovnik ; pour nous, fatigués par la houle sans vent qui nous malmène, nous nous engageons dans l’anse de Zaton tout de suite au Nord de Dubrovnik, pour nous reposer pour le reste de la journée. Cela nous fait passer devant Dubrovnik, de loin, et nous permet de deviner ses remparts, ses constructions à l’abri dans leur anse derrière l’île de Lokrum.
Nous découvrons des îles vertes, des collines ou plutôt des montagnes en calcaire relativement gris, des bords de mer gris ou ocre. Dans l’anse de Zaton, nous sommes heureux de pouvoir nous baigner et nous délasser de cette trentaine d’heures de mer, dans un site magnifique. Le fond de notre anse est une crique entourée de hautes collines étageant les couleurs : le vert des arbres, et le gris des rochers au-dessus, et le bleu du ciel.
Nous mettons l’annexe à l’eau et partons un petit moment à la découverte de Zaton. Le village est un peu plus vers l’entrée de l’anse sur son côté Sud-Ouest. Les quais sont occupés par des annexes ou des petites barques de pêche, sur corps morts, et par des familles se baignant tout le long. Quelques belles unités sont au mouillage devant le village, au milieu de l’anse, ainsi que deux gros bateaux de pêche, avec leurs casiers multicolores.
Nous nous reposons dans la première partie de la nuit, mais au petit matin, dimanche 23 Juillet, nous avons dû reprendre notre mouillage par deux fois : le fond de vase faisait qu’avec le vent thermique de la nuit, nous glissions doucement vers des quais et des bateaux. Plus tard, nous avons appareillé pour retrouver Hédonist dans une anse sur une autre île, toujours dans le Nord-Ouest de Dubrovnik : Koločep (anse Gornje Čelo). Nous commençons l’autre partie de cette croisière avec un autre rythme : découverte d’un mouillage, bain, et repos en essayant de retenir tout ce qu’il y a de beau autour de nous… L’eau doit être au moins à 26 °, et nous ne nous posons pas trop de questions pour aller nous baigner. Elle est d’une grande clarté et les oursins sont nombreux sur la partie nord de l’anse. C’est dimanche et nous ne sommes pas seuls à profiter de la douceur de l’eau et du lieu.
En fin d’après-midi, nous appareillons pour rejoindre le mouillage que nous avons choisi pour la nuit : Rijeka Dubrovačka : c’est un bras de mer encaissé, au Nord-Est de Dubrovnik où s’écoule une rivière : l’Omble. Nous mouillons le long de la rivière, (ce qui nous met mal à l’aise quelques instants, habitués que nous sommes aux mouillages au fond d’une calanque ou d’une baie !), dans une partie un peu plus large que le reste, à proximité d’un « terrain » de water-polo, dans lequel se déroule un match, devant des bateaux amarrés au quai plus ou moins abîmé construit en pierre.
Ici encore, comme à Zaton, les familles et les enfants viennent jusqu’à la tombée de la nuit, se baigner et s’amuser dans l’eau. Nous avons fait ce choix de mouillage pour permettre à l’équipage d’Hédonist d’aller visiter Dubrovnik, avant qu’il ne reparte pour la France. Une traversée en annexe de la rivière leur a permis d’atteindre le hameau en face et d’y prendre le bus pour la ville. Pendant ce temps, nous consacrons notre journée du lundi 24 Juillet à la gestion de notre courrier, et des points administratifs en attente, au repos, à la lecture, au piano ; nous aidons Yann à reprendre son mouillage qui dérape sur la vase.
Un peu plus tard, nous faisons un petit tour à terre pour aller voir de près un navire qui a attiré notre regard en arrivant : il s’agit d’une réplique d’une caraque, le bateau marchand des marins de la République de Raguse / Dubrovnik, du temps de sa concurrence avec la République Vénitienne, et nous nous demandons si cette réplique peut naviguer.
Vers 19 h nous quittons la Rivière pour retourner passer la soirée à Zaton. Le ciel est magnifique, avec de nombreux nuages et le soleil qui diffuse ses rayons à travers.
Nous sommes suivis par une caraque qui vient comme nous mouiller dans le fond de l’anse de Zaton ! Avec l’éclairage du soir, sa proue paraît être un monstre qui fonce sur nous ! Ces bateaux marchands étaient bien défendus, lorsque l’on voit la hauteur de la proue et du château.
La fin de nuit, mardi 25 Juillet, est une nouvelle fois perturbée par des orages qui tournent au-dessus des sommets autour de l’anse, sans nous donner de pluie, mais nous obligeant à reprendre notre mouillage 4 fois dans la nuit. Nous n’avons plus sommeil ! Nous regardons le temps évoluer, le vent se calmer petit à petit, le soleil revenir, et nous pouvons enlever nos pulls ! Le retour du soleil et de la chaleur nous permet d’apprécier les couleurs comme lavées après les orages, et c’est à regret que nous quittons l’anse après le déjeuner pour rejoindre la Marina Dubrovnik, au fond de Rijeka Dubrovačka, où nous avions réservé des places pour effectuer le changement d’équipage d’Hédonist et pour accueillir notre vieux complice Alain et sa compagne Véronique venus naviguer avec nous deux semaines, et partager avec nous la découverte d’autres paysages et d’autres eaux que ceux que nous avions l’habitude de fréquenter ensemble en rade de Marseille. Cela fait maintenant plus de quarante ans que nous naviguons ensemble, ou de concert chacun sur nos bateaux et si Alain est plus tourné vers la régate et la vitesse pure nous échangeons en permanence sur la manière d’améliorer nos fiers vaisseaux !
La remontée de Rijeka Dubrovačka nous offre toujours la même émotion que deux jours auparavant : après avoir contourné l’îlot Daksa, nous sommes face à un pont routier au-dessus de la rivière à 50 m de haut.
Il est construit en deux parties, l’une avec un tablier sur une pile, prise dans la berge Nord, et l’autre avec un tablier suspendu au départ de la berge Sud. Juste avant lui s’ouvre sur notre tribord la vaste calanque du port de commerce de Gruž, avec des paquebots de croisière.
Notre arrivée dans la Marina est un peu compliquée du fait de la configuration des pannes, et du vent qui se renforce en milieu de journée, mais nous avons la chance de n’avoir aucun vis-à-vis ce qui nous laisse un peu de marge pour notre manœuvre.
A cette arrivée, nous découvrons le tempérament slave de l’agent d’accueil de la marina dont on nous avait beaucoup parlé : un visage d’une froideur impavide, presque « british ». Mais comme nous sommes dans la tension de l’amarrage, cela ne nous impressionne pas trop.
Nous cédons, une fois de plus, au rite d’arrivée dans un port ou dans une marina : rinçage, séchage, repérages… A cela s’ajoute la recherche de la société de services de la marina auprès de laquelle nous avions demandé pour la journée du 26 Juillet, un rendez-vous avec un mécanicien : il nous faut bien essayer de régler notre fuite d’huile.
Mercredi 26 Juillet, nous attendons donc notre mécanicien, à qui nous confions différentes tâches : changer la durite d’échappement, changer la pompe de vidange d’huile et faire la vidange de l’huile usagée, et vérifier le réglage des culbuteurs. Tous ces échanges se font en anglais, avec un croate ! Nous n’avons pas trouvé les bons termes dans nos dictionnaires et nous découvrons que le chef de la société de service refuse de toucher aux culbuteurs, car il n’a personne pour le faire… Nous partons à la recherche d’un autre mécano, au pavillon Volvo Penta de la marina ; quelques échanges téléphoniques plus tard, un mécano vient nous voir et nous assure nous envoyer un message le lendemain pour nous dire à quel moment il fera ce travail délicat, dans les deux jours où nous sommes à la marina. Nous n’aurons jamais plus de ses nouvelles…
Mercredi 26, le jeune mécano a changé la durite d’échappement. Nous avons été surpris par la manière de travailler de cette société de services : le rendez-vous de 8 h est devenu une arrivée sur le bateau à 9 h 30 ou 10 h, pour voir ce qu’il y avait à faire ; ensuite, le jeune homme est retourné chercher ce qu’il lui fallait pour retirer l’ancienne durite d’échappement, mais sans revenir avec la nouvelle ! Elle fera l’objet d’un autre aller-retour avec le chantier… La journée de travail finissant vers 15 h, il faudra bien les deux journées prévues à la marina pour effectuer toutes les réparations. De toute façon, la nouvelle pompe de vidange est dans les bagages d’Alain et Véronique, qui se la sont procurée chez le dépositaire Perkins de Marseille, et nos amis n’arrivent que mercredi en fin de journée ; donc ce n’est que jeudi 27 que le changement de pompe de vidange et la vidange d’huile ont pu être effectués. Pour la vidange, nous avons dû fournir notre filtre à huile de réserve (sous peine de perdre encore une demi-journée pour aller chercher un filtre en ville !)….
Pour nous, cela a signifié que nous sommes restés à la marina dans l’attente et le suivi des travaux, sans pouvoir aller visiter Dubrovnik avec nos amis ! Nous en gardons un petit goût amer, mais comptons bien nous rattraper à notre second passage à la marina, le 8 août… Heureusement, cette marina est dans un site exceptionnel, au fond de la vallée envahie par la mer, à l’embouchure d’une rivière, sous des sommets, qui nous ont donné l’impression d’être dans une vallée des Hautes-Alpes ; nous étions entourés de montagnes, avec différents étages de végétation, avec des villages et des églises sur tous les promontoires, et une mer bien cachée au milieu de tout cela signalée juste par les mâts des bateaux…
De plus, le site de la marina est sur une ancienne demeure de notables de Dubrovnik qui construisaient sur la côte des petits palais. Les jardins sont agrémentés de canaux et de bassins, d’anciennes pergolas dans les jardins aux bosquets à la française ; un mini-golf, des jeux pour enfants, et une piscine devant le restaurant, un petit supermarché bien achalandé, tout cela dans ce décor assez remarquable ont rendu ces 3 jours en marina très confortables.
Nous avons mis aussi à profit cette immobilisation forcée à la marina pour changer les boutons de commande des moteurs d’enrouleurs, arrivés dans les bagages de Marie-Bé, l’épouse de notre ami Yann. (En effet ceux trouvés à Castellamare di Stabia n’étaient pas à la bonne taille…).
Nota : les filets d’espadon séchés, ont fait le bonheur des deux équipages pendant les traversées, marinés dans de l’huile d’olive…
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