23°08.50 N , 64°35.72 W - Into nowhere
Vous pouvez chercher sur Google map, à cet endroit il n'y a ni calle Tanca, ni faubourgs de Point-à-Pitre et encore moins de chantier naval floridien. Et pas de petit bonhomme street view pour vous donner le nom du troquet du coin. D'ailleurs c'est bien simple ici tout est bleu, à droite c'est bleu, à gauche c'est bleu, devant c'est bleu, derrière c'est bleu, dessous même c'est bleu sur les 5000m de la plaine abyssale de Nares. Et au dessus c'est encore bleu. Toute vie y est presque invisible au bourgeois bohème ou alors il lui faudrait se faire pousser des branchies et des nageoires. Mais cela la science l'interdit. Au milieu de cette immensité bleue, à regarder de plus près, en zoomant à l'extrême, l'oeil aguerri de l'internaute pourrait voir une petite coque de noix vert foncée, surmontée de deux petits triangles blancs et poussant péniblement, inexorablement l'eau devant elle, creusant un mince sillage aussitôt balayé par la houle du large. A son bord Mélanie, Jean-Pierre et Joseph comptent les jours qui les séparent des Acores...
Extrait du journal de bord de Cody
Mardi 13 mai
Les préparatifs touchent à leur fin, derniers bricolages sur Jonhatan le régulateur, l'avitaillement est terminé, Cody est rempli de 250L d'eau, des produits frais pour une semaine, des conserves pour 2 semaines, des pâtes, du riz, sans oublier une bonne cargaison de fruits sec et de biscuits pour affronter les quarts de nuit. Normalement on ne devrait pas mourir de faim on a assez à manger pour trente jours de mer mais j'espère bien que nous parviendrons à rallier les Acores en 20-25 jours. Dernières formalités aussi avec l'immigration américaine, moment solennel un peu bizarre car dans les hangars des autorités portuaires de San Juan, mais enfin nous sommes en règles et nous pouvons à présent quitter le nouveau monde pour revenir vers la bonne vieille Europe. La météo annonce un vent soutenu, force 5 de secteur est nous partirons donc avec deux ris.
Mercredi 14 mai
Mon dieu quel départ, moi qui voulais partir en toute tranquillité c'est raté. L'enrouleur de la voile d'avant m'a encore posé problème tout cela parce que j'avais mal étarqué la drisse du foc. Enfin rien de grave mais cela a rendu le départ humide et un peu stressant, en plus dans une houle bien formée de 1 à 2m. Résultat Melanie a le mal de mer et après avoir bien nourri les poissons, a fini par s'endormir. Espérons que cela lui passe sinon ce sera compliqué. Une satisfaction tout de même, Jonhatan marche à merveille et cela rend la vie nettement plus confortable que lors de la premire traversée. J'ai toujours de l'eau dans les fonds mais je m'en accommoderais en écopant régulièrement.
Jeudi 15 mai
Le vent reste soutenu à 15 noeuds, de secteur est, sans doute mes derniers alizés, et nous avançons bien sur une route quasiment plein nord. La journée est belle et l'équipage commence à trouver ses marques. Mélanie s'est remise de son mal de mer et nous avons pu commencer à mettre en place la rotation des quarts. Chacun assure la veille pendant trois heures: surveillance des autres navires, des évolutions météo, et vérification du cap du bateau. Cela nous fait des périodes de repos de 6h, cela me paraît un bon rythme.
Vendredi 16 mai
Le temps s'est un peu couvert, nous avons dû essuyer deux grains nous obligeant à prendre deux ris dans la grand voile. Mais nous continuons a bien avancer plein nord maintenant, bien que nous fassions une route à 15°. Je pense que nous devons subir les effets d'une branche du courant du gulf stream qui porte au NW dans la zone où nous sommes.
Samedi 17 mai
Quel plaisir la fin de nuit. Je ne m'en lasse pas. J'étais de quart de 2h à 5h du matin, mon préféré je pense, lorsque tout le monde dort, que le bateau taille sa route dans l'obscurité et le silence du clapot des vagues. Toujours la même joie béate de voir à l'est grandir insensiblement, lentement cette lueur blafarde d'abord qui se transforme ensuite en un rayonnement puissant, pénétrant les os et l'âme pour réchauffer le marin endormi encore drapé dans l'air frais de la nuit...
... Très belle journée mais sans beaucoup de vent, nous avons donc pu en profiter pour faire un peu de ménage, se laver un peu et se faire un bon repas. L'ambiance est au beau fixe pour le moment, j'espère que cela va durer. Nous avons changé la voile d'avant. Puisque la météo semble confirmer la baisse du vent, autant remettre le génois, au moins pourrons nous capter le maximum de vent et tenter de garder l'objectif des 100 milles par 24h.
Dimanche 18 mai
Je les craignais un peu mais les voilà, les zones de calmes plat. Elles mettent ma patience à rude épreuve. On peut même dire qu'aujourd'hui je n'ai eu aucune patience, j'ai allumé le moteur immédiatement. Ce n'est pas seulement le claquement des voiles dans la mature ou le roulis erratique du bateau ô combien énervant, mais nous avons 2300 milles à parcourir alors je préfère essayer d'avancer un peu même si c'est au moteur. D'ailleurs au final on ne s'en tire pas trop mal puisque nous avons retouché du vent après 6h de moteur et nous avons réussi à parcourir 70 milles malgré tout.
Lundi 19 mai
Le vent reste faible mais nous parvenons à avancer honorablement à la vitesse de 5 noeuds. Le génois aide vraiment c'est incroyable. Par contre il me faudra l'affaler dès que nous reviendrons dans des zones de vent plus soutenu. Le foc apporte nettement plus de flexibilité lorsque le vent fraîchit. Nous avons commencé à faire route vers l'est un peu plus. Je viens de réaliser que nous avions une douzaine de degrés à gagner en latitude vers le nord mais une bonne trentaine vers l'est en longitude. Alors le mot d'ordre c'est cap à l'est !!
... Début de nuit magique, dans la vague d'étrave de Cody une multitude d'étoiles vertes phosphorescentes répondent à la beauté de la voûte céleste. C'est du plancton bioluminescent, c'est complètement hypnotique.
Mardi 20 mai
Ca y est, une semaine pleine que nous sommes partis, et le contrat est rempli, le loch affiche fièrement 3106 milles soit 731 milles parcouru en sept jours. Il est encore trop tôt pour calculer une date d'arrivée mais il reste grosso modo 1600 milles à parcourir soit 16 jours et donc une arrivée possible au 5 juin. Pour mon anniversaire, ça me plairait assez, je dois l'avouer.
Mercredi 21 mai
Quelle nuit, la plus compliquée depuis le départ. Le vent est passé de l'est au sud dans la journée d'hier puis du sud au nord ouest dans la nuit en mollissant complètement. Le ciel était couvert de nuages zébrés de ci de là par des éclairs silencieux. La nature offre parfois des spectacles d'une grandeur, d'une étrangeté un peu angoissante. Mais nous n'avons eu aucun orage et les éclairs se sont contenté d'illuminer notre nuit comme les stroboscopes d'une boîte de nuit, sauf qu'il manquait la boule à facette. Au milieu de tout ça le vent s'est mis à faire n'importe quoi entre minuit et deux heures du matin le temps de faire sa bascule j'ai cru devenir fou à essayer de régler les voiles en vain. J'aurais mieux fait de tout affaler et d'aller me coucher, maintenant je suis épuisé. Mais bon le vent a fini par s'établir nord ouest et nous sommes répartis à une vitesse respectable. Nous ne sommes pas encore aux Acores mais on s'en approche, petit à petit, un mille après l'autre... Comme cette lenteur a du bon. Comme c'est agréable de vivre au rythme du soleil, de la météo...
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Anonyme (non vérifié)
22 Mai 2014 - 12:00am
Ce que tu vis me donne des
Anonyme (non vérifié)
22 Mai 2014 - 12:00am
Comme c'est bon de te lire!!!
Anonyme (non vérifié)
22 Mai 2014 - 12:00am
Que c'est bon de te lire, de
Anonyme (non vérifié)
22 Mai 2014 - 12:00am
Quand je vois ton parcours
Anonyme (non vérifié)
23 Mai 2014 - 12:00am
Bon courage Jo!! Nous pensons
Anonyme (non vérifié)
27 Mai 2014 - 12:00am
Salut Jo et ses compagnons d