Le temps d'un carénage, fin février - mi mars

Le temps d'un carénage, fin février - mi mars

Posté par : Joseph
30 Avril 2014 à 23h
Dernière mise à jour 07 Décembre 2014 à 22h
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Trois semaines, trois longues semaines à la marina de point à pitre, qui ne devaient durer que 5 jours, le temps d'un simple carénage: sortir le bateau de l'eau, un coup de karcher et deux couches d'anti-fooling. Mais je devrais le savoir depuis le temps que rien n'est jamais simple avec un bateau. Déjà le hasard du calendrier a voulu que je prévois mon arrêt au stand au moment de carnaval. Pour le parisien que je suis le carnaval ne signifie guère plus qu'une soirée costumée. Mais en Guadeloupe c'est une autre histoire. Toute l'île s'arrête pour vivre pendant trois jours aux rythmes du carnaval, à tel point que ce sont carrément des jours fériés. Alors il a bien fallu que je m'arme de patience pour attendre mes papiers d'assurance, sésame indispensable pour poser le bateau à terre. J'avais en effet décidé de me passer d'assurance mais là je n'ai pas eu le choix et avec mon pavillon américain cela n'a pas été simple. J'ai du faire contre mauvaise fortune bon cœur et j'ai tenté de profiter de cet arrêt forcé pour voir certaines festivités et découvrir au delà des grilles de la marina à quoi ressemble un guadeloupéen de plus près. Certes Pointe-à-Pitre ne possède pas de charme particulier et rien n'engage à la visiter. Mais voilà deux semaines que je me cantonnais au bateau et je n'avais toujours pas pris la peine de parcourir les deux kilomètres qui me séparaient du centre-ville. Pour Mardi Gras je me suis dit que ce serait vraiment dommage de ne pas avoir vu un défilé du carnaval en Guadeloupe. Muni de ma carte de l'office du tourisme je franchissais les grilles de la marina et m'engouffrais dans les faubourgs de point-a-pitre ou plutôt les bas-fonds devrais-je dire. Après avoir laissé le campus universitaire sur ma gauche la route commença à se faufiler au milieu des cases délabrées éclairées ici et là par un lampadaire oublié de la DDE. Pressées les unes contre les autres on se dit que ces cases pourraient même avoir leur charme si leurs petits auvent en bois et leurs toits de tôle était un peu mieux entretenus, peints de différentes couleurs. Mais ici les couleurs sont passées la tôle est rouillée et tout paraît de guingois. Le quartier semble désert, inhabité, n'étaient-ce les rayons de lumière filtrant au travers des volets. Ici et là une enseigne peu engageante propose des poulet grillés ou une coupe de cheveux... Gisela coiffure, poulet boucané. Les habitants sont claquemurés derrière leurs volets et lorsqu'une voiture ne trouble pas cette triste quiétude on entend les bruits de la forêt tropicale, touche de poésie décalée dans ce délabrement urbain. J'avançais bêtement d'un pas rapide pour échapper aux délires sécuritaires de mon imagination et je commençais à entendre au loin un début d'agitation, à apercevoir le trafic qui se densifie signe que j'approche de la ville et que je quitte un quartier non pas dangereux finalement mais assurément pauvre. Je m'attendez donc à arriver à la lisière du carnaval, je guettais le son des percussions le passage d'un char surmonté de danseuses brésiliennes coiffées de grandes plumes d'autruche... En fait mon exploration des faubourgs de Point-à-Pitre n'était pas terminée. La musique ne venait pas d'un char brésilien mais d'un rade lugubre baigné de la lueur verte d'un néon "Heineken" et dont les enceintes hurlaient une bachata presque entraînante. Au coin des rues des grappes de femmes attendaient les voitures, habillées de débardeurs trop petits aux couleurs criardes. Serrées dans leur jupe trop courte elles parlaient espagnol. En face des hommes surveillaient tout ce petit monde. De toute évidence ce n'était pas le carnaval mais le quartier des filles qui réconfortent les marins désoeuvrés de la darse de Pointe-à-Pitre. Ma promenade venait de me faire découvrir un autre visage de la Guadeloupe, loin des yachts et des pontons sécurisés et j'étais tout à mes pensées d'un monde cloisonné quand je m'engageais sur la place des victoires. La place plongée dans l'attente du défilé avait des airs de 14 juillet. Des familles, des enfants qui couraient partout, une immense scène de concert attendait au milieu, silencieusement, et tout autour des vendeurs de bokits proposaient leur sandwich que je m'empressais d'essayer. Décidé à voir ce défilé qui se faisait désirer je poussais ma marche jusqu'au point de départ. Traversant le centre-ville lui aussi désert je remontais l'avenue Frébault et ses bâtiments de béton sans charme pour enfin trouver une ambiance de carnaval au pied des cités de Pointe-à-Pitre. Massée le long de l'avenue une foule hétéroclite attendait. On avait sorti les chaises pliantes les chaises de salon, les tabourets et tout ce qui pouvait ressembler de près ou de loin à une quelconque assise. Les doudous étaient là surveillant les plus jeunes ou vendant des sorbets coco sous des parasols inutiles à cette heure de la nuit. Dégustant ma glace préférée j'attendais donc l'arrivée du premier cortège. Finalement avec 3:00 de retard (heureusement que j'étais arrivé avec 2:30 de retard... le retour à la vie professionnelle s'annonce compliqué) je vis s'agiter au loin un grand drapeau noyé dans une épaisse fumée et devant moi commençaient à défiler, drapés dans des toges blanches, des sortes de spectres. Leurs visages étaient maquillées à la manière de tête de mort et ils faisaient claquer sur le sol dans un bruit assourdissant une longue tresse, comme un fouet, truffée de pétards. Leurs gestes me fit penser au martyre des esclaves: ample ils lèvent le bras avant de faire volte-face violemment en abattant rageusement le bras vers le sol. L'effet est saisissant. Derrière arrivait le gros du cortège, compact, tous déguisés de pagnes, maquillés tous de la même couleur et coiffés de chapeaux artisanaux fait de cartons, de bouts de ficelles, et de feuilles de bananier. Ils avancaient en dansant et en chantant au rythme des percussions. L'air se mît alors à vibrer au rythme hypnotisant des grosses caisses et des maracas le tout baigné dans une odeur d'encens enivrante. Je ne sais si il y avait un thème à ce défilé mais cela m'a semblé très tribale, une passante m'apprit que chaque cortège représentait une ville de Guadeloupe. Un peu déçu il faut le dire de ne pas avoir vu de danseuses brésiliennes coiffées de plumes d'autruche je répartis à la marina en traversant en sens inverse les mêmes quartiers délabrés, mais je marchais cette fois plus lentement. Tant pis la prochaine fois j'irais à Rio.
Les festivités passées j'obtins enfin le sésame tant attendu et pu planifier la sortie de l'eau de cody. Il faut dire qu'il était temps les algues accrochées à sa coque mesuraient plus de deux mètres, c'est fou ce que la chaleur et l'humidité ont comme effet sur la vie!! Je vous épargnerais ensuite la semaine de ponçage, d'application d'enduit, de re ponçage, de ré application d'enduit, de peinture, primaire, puis anti fooling. Au bout d'une semaine Cody était prêt à retourner à l'eau et à naviguer. Il était temps, je devais me rendre fin mars en Martinique. Cette semaine m'a tout de même permis de rencontrer Charly et Damien avec qui je partageais un peu la galère d'un carénage. Damien jeune marin préparait son bateau pour la Polynésie et Charly marin novice rêvait de grands horizons sans trop savoir où les trouver. La voile tout particulièrement fait naitre les plus beaux rêve mais que la mer se charge bien vite de lessiver. Alors seulement ils deviennent beaux et grand.

Doucement le matin, pas trop vite l'après-midi. Les joies de l'administration antillaise .... :o)

Wahou ....il est parti en 4 exemplaires. Sorry !

Je reviens moi-même de 15 jours de Guadeloupe et j’ai lu ces derniers feuillets comme si j’y étais, forcément. « le retour à la vie professionnelle est compliqué » Jean-Claude.

Je devrais aller en Martinique pour apprendre le rythme du retraité. Surtout qu'en Espagnol, retraite se dit "jubilacion"!

Et bien tu as trouve des gens plus en retard que toi et une face moins carte postale de l'île. Etape de transition cette ville.

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