27 mars - 22 avril 2021 Guadeloupe - Saint Martin

27 mars - 22 avril 2021 Guadeloupe - Saint Martin

Posté par : Dominique
01 Octobre 2021 à 15h
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Après une semaine d’escale technique intensive à Pointe à Pitre, avoir fêté l’arrivée de Pierrick en solitaire depuis Grenade, rejoint ensuite par son épouse qui arrive de la métropole, nous sommes heureux de reprendre la mer le samedi 27 mars 2021, avec pour objectif de rallier Saint Martin afin de saluer nos amis de « VoileOvent » avant leur départ pour le Guatemala. Au matin, nous quittons donc la Marina Bas-du-Fort ; « Eloyse » appareille peu après nous. Le vent d’est-sud-est forcit dans le Petit-Cul-de-Sac du Marin, et nous commençons à filer, travers au vent, vers Les Saintes, après avoir arisé. Nous suivons également du regard les évolutions d’ « Eloyse », le voyons prendre un ris dans sa grand-voile, ce qui est conforme aux conditions qui se durcissent un peu… Cette manœuvre a l’air de durer, plus que d’habitude, puis le génois d’« Eloyse » est roulé, une partie de la grand-voile continue de battre. Nous réalisons à ce moment-là qu’ «Eloyse» semble à l’arrêt et prend de la gîte. Un bref échange VHF nous fait comprendre que déportée par la houle qui grossit de minute en minute « Eloyse » s’est échouée sur une caye. Nous faisons demi-tour pendant que Pierrick lance un « MayDay », aussitôt relayé par le CROSS Antilles Guyane. L’hélicoptère de la Protection Civile est immédiatement sur les lieux, ainsi que la vedette de la SNSM de Pointe-à-Pitre ; ils étaient en préparation d’exercice dans les parages. Des plongeurs sont hélitreuillés sur « Eloyse », jaugent la situation avec les vagues qui poussent le bateau de plus en plus sur le récif et prennent en charge Cathy et Pierrick dans l’hélicoptère. Sonnés, et redoublant d’attention à ce que nous faisons, nous nous hâtons de regagner la Marina pour les accueillir lorsque la vedette viendra les déposer à terre.

A la marina, nous découvrons une équipe de la SNSM d’un très grand professionnalisme, d’une gentillesse et d’une humanité exceptionnelles : un grand élan de solidarité se déploie pour leur apporter réconfort : proposition de location d’une voiture, adresses pour trouver un logement, mise en relation avec le directeur du port commerce pour la gestion de l’épave qui est près du chenal d’accès… et nous partagerons de vrais moments d’amitié et de convivialité avec eux.

Nous restons quinze jours sur place, essayant de notre mieux d’accompagner Pierrick et Cathy dans ces circonstances éprouvantes, et parer au plus pressé en matière de démarches administratives : rédaction du rapport de mer, déplacements avec l’expert d’assurance sur site…

Rapidement, Pierrick et Cathy trouvent un studio à louer, dans une résidence au-dessus de la Marina ; cela leur permet de se retrouver entre eux, et en même temps, nous restons proches.

Pour notre part, nous aurons ainsi appris que trois autres amis de voyage ont perdu leur bateau dans les douze mois écoulés… à chaque fois, à la suite d’un enchaînement d’évènements qui pris l’un après l’autre sont notre quotidien et qui ne posent aucun problème, mais leur simultanéité rend la situation périlleuse et parfois dramatique… Heureusement, pour chacune de ces « fortunes de mer » (expression consacrée, bien mal à propos !), il n’y a eu aucun blessé. Malgré tout, toutes ces mésaventures qui n’épargnent pas des skippers expérimentés, ayant derrière eux plusieurs traversées océaniques, nous rappellent à la modestie…

Claudie et Hervé, rentrés de leur séjour en Métropole partagent avec nous ces moments difficiles. Nous nous offrons quelques moments de détente tous ensemble, à la plage, à la piscine de la résidence, ou en faisant un peu de tourisme. Nous sillonnons les routes des Grands-Fonds, rejoignons Petit-Canal, dans l’espoir de visiter un jardin botanique, malheureusement fermé ; nous parcourons alors le sentier Poyen qui nous permet de déambuler autour des ruines, envahies par la végétation, d’un moulin à cannes et de sa sucrerie, sur une butte, arborée, avec des mares, et tout autour des champs de canne à sucre.

   

A l’Anse du Souffleur, un bain dans les rouleaux sera revigorant.

Le 11 avril, le cœur gros, nous décidons de repartir naviguer avec « Happy » ; nous sommes néanmoins soulagés de savoir Cathy et Pierrick toujours très entourés par des membres de la SNSM, pour la suite des démarches liées au renflouement du navire, comme pour d’autres moments amicaux : balades pour Cathy, Gigi et Caroline, ou sortie en bateau à moteur sur la Rivière Salée, et dans le Grand Cul-de-Sac du Marin, par exemple.

Avec une certaine appréhension qu’il nous faut surmonter, nous appareillons à destination de Deshaies. Un vent d’est léger nous pousse le long des côtes de la Basse-Terre ; puis la remontée, vers le nord de la Guadeloupe se fera davantage au moteur qu’à la voile, de manière à ne pas arriver trop tard à Deshaies.

Là, nous sommes récompensés par la présence de deux dauphins qui jouent entre les bateaux au mouillage, à déjouer la curiosité des plongeurs. Et le lendemain, lors de notre appareillage, ils sont beaucoup plus nombreux et nous souhaitent une bonne traversée en effectuant de multiples sauts à plusieurs, et en nous accompagnant jusqu’à la sortie de l’Anse !

Nous mettons le cap au Nord-Nord-Ouest pour vingt-trois heures de navigation jusqu’à Saint Martin. Jusqu’au milieu de la nuit, le vent d’est-sud-est nous pousse bien et les milles nautiques passent vite.

 

Puis cette bouffée d’air s’estompe et nous terminons le parcours au moteur. Le lever du jour reste toujours un moment d’émerveillement, après l’émotion du crépuscule ; les silhouettes massives des îles se colorent, révélant le sable clair des plages baignées par une eau turquoise, tandis que promontoires et caps apportent leurs nuances d’ocre et de vert.

A peine avons-nous jeté l’ancre dans la Baie de Marigot, qu’Hervé met à l’eau son annexe pour que nous allions à l’« Ile Marine » effectuer les formalités d’entrée, avant d’aller jusqu’à Marigot pour louer une voiture. En effet, lors de notre séjour en Guadeloupe, Hervé a eu l’opportunité de changer de moteur hors-bord ; nous lui avons acheté son 6cv ; nous avons alors vendu notre 2,5cv que nous avions jusqu’à présent, ainsi que notre annexe. Nous devons donc rapidement racheter une annexe, pas trop lourde, rigide, adaptée à ce moteur, pour ne pas être tributaires des uns et des autres pour nos trajets à terre.

Après une après-midi de vaines prospections chez les gros shipchandlers côté hollandais, nous finissons par trouver ce qu’il nous faut, non loin de Marigot. Sur Sandy Ground, entre deux maisons, part un chemin de terre jusqu’à un terrain vague, au bord du lagon, sur lequel, deux ou trois containers sont le dépôt et les bureaux du revendeur de la marque 3DTender. Il a bien le modèle que nous cherchons : une annexe, pas trop grande, (2,50m), ultra légère (24 kg), coque alu, boudins en Hypalon (ce matériau est réputé mieux résister aux rayons du soleil sous les Tropiques). L’affaire est rapidement conclue. Dominique et Hervé partent en annexe récupérer notre nouveau dinghy, tandis que Claudie et Clotilde déambulent dans Marigot.

Hervé et Claudie ont déjà eu l’occasion de séjourner à Saint Martin, avant 2017,  (année du cyclone Irma), puis en 2019. Claudie souhaite voir ce que devient la Marina Royale, qui est la marina de Marigot, à l’intérieur du lagon. Les infrastructures des abords, anciens restaurants, bar, boites de nuit sont toujours sans toits, ou éventrés, les pontons ne sont pas restaurés, et sur les rives est de la marina, des épaves restent échouées, au milieu des roches et des décombres.

 

Quelques magasins de vêtements attendent les clients. Les rues de Marigot, à l’arrière de la Marina, sont plus animées et font un peu oublier ce spectacle désolant. Plus tard, durant notre séjour, nous reviendrons déjeuner au « Sous-Marin » ; ce restaurant-snack est installé dans les bâtiments qui longent la Marina, côté rue, et à l’angle d’un passage vers la plan d’eau. Dans ce passage se trouvaient des boites de nuit ou des boutiques, restés en l’état après le passage du cyclone ; les armatures en fer, les toits sont brinquebalants, les fils électriques pendent un peu partout, les sanitaires n’ont plus d’eau, les herbes folles s’installent petit à petit entre les dalles ou le long des quais. Les propriétaires, Paula et Jean-Baptiste, sont les rares à avoir repris leur activité, dans ce secteur, le midi seulement, puisque rien n’a été restauré et que l’électricité fait toujours défaut dans le passage ; libre de toute activité, il leur offre une belle terrasse au courant-d’air et à l’ombre. Les plats-type proposés sont très bons et les parts généreuses. Nous y retournerons régulièrement appréciant le lieu, la gentillesse et la simplicité des restaurateurs, et y retrouvant souvent les navigateurs solitaires qui y ont leur « cantine ».

Du 13 au 19 avril, durant ces quelques jours à Marigot, nous nous occuperons plutôt de la mise en service de l’annexe ;

installation d’un mâtereau avec un feu, branché sur le moteur, mise en place d’une patte d’oie pour pouvoir hisser l’annexe sur le bord du bateau, marquage de son nom (sur l’Hypalon ce n’est pas simple), achat du matériel pour un moteur deux temps… De fréquents trajets vers les grandes surfaces, côté hollandais, nous permettront de parfaire les approvisionnements nautiques, et de remplir la cambuse.

Claudie et Hervé tenaient à acheter un drone ; nous les accompagnons à Philipsburg pour prospecter en vue de l’achat, puis pour acheter après d’âpres négociations. La ville reste toujours endormie, les paquebots à l’arrêt le long des quais ; cela permet de déambuler dans les rues sans trop avoir à s’inquiéter de la circulation, et d’avoir le nez en l’air pour découvrir des particularités : façades peintes, petites cases entre les immeubles, cloches sur un bâtiment administratif, vieille voiture dans « Old Street ».

     

Ces jours nous ont permis de faire de nouvelles rencontres amicales : Pascaline et Alain, sur leur Bavaria « Euréka », étaient des amis d’Hervé et Claudie, et ont rencontré Joëlle et Philippe lorsqu’ils étaient en chantier. Eux quatre nous ont accueillis à notre arrivée et nous avons partagé une très bonne soirée, malgré la fatigue de la traversée, ensemble, dans un des nombreux restaurants animés qui bordent la plage de la Baie Orientale. Tous les huit, nous découvrirons la vie festive hollandaise, au cours d’une « Beach Party », un dimanche après-midi. Sur une terrasse en bois, au-dessus de la plage de sable fin, tables et bancs sont installés avec un accès à la mer. Un DJ a installé ses platines sur l’un des côtés et bien que nous soyons à l’opposé, nous ressentons les vibrations des basses, et avons du mal à nous entendre… Le début d’après-midi est calme, les boissons circulent, certains descendent piquer une tête, avant de passer se doucher. Puis la soirée avançant, les plats commencent à circuler ; les anglo-saxons dînent tôt, en bon français, nous préférons dîner plus tard, mais à 19 heures, l’affluence est telle que circuler avec des assiettes à bout de bras au-dessus de la foule, devient un exercice périlleux pour les serveurs. Plus un espace de libre entre les tables et les bancs ; les habitués se retrouvent avec forces embrassades ; les tenues sont étudiées pour attirer les regards ; certaines sont des copies de leur star préférée, comme Lady Gaga, le champagne Ruinart coule à flots, ainsi que d’autres boissons plus « confidentielles » ; après s’être montrés quelques temps, en « dansant » sur place, au son des basses, des groupes repartent d’autres arrivent. Nous finissons par nous frayer un passage vers la sortie ; devant et dans les sanitaires, les trafics vont bon train ; on aperçoit deux à trois paires de jambes au bas des portes, les billets circulent d’une cabine à l’autre… Ici plus question de covid, de gestes barrière… et on ne parle pas de situation sanitaire inquiétante…

Cette expérience nous aura permis de toucher du doigt ce qui fait la réputation de la partie hollandaise de l’île. Pourtant, sur ces terrasses, où l’on cherche à être vu plus que tout, qui a pris le temps d’admirer les éclairages du coucher de soleil, comment peut-on sentir la quiétude de l’air ?

Joëlle et Philippe poursuivent leurs préparatifs pour partir vers le Guatemala, via la République Dominicaine, mais ont quelques jours devant eux. Nous décidons de passer ensemble quelques moments loin de Marigot. Une escale à Grand Case nous permet de connaître la vie sur ce mouillage : l’étang derrière la plage est dans une plaine où a été également aménagé l’aéroport de l’Espérance, qui accueille les liaisons inter-îles. Cette topographie crée un effet Venturi, un courant d’air permanent et il faut bien assurer le mouillage avec une bonne longueur de chaîne !

A terre, la soirée est conviviale, bar au bord de l’eau, restaurant ; nous passons une agréable soirée, où les bateaux amis nous rejoignent, repartent chacun avec ses obligations, mais avec de bons moments de partage. Le lendemain, nous nous promenons dans le village, quittant la rue principale du bord de mer ; nous passons par des rues où les habitants désœuvrés, nous regardent passer sans animosité, mais sans sympathie non plus. Une jeune fille d’une quinzaine d’année, pétard dans une main, bière dans l’autre, regard vide, marche de travers sur la route défoncée…

Pour trouver encore plus de calme, un passage par l’île Tintamarre s’imposait. Cet îlot au nord-est de Saint Martin, doit son nom à la teinte de la mer (en espagnol) qui devient turquoise dans les fonds de sable qui le bordent. Nous arrivons suffisamment tôt, en semaine, pour trouver des bouées de libres, dans la Baie Blanche. Nous sommes dans une réserve, et le mouillage déconseillé, en dehors du sable ; il est même demandé de ne pas haler les annexes sur la plage, mais de jeter un grappin à son abord, dans le sable.

Nous nous y retrouvons « VoileOvent », « Happy » et « Nissos ». Joëlle et Philippe habitués des lieux, nous emmènent à travers le bush derrière la plage, jusque vers les restes d’une habitation : coton et canne à sucre semblent avoir été les activités agricoles du lieu, qui paraît aujourd’hui bien aride. Des murets effondrés séparent des parcelles.

Un reste d’avion, au cockpit criblé de trous de balles apparaît sous les arbres : cet îlot plat, calcaire et corallien, a accueilli le premier aéroport de Saint Martin et Saint Barthélémy. Rémy de Haenen, qui fut maire de Saint Barthélémy de 1962 à 1977, était un passionné d’aviation et avait fait construire une piste d’aviation active de 1944 à 1952, avant que chacune des deux îles ne se dote de son propre aéroport. La piste a encore servi à la contrebande ce qui explique les débris d’avion que l’on retrouve ici ou là entre les cailloux.

Au-delà de ce bush, on entend la mer sur la côte au vent, derrière une sorte de digue naturelle de coraux : des débris marins, des gorgones sont déposés par les flots et pourraient faire l’objet de belles décorations, si ce n’est que la cueillette est interdite…

Entre les deux, une végétation rase, sans doute halophile, s’étale nuant le sol du vert au rouge.

Cette première balade sur l’île en appelle d’autres et nous espérons mettre à profit de prochains passages pour en explorer d’autres parties.

Sous l’eau, et près des caps au nord de la baie, quelques beaux poissons coralliens profitent des creux des rochers et des remous pour jouer dans l’eau ; dans l’anse, autour du bateau, raies, tortues se laissent admirer ; un ange caraïbe joue avec un poisson des sables, un petit requin (dormeur ?) est même venu prendre du repos à l’ombre de la coque et de la quille !

      

A l’arrière de la plage, on trouve des espaces prévus pour faire des barbecues, entre des pierres, avec des grilles pour poser les aliments à cuire. Nous nous y retrouvons pour le coucher du soleil, autour d’une grande table en bois, pour ce dernier moment convivial, où Hervé nous prépare, à son habitude, une bonne braise. Comme à chaque fois, ces soirées sont riches en échanges et permettent de faire le plein de bons souvenirs pour nos prochaines navigations…

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