Le Cap-Vert, à nouveau!

Notre séjour en Gambie touchant à sa fin, il est temps de poursuivre notre périple. Nous voudrions remonter vers les Canaries, pour laisser le bateau en lieu sûr, et faire des économies sur les billets d'avion et autres frais de port. Mais les alizés sont bien établis, comme il se doit, et la perspective de 10 jours au près dans 25 nœuds de vent réel nous rebute vraiment.
Plusieurs autres bateaux ont essayé et finalement renoncé, la mer étant trop dure pour la remontée. Laisser le bateau au Cap-Vert n'est pas envisageable, les accessoires ayant une fâcheuse tendance à disparaître, alors même que leur propriétaire n'est absent que pour une courte durée. Même l'ancre d'une annexe mouillée a été dérobée par un plongeur indélicat! Non, décidément, ce n'est pas une option. Par contre, les billets d'avion depuis Sal défient toute concurrence. On ira donc jusque là. Mais après???
La décision n'est pas arrêtée, mais on se met en route pour Sal, direction Santa Maria, en profitant d'une bascule de vent. Cap au Nord, et en une journée on est presque à hauteur de Dakar. La mer est encombrée de casiers et autres filets, même loin en mer, et il faut rester vigilant. Heureusement, ils sont très bien signalés. Le soir tombe, il faut absolument s'éloigner de la côte pour limiter les risques. Ca tombe bien, le vent refuse, c'est le moment de virer de bord. S'ensuit un long bord, de près, d'abord, puis au moteur, faute de vent, puis au bon plein avant de se retrouver au travers, à faire 170 milles par jour. La navigation est rapidement bouclée, avec l'aide précieuse d'un nouveau membre d'équipage, un équipier qui cherchait un embarquement pour le Cap Vert. Nous avions toujours compté sur nos propres forces et aurions probablement pu continuer à le faire, mais vu l'état d'Anne-Sophie, dont les déplacements à bord d'un bateau à la gîte dans le clapot deviennent de plus en plus difficile, avoir la possibilité de confier une partie de la charge de travail à quelqu'un d'autre ne semble plus un luxe superflu.
Embarquer un équipier est un pari. Un pari sur ses compétences, sur ses capacités à vivre dans l'environnement hostile d'un bateau en perpétuel mouvement et à gérer un éventuel mal de mer, sur l'entente avec l'équipage alors que les repères de ce dernier sont modifiés et la promiscuité est renforcée, sur son honnêteté, et encore tout un tas de questions que nous n'avions pas voulu soulever jusqu'à présent. Un équipier peut très vite devenir un problème supplémentaire à gérer s'il s'avère incapable de s'adapter ou que la sauce ne prend pas. Mais cette fois-ci, notre situation justifie ce pari, et l'équipier rencontré nous inspire confiance. Nous aurons eu raison: la traversée se passera parfaitement bien, et nous aurons un pincement au cœur en nous séparant de lui après avoir accompli les formalités d'entrée à Sal.
Nous passerons une bonne semaine au mouillage. Une semaine de repos, à faire un peu de planche à voile, passer du temps à la plage, et admirer les prises des pêcheurs au ponton. Prises parfois très impressionnantes: thons et requins, bien sûr, mais surtout des merlins de plus de cent cinquante kilos, énormes poissons capturés sur des barques de quelques mètres, ç’aurait pu inspirer Hemingway. Un jour, il y en aura cinq (!) alignés sur le ponton, énormes masses effilées, luisantes et noires. Ils sont découpés sur place, et c'est par brouettes que les darnes sont transportées.
Vient le moment de la séparation: Anne-Sophie et les deux benjamins prennent l'avion pour l'Europe, tandis que Tanguy et les aînés se préparent à une longue navigation. La destination n'est pas encore définie: la priorité va aux Canaries, où il sera plus facile de donner un coup de jeune au bateau qui en a bien besoin, mais aussi de le laisser pour rentrer en Europe en vue de la naissance. Trinidad, dans les Antilles, est aussi sur la liste. Les vrais cyclones ne balayent l'Atlantique qu'à partir d'Août, seules des ondes tropicales commencent à troubler des alizés encore bien établis. En plus, en restant au sud du 10e parallèle, les risques de mauvais temps sont réduits à presque rien. Finalement, le Brésil semble aussi une option envisageable. Les vents sont raisonnables, il y a juste le pot-au-noir à traverser, puis les alizés du sud-est devraient permettre de rejoindre rapidement le Nordeste. Les vents étant vraiment trop peu favorables pour les Canaries – plusieurs bateaux ont tenté l'aventure et finalement renoncé – la transat se précise.
Quoi qu'il en soit, il faut aller à Praia, sur Santiago, pour récupérer les cours qui attendent les enfants depuis trop longtemps. Après avoir rembarqué notre équipier qui doit aller sur Santiago, nous rejoignons Praia en trois journées de navigation: Les pêcheurs étant vraiment trop mal signalés, nous décidons de relâcher pour les nuits, à Boa Vista, d'abord, puis Maio. Maio où notre ancre se coincera sous un rocher et pliera, si, si sous les à-coups de la chaîne à l'appareillage! Il faudra deux apnées pour la débloquer.
Une navigation dynamique plus loin, et nous voilà à Praia, capitale du Cap-Vert, sur Santiago. Le mouillage choisi n'est pas bien situé: à l'écart de la ville, il nous oblige à une longue marche, ou à prendre le taxi. L'alternative nous mettait trop à portée de possible mains “collantes”, et l'annexe aurait été trop vulnérable au goût du chef de bord. Elle est d'abord laissée au port de pêche, puis, vu l'insistance des pêcheurs à se faire rémunérer pour la “surveiller”, au port de commerce.
A l'arrivée, l'officier de l'immigration n'est pas là. C'est presque la fin de son service, c'est la coupe du monde, et aucun étranger n'est attendu, il est bien mieux chez lui à suivre ce qui captive une bonne partie des gens sur la planète... la Coupe du Monde. Un garde l'appelle, et quelques minutes plus tard, le voilà qui arrive, ni gêné, ni contrarié, pour faire son travail. Nous avions fait notre entrée sur Sal, en principe nous ne devions même pas le voir, mais nos sources nous avaient dit le contraire. Pas grave, dans ce domaine, il vaut souvent mieux en faire trop que pas assez, et l'homme est vraiment aimable. On en profite pour lui demander quelques renseignements sur la ville et les environs. Après l'immigration, direction la police maritime, confortablement logée dans un joli bâtiment bleu roi, au bord de la plage. Le tout est fait en un tour de main, et nous voilà sur le “plateau”, le centre historique de la ville, logé sur une hauteur qui commande toute la baie. Et nous voilà dans notre premier vrai “grand magasin” depuis... les Canaries! Nous prenons la mesure du chemin accompli. Historiquement, la première capitale du Cap-Vert avait été installée plus à l'ouest, mais, comme pour beaucoup de villes portuaires de l'archipel, elle fut sujette à de trop nombreuses attaques de pirates, corsaires et autres forces étrangères, ce qui força son déménagement vers ce site plus facilement défendable.
Clairement, la ville est plus “africaine” que sa rivale Mindelo, même si elle s'en défend. L'ambiance de son marché, par exemple, n'a pas grand-chose à envier à celui de Banjul. Les différents ministères, administrations et ambassades se partagent deux collines. Cocasse: les ambassades russes et chinoises on la place de choix, juste en face du parlement.
Nous avons rendez-vous à l'école internationale pour récupérer les cours des enfants, qu'elle a eu la gentillesse de réceptionner et garder – longtemps. Nous découvrirons une jolie petite école francophone, si, si!, nichée au cœur d'un quartier résidentiel à proximité directe du quartier des ambassades. Les enfants seront charmés, et insisteront pour que nous participions à la fancy-fair organisée quelques jours plus tard, ce qui nous donnera l'occasion de prendre la mesure de l'ambiance et de la motivation des éducateurs.
Notre orin ayant eu la mauvaise idée de disparaître – encore –, et nos voisins de mouillage nous ayant averti du manque de délicatesse de certains, nous n'osons pas laisser le bateau seul longtemps, et n'irons pas à la découverte du reste de l'île. De toutes façons, les préparatifs de la transat vont bon train, et nous laissent peu de temps pour faire autre chose. Le vent ne s'améliore pas pour les Canaries, et nous finissons par nous décider pour le Brésil. Direction Jacaré, entre Cabedelo et Joao Pessoa. La navigation s'annonce courte en distance – environs 1400 milles, pour près de 2000 pour Trinidad –, mais animée, notamment par le pot-au-noir, et lente, en tous les cas au début. “On” nous annonce du portant, mais léger. On verra!
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Anonyme (non vérifié)
29 Août 2014 - 12:00am
serons de retour de france le
Anonyme (non vérifié)
29 Août 2014 - 12:00am
Félicitations de Michel &