Escale aux Suwarrow
Note : après quasiment 1 an en Polynésie Française, Frankiz a repris son tour du monde des belles escales. Voici que commence " la partie Rugby" pour la plus grande joie des petits-fils d'Alain le skipper!
Le Suwarrow fait parti des îles Cook, capitale Avatiu sur l'île de Rarotonga
distante de plus de 500 milles nautiques. L'état des îles Cook est composé de
nombreuses petites îles et d'atolls entre la Polynésie et les Samoa et Tonga.
Le 22 août, vers 12h00 nous apercevons quelques motus de l'atoll, mais voilà juste à ce
moment là, un super thon décide de mordre dans notre leurre, nous sommes à 12
milles de la passe de l'atoll. Vite fait sur le pont, vidé et nettoyé, ce thon est
mis dans le frigo, nous verrons bien à l'arrivée ce que nous en ferons.
14h30, nous nous présentons devant l'entrée de la passe, située entre le motu
Anchorage Island à tribord et le récif à bâbord, très peu de repères pour situer
le voilier sur le plan d'eau, donc je vais être obligé de faire confiance aux
cartes électroniques, Navionics et Ipad et de surveiller le sondeur. A l'entrée
de la passe, un fort bouillon et quelques vagues nous secouent un peu et plus
nous entrons dans la passe, plus la vitesse fond diminue, nous subissons un
courant entre 4 et 5 noeuds, parfois de travers si bien que Frankiz part très
vite dans un sens ou dans l'autre, en forçant un peu plus au moteur j'arrive à
le stabiliser et finalement nous entrons dans le lagon à petite vitesse et avec
toujours au moins plus de 7 mètres d'eau sous le bateau.
15h00, nous voilà dans la seule zone de mouillage autorisé, à l'ouest de
Anchorage Island. 8 voiliers sont au mouillage, pas facile de trouver une place
car c'est soit plus de 20 mètres de fond ou alors une petite zone avec 5
mètres. Enfin nous trouvons un mouillage pas trop mal, pas très loin de la
petite jetée par 5 mètres de fond, l'ancre est bien enfoncée dans le sable mais
tout autour il y a plein de "patates" de corail, pas le choix, c'est comme cela
partout. Ouffff, nous voilà arrivés, après presque 6 jours de navigation,
uniquement à la voile, 786 milles nautiques de parcourus, 100 de plus que la
route directe !
Mais voilà, pas de repos, je dis pas le temps de prendre une "bière" d'arrivée,
car les Rangers nous appellent sur la VHF pour nous demander si ils peuvent
venir réaliser les formalités à bord, "Hello sir, yes no problem, we wait you" je
leur réponds. 5 minutes après les voilà, 2 gardes en tenue noire "Ranger
Suwarrow", welcome on bord. Il fait chaud, nous sommes obligés d'installer le
taud de soleil sur le cockpit, car impossible de tenir sous ce soleil ardent, et à
l'intérieur, impossible non plus car pas eu le temps de réagir que le plus jeune
est déjà en train de pulvériser un produit désinfectant à bord, et sa pue
terriblement son produit ! Ah ! Tamar a la bonne idée de leur offrir "glass of
Water", mais vu leurs regards et leurs silences en dit long, elle insiste et la
réponse est "no". Les présentations se font, nous avons affaire à Harry et Pie,
père et fils, Rangers au Suwarrow, territoire des Îles Cook, réserve naturelle
et havre de paix pour requins, raies manta et pleins d'autres d'espèces ainsi
que pour certains oiseaux. Ils sont chargés de la surveillance de l'atoll entre
mai et novembre, de l'accueil des voiliers en tant que douaniers et
immigrations. Ce sont les seuls habitants autorisés sur l'atoll du Suwarrow, ils
restent ici 6 mois par an, ne reçoivent aucun approvisionnent et vivent sur les
réserves et leur pêche. Plus tard nous nous apercevrons qu'ils ne sont pas si
malheureux que cela, car les plaisanciers de passages leurs rendent beaucoup
de services. Allez, une bonne 1/2 heure de paperasses et tout est bon. En fin
presque, car voila Harry qui sort un carnet à souche et me regarde en
m'expliquant que le droit de passage au Suwarrow est de 50$ + 20$ pour ne
pas avoir envoyé un mail de préavis aux autorités de Cook Island.
Heureusement que j'avais été prévoyant en échangeant des francs Pacifique
contre des dollars à Bora Bora. Il fait chaud, je leur demande si ils aiment la
bière, d'un même élan ils me répondent avec un grand "yes" accompagné d'un
sourire et d'une question : Hinano beer, beer Polynésian ? Yes je leur réponds,
et "Oh yes we want" me précisent ils. Non mais, c'est quand même plus
rafraîchissant une bonne bière bien fraiche ! Bien sur avant de boire je
prononce "Manuia" qui veut dire Yec'hed mat pour les connaisseurs, ou à votre
santé en Tahitien, sur ce ils me répondent mauruuru (merci) et manuia.
Durant la dégustation de notre Hinano, Harry nous explique le fonctionnement
de la réserve, les balades autorisées uniquement sur Anchorage Island et tous
les interdits, comme nourrir les requins, déposer ses poubelles, ne rien jeter à
la mer et bien fermer notre boite noire des WC et qu'ils étaient à notre
disposition si besoin, qu'ils habitaient une maison sur le motu. Nous sommes
autorisés à pêcher aussi, tout comme le font les Rangers.
Sur les voiliers présents, nous en connaissons 3 dont nous avions fait
connaissance lors des escales Tikehau et Papeete, Luc un Français de
Grenoble, Alberto un Italien et un autre couple Italien avec leur fille de 3 ans.
Sitôt, un peu de rangement effectué dans Frankiz, demain il fera jour! Allez
oust une petite ballade sur le motu pour détendre nos jambes après avoir
jouer les Shadocks en gonflant l'annexe bien sur. A peine débarquée sur la
plage, nous rencontrons nos amis et plusieurs nouveaux. Tamar qui est
devenue un peu la cambusière du bord, s'empresse de demander si ils étaient
intéressés de partager notre thon avec nous, là pas de problème, la réponse
communautaire fut qu'il y avait un barbecue (bidon coupé en 2) et que de
toute façon le lunch et le diner se déroulaient toujours sur la plage en
communauté, chacun amenant un peu de tout, sauf de la viande puisque plus
personne n'en avait ! Donc ce soir riz cuit dans le barbecue et thon bien sur,
et voilà la 1ere "party" que voulait Tamar pour son arrivée ici !Faut dire
qu'elle la méritait grandement, entre Bora Bora et ici elle fut souvent à la
besogne, rallant même lorsque j'effectuais de nuit des manœuvres sans la
réveiller ! Ne vous inquiétez pas, un de ces jours je vous la présenterai en
photo lorsqu'elle sera décidée, car elle ne veut toujours pas être prise en
photo, enfin si mais m'interdit de les publier, patiente ………
Très surprenant ce motu et très bien entretenu par les Rangers, sur la plage il
y a des aires de jeux pour adultes et enfants aussi, des bancs et table pour
nos repas, ils n'ont pas oublié les hamacs, il y en a même un peu partout, et
je peux vous dire qu'ils sont très bien pour la sieste !
Ici au Suwarrow à vécu en ermite Tom Neale entre 1952 et 1977; Sa maison
construite de ses propres mains est encore en assez bon état et sert de
Bibliothèque d'échange pour les voiliers. Une statue lui est dédiée tout pres. Et
la seconde construction est la maison à étage des Rangers. Le motu est
recouvert d'une végétation très ardente et bien sur de nombreux cocotiers,
mais cela reste très propre, les Rangers doivent en prendre soins tout comme
la destruction totale des rats, je n'ai aperçu aucune noix de coco par terre
avec ces trous bien ronds signifiant la présence de rats dans les cocotiers,
comme on peut le voir partout en Polynésie Française.
J'oubliai, sur la plage la présence d'un ballon de rugby nous avertit que nous
entrons dans le domaine du ballon ovale et Pie le Rangers prends plaisir à
échanger des passes dès qu'il le peut avec les voileux.
Alors les "party" lunch et diner sur la plage sont très animés, beaucoup
d'enfants prennent plaisir à nous aider à préparer le feu, la coco râpée, la
cuisson des poissons, on voit ici ils sont heureux, tout comme nous qui
redevenons un peu enfant. Le barbecue sert aussi à la cuisson des pattes,
pizzas et riz, eh oui 3 voiliers Italiens imposent bien sur leur plats préférés
mais je vous assure ils sont super délicieux.
Mais voilà, si les 2 premiers jours d'escale ont été supers, le 3eme, le
mercredi un vent du sud de 30 nœuds en rafales avec des grains violents ont
soulevé une mer dans le lagon avec des creux dépassant parfois 1,50m, de
quoi me donner des sueurs froides quand je voyais le cul de Frankiz à peine 10
mètres du récif de la plage. Plusieurs voiliers ont chassé sur leur ancre et
beaucoup de mal pour retrouver une bonne place, Frankiz lui n'"a pas bronché,
faut avoir les nerfs solides un peu dans ce cas là! En milieux d'après midi le
vent a faibli un peu et tourné à l'est sud-est ce qui nous met à l'abri du motu
donc moins de vagues. Pourvu que les conditions soient conforment aux
fichiers grib reçus, car demain jeudi il est prévu encore beaucoup de vent mais
toujours avec dominante Est.
Au Suwarrow il existe une nurserie naturelle pour les raies Manta, un récif de
coraux de 3 à 5 mètres de fond ou viennent les raies et une espèce de poisson
vient leur nettoyer leurs dents. Nous sommes allés les voir en snorkeling, très
impressionnantes ces raies et magnifiques à admirer, une impression de vol
dans l'eau avec des mouvements très lent de leurs ailes, presque identique à
un avion géant muni de 2 museaux.
J'ai oublié de vous parler des requins, il y en a partout, des centaines, petits et
gros, beaucoup de pointes noires très inoffensifs, seul bémol, les Rangers
nous déconseillent d'aller dans la passe comme cela se fait dans les Tuamotu,
car ici il y a quelques uns plus grands et pas du tout amicaux. Ils nous
précisent bien que le 1er hôpital est à plusieurs jours de navigation, pas
d'aéroport et pas d'hélicoptère pour secourir si besoin.
Vendredi 26, nous ne sommes plus que 2 bateaux au mouillage, Frankiz et un
yacht à moteur ressemblant drôlement à un voilier sans mat ! Nous discutons
beaucoup avec les Rangers, bien sur qu'ils apprécient nos bières et nous aussi
assis à l'ombre sur la plage. La sieste étant toujours superbe dans les hamacs !
Alors, les Rangers nous apprirent quand même qu'ils avaient beaucoup de
contact avec l'extérieur, par radio. Ainsi ils nous signalent que les autorités
Françaises de Papeete leur ont signalé l'arrivée prochaine de 5 voiliers en
provenance de Bora Bora. Donc nous sommes quand même quelque part
"pistés".
Notre départ du Suwarrow est programmé pour samedi 27 à 8h, et nous
devons réaliser les papiers de sortie dans l'après midi. Normalement d'après
les fichiers grib météo, nous devrions mettre entre 3 et 4 jours pour arriver
aux Samoa ouest distant d'environ 510 milles.
Une autre décision que j'ai prise aussi, c'est pour la suite des étapes, après
les Samoa, se sera Wallis, les Fidji et la Nouvelle Zélande. Les Fidji semblent
mieux placées sur la route de la NZ et là bas j'aurai besoin de matériel tel que
coulisseaux pour ma GV et remplacer un coupe circuit de la batterie service
qui me crée quelques problèmes d'alimentation 12 volts.
Samedi 27 août, 7h30, le ciel semble dégagé, nous partons. mais voilà un
énorme bloc de corail vient se loger dans l'ancre, le guindeau arrive quand
même à le remonter jusque l'étrave, un peu de bagarre et d'astuce pour
remettre cet intrus à l'eau et voilà il est 8h15, un grain assez violant nous
surprend, vent assez fort, Frankiz avance péniblement à 2 noeuds vers la
sortie mais lorsqu'il prend l'axe de la passe, le voilà qui file entre 8 et 9
noeuds, un courant sortant nous propulse en dehors en moins de 5 minutes
alors qu'un catamaran qui entre dans le lagon semble faire du surplace !
Dehors nous avons juste le temps de hisser la grande Voile avec 2 ris que
voilà un autre grain violant nous surprend, un p'tit regard sur l'anémomètre,
aie aie aie 42 noeuds et Frankiz qui dépasse les 12 noeuds, faut bien tenir la
barre car une sortie de route est toujours possible. Je ne dis rien à Tamar qui
est assise dans le cockpit et emble un peu inquiète. Enfin cela est tenable car
la moyenne du vent reste à 30 noeuds durant 1 heure, le temps d'avaler 12
milles en un peu de temps et d'empanner pour faire route sur les Samoa. Voilà
à bientôt. Le reste n'est que pure navigation entre grains et vents faibles dans
une mer agitée à forte comme c'est l'habitude ici dans ce coin.
Alain
Vous devez vous identifier pour laisser un commentaire : cliquez ici pour vous connecter .