Des fleurs, un graffiti, du vin et du fromage
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Vingt deux jour de mer, c'est finalement le temps qu'il nous aura fallu pour franchir les 2300 milles d'océan atlantique qui nous séparaient du début de la plaque eurasienne. Cette fois ci pas de musique de Vangelis dans la tête, pas de découverte du nouveau monde, juste le calme de la nuit. Et une joie secrète de voir dans cette obscurité devenue familière une lueur incongrue, presque irréelle. Notre continuum s'est alors brisé sur un simple rayon de lumière, les phares de Flores sur l'horizon projetaient leur pinceau lumineux sur l'océan, cet univers de roulis, de vagues qui claquent contre la coque , de vent dans les haubans. Sentiment étrange de voir la fin d'un voyage, d'un rythme auquel on s'était habitué. Les Açores nous accueillaient sous un vent frais, une île noyée dans son nuage et une baleine qui faisait des bonds verticaux incroyables. Mais Cody s'approchait de l'entrée du port plus vite que nous l'aurions voulu et demandait déjà notre attention pour la préparation des manœuvres d'amarrage.
A l'abri contre les falaises peuplées de puffins nous avons redécouvert des joies toute terrestres, une douche froide pour commencer, des formalités douanières ensuite et enfin une première nuit de repos au calme, excepté le cri des puffins. Moi qui pensait passer en douceur des chaleurs tropicales à l'été européen, j'ai vécu une petite désillusion. Les Açores sont bel et bien dans le système dépressionnaire de l'Atlantique nord et ils le font savoir: du vent, des nuages, de la pluie... Bye bye les tropiques bienvenue au bercail... Mais il faut être honnête tout cela est largement compensé par la beauté de ces îles. Alors que nous partions en quête d'un véhicule motorisé pour découvrir les beautés cachées de Flores, nous avons fait la rencontre d'un équipage suisse qui venait lui aussi de terminer sa transate. Gaëlle, Claude et Fred décidèrent de se joindre à nous et malgré les risques diplomatiques inhérents à la coupe du monde nous avons opté pour une cogestion d'un break Dacia. Non décidément la plaque américaine et ses Dodges semblent bien loin... Est-ce due à leur indéfectible neutralité mais nos amis suisses se sont avérés être d'une compagnie joyeuse et très agréable. C'est d'ailleurs par leur entremise que nous rencontrerons à Horta toute une communauté de bateaux qui avaient également achevé la traversée. Une fois conclu devant un loueur agréé le pacte de non agression franco suisse nous prenions la route à travers une lande toute écossaise et des villages pittoresques. La je ne peux résister à l'envie de jouer les guides du routard et vous décrire ces chutes d'eau féeriques découvertes au détour d'un vieux moulin. Au bout d'un chemin pavé qui doit remonter aux premiers açoréens, il y a une clairière avec six ou sept chutes d'eau qui surplombent un lac lisse comme un miroir au pied d'une falaise de roche noire couverte de mousses étalant toutes les teintes de vert, le tout balayé par une brume mystique. Je me suis cru dans la forêt de Lórien et je pensais voir sortir Cate Blanchett de derrière un arbre mais non, seul un oiseau virevoltant à la surface du lac venait troubler la quiétude de cet endroit enchanté.
D'ailleurs il n'y a pas que les clairières qui sont magiques sur Flores, poussant notre expédition jusqu'à l'extrémité occidentale du territoire européen nous arrivions sur la plage de Faja Grande et trouvions sans doute le restaurant le plus occidental d'Europe et peut être le plus atypique. Face à l'océan, une petite maisonnette, avec une pièce qui ressemble à un salon-salle à manger-cuisine tout à fois. Le propriétaire des lieux, un photographe de Lisbonne, a planté dans son salon: une cuisinière, une table en Formica en guise de plan de travail, deux tables rondes avec une nappe et il en a fait un restaurant haut de gamme. Il vous cuisine une baccalhau divine sous vos yeux ébahis tandis que vous dégustez un bon petit vin blanc de Pico: le Frei Gigante. La musique passe du paisible morceau de jazz à la techno la plus déchaînée, digne évidemment d'une gay pride débridée. Le propriétaire est forcément un hôte charmant qui nous livre les secrets de ses recettes de morues: la grâce divine... Ça ne s'invente pas. En partant il nous confesse que pour des français on est sympa au contraire de ceux qu'il a l'habitude de voir: des parisiens désagréables. Je n'ai pas osé lui dire que j'étais parisien jusqu'au bout des ongles (ou peut être pas assez) et que sa morue ne vaudrait jamais un bon jambon beurre (on va quand même pas se laisser emmerder par un peqno perdu au milieu de l'océan)!! Dommage ça avait été presque parfait ;).
Mais les açoréens nous réservaient encore des surprises. Ainsi à quelques kilomètres de notre port d'attache Lajes, le hasard d'un obscur festival inter îles nous a amené au village de Faizenda pour écouter un concert de musique tribale/locale. Dans une maison rénovée façon new age, Nina œuvrait au chant et à la guitare accompagnée d'une espèce de harpe, d'une espèce de soucoupe volante faisant office de tambour et d'un autre guitariste. Tout ça vous avait de gentils airs de beatnik à la mode açoréenne ce qui nous fut confirmé après le concert en discutant avec les habitants dont quelques français (dont la fameuse Nina visiblement portée au rang d'égérie locale) qui nous apprirent que le lieu était un projet communautaire ou chacun apportait son talent à l'édifice. Un kibboutz perdu au milieu de nul part! Le fait est que, revenu le lendemain pour la soupe de l'esprit saint (espiritu santu grosse fêtes açoréenne que l'on doit à la reine isabelle), nous avons pu apprécié la beauté du lieu, des sculptures à la Gaudi dans le jardin, un potager, une piscine même. Ça m'a presque donné envie de me laisser pousser des rasta et d'adopter un chien errant. Mais ma calvitie me l'interdit. Aller je vous donne même leur site internet: https://www.facebook/ovalzinho . Ils ont même fait l'objet d un blog sur libe: http://geographiesenmouvement.blogs.liberation.fr/
Nous serions bien restés plus longtemps sur l'île aux fleurs tant le calme et la paix qui y règnent incitent à la sédentarisation, mais une fenêtre météo et l'envie de découvrir le reste de l'archipel nous firent reprendre la mer en direction de Faial et la mythique Horta. Mythique parce qu'Horta est d'abord le port officiel d'entrée dans l'union européenne donc une escale quasi obligatoire pour les transatiers. Et pour l'ambiance qui y règne. Mélange de bateaux venus des quatre coins du globe, de marins ayant traversés un océan, on se sent appartenir à une sorte de communauté. Alors que je n'avais que peu tisser de liens avec d'autres marins au cours de mon périple antillais j'ai fait à Horta, grâce à nos amis suisses, de très belles rencontres. Que ce soit Mathieu et Sev sur leur petit prototype de 9m ou Thomas et Delphine, parisiens en reconversion, tous partagent un regard ouvert sur les autres, tolérant, curieux. Ces rencontres ont donnée une dimension sociale presque mondaine à notre escale et elles furent une réelle joie. On a partagé des apéros sur les bateaux des uns et des autres, entassés à couple le long du quai.
Il y a d'ailleurs tellement de bateaux que de loin le port ressemble à une forêt de haubans où flottent les pavillons de tous les pays. Mais la tradition la plus sympa d'Horta reste le graphiti. C'est une règle, tout marin qui arrive à Horta se doit de laisser son empreinte quelque part sur le béton du port. L'équipage de Cody ne s'est pas soustrait à la règle et je vous livre donc en avant première mondiale, avant facebook, Twitter, et CNN l'empreinte de Cody dans le Horta hall of fame:
Face à Horta il y a Pico qui, lorsque les nuages veulent bien s'écarter un peu laisse dévoiler son pico alto. 2351m d'altitude, le sommet du Portugal, rien que ça s'il vous plait. Le spectacle vu d'Horta est impressionnant c'est un cône parfait, juste coiffé parfois d'un, voir deux nuages lenticulaires, phénomène que je n'avais jamais observé jusqu'alors. Et Pico à un charme bien à elle, avec ses roches basaltiques d'un noir d'ébène qui contrastent avec le vert de la végétation de ses coteaux. En bord de mer, sur cette terre noire, dans un quadrillage de petit mur de pierre poussent des vignes autour de petits villages austères et qui donne un vin assez réputé semble-t-il.
Mais après deux visites sur Pico et un apéro d'adieu pour Melanie qui partait retrouver son Gers natal, nous avons commencé à trouver le temps long sur Faial et n'eut été mes problème de TVA pour le bateau, le nouvel équipage de Cody, composé de mon père et de mon petit frère, serait parti un peu plus tôt vers Sao Jorge et Terceira, les deux autres îles du groupe central. Car la découverte de Sao Jorge fut un vrai coup de cœur. Cette île a tout pour elle, déjà pour les voiliers, une marina mignonne, super propre avec un accueil hors pair. Et ensuite des paysages magnifiques. Et pour finir ce qui ne gâche rien pour tout français qui se respecte, sa spécialité est le fromage. Le point d'orgue de notre visite aura été une ballade à Fajã da Caldeira do Santo Cristo. C'est un bled perdu au bout d'un chemin de terre ou l'on accède seulement par la mer ou à pied. Face à l'océan les gens semblent vivre ici dans une bulle, au pied des falaises impressionnantes de l'île, sur une petite langue de terre verte quelques maisons, une église et le temps qui passe, simplement au rythme de la marée, des saisons sans doute. Un havre de paix comme il en existe beaucoup mais qui rappelle à chaque fois que le bonheur est une chose simple. C'est toujours bon à garder en mémoire avant le retour à la vie suractive. Après un dernier apéro avec la bande des amis d'Horta et une soirée mémorable au pub de la ville nous sommes répartis pour Terceira. Car le 23 juin approchait. Et le 23 juin c'est la saint jean. Ok super vous allez me dire et alors? Bon et bien les fêtes de la saint jean c'est le moment ou on fête l'été un peu les récoltes et tout ça. C'est là aussi où on saute par dessus les feux. Alors tout ce folklore n'est plus vraiment pratiqué à Paris mais à Terceira ils appellent ça les joaninas et ça dure une semaine, avec lâché de taureaux, danses traditionnelles, et le 23 ça dure toute la nuit jusqu'au petit matin. Je dois être honnête à ce stade de mon récit et dire clairement que si mon père n'avait pas poussé pour voir ces fêtes je les aurais peut être pas vus. Mais voilà papa aime le folklore et parfois le folklore le lui rend bien mais pas toujours... Donc voilà on a vu les fêtes de la saint jean à Angra do Heroismo capitale historique des Açores qui s'est avéré être une très jolie ville. Nous avons même poussé le risque jusqu'à participer à une torrada, mais de loin derrière les barrières quand même. Et il faut bien avouer qu'un taureau en liberté dans la rue cela a un côté impressionnant, il est gros le bestiau quand même. L'heure du départ approchait mais celui du vrai départ pour mon père et mon frère qui devaient reprendre leur avion le surlendemain de Sao Miguel. Nous sommes donc repartis pour une dernière navigation de nuit qui devait réserver son lot de dernière petite surprise. Après la rencontre du rorqual sous spi nous avons eu droit à la rencontre d'un rorqual de nuit. Je peux vous dire que c'est pas moins impressionnant. Parce que vous avez beau connaître le bruit de son souffle, dans le noir cela fait quelque chose. Et lorsqu'ensuite le plancton vous laisse deviner sa forme et sa position et que vous le voyez plonger sous votre coque vous vous dites: pourvu qu'il n'ai pas une démangeaison dans la queue.... Je vous laisse épiloguer ;). Au petit matin nous arrivions à Punta Delgada, capitale de la région autonome des Açores, avant dernière escale avant de toucher le continent européen.
Les photos sont disponibles: ici
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Anonyme (non vérifié)
4 Juillet 2014 - 12:00am
la classe Jo, comme toujours.
Anonyme (non vérifié)
5 Juillet 2014 - 12:00am
Ca donne envie de retourner à
Anonyme (non vérifié)
5 Juillet 2014 - 12:00am
Je reviens d'un voyage qui m
Anonyme (non vérifié)
10 Juillet 2014 - 12:00am
arg! Jo, ta localisation
Anonyme (non vérifié)
10 Juillet 2014 - 12:00am
Toujours aux Acores cousin! T
Anonyme (non vérifié)
14 Juillet 2014 - 12:00am
ah, merci Jo, ca va te faire