On remonte, on remonte...
Après un dernier coup d’œil sur le travail du claviste, notre équipière s'envole pour la métropole et nous reprenons notre périple en duo.
Le temps de refaire l'avitaillement de base et nous quittons le mouillage du Carénage devant Pointe-à-Pitre où les dragueuses poursuivent leurs allers-retours pour approfondir le chenal d'entrée. En effet, les travaux d'agrandissement du canal de Panama vont considérablement modifier le trafic maritime. Évitant de doubler le Cap de Bonne Espérance, de gigantesques porte-containers vont arriver d'Asie dans la zone Caraïbes : de grands ports sont en construction tant à Cuba qu'en Jamaïque (les USA refusent de les accueillir à cause des risques de marées noires !!!) où se fera le transbordement pour acheminer les marchandises vers des ports secondaires. La Martinique et la Guadeloupe se préparent pour capter une partie de ce trafic secondaire avec des projets d'agrandissement de leurs zones portuaires ou de leur port dont l’opportunité économique, sociale et environnementale semble plus que douteuse. À Pointe-à-Pitre, les rejets des boues se font en mer, à moins de 10 km des côtes où déjà les pécheurs ne travaillent plus à cause du Chlordecone. Cet insecticide, particulièrement toxique, utilisé pendant des dizaines d'années pour lutter contre le charançon du bananier, se retrouve aujourd'hui dans les poissons et crustacés, après avoir pollué les terres et les rivières... Et il a une durée de vie de 700 ans !!!
Nous mouillons dans la jolie anse du Gosier, protégée des alizés par un récif de corail et une petite île. Un marché de produits locaux, une église moderne et son clocher aux fresques originales, de jolies plages de sable blanc où on croise aussi des iguanes, font l'attrait de ce village. De grandes plaques de sargasses, algues flottantes provenant du nord du Brésil, envahissent les plages comme nos algues vertes bretonnes. Ces radeaux d'algues, peuvent être gigantesques : plus de 500 km de long ! La destruction massive de la mangrove sur les côtes brésilienne serait responsable des ces échouages massifs,ainsi que de plus grandes fluctuations de la dynamique des écosystèmes régionaux, notamment en lien avec le dérèglement climatique. Selon les autorités locales, « À l'échelle de chaque île, à ce jour, seul le ramassage répétitif peut être envisagé ; le principe étant d'empêcher ou de limiter la dégradation et dégagement de gaz ainsi que l'accumulation en mer de ces algues. ». Pour un peu, on se croirait dans les Côtes d'Armor... Mais cela n'empêche pas les équipages des saintoises (ou canots saintois) de poursuivre leurs entraînements en vue du Tour de Guadeloupe en voile traditionnelle qui aura lieu au mois de juillet.
Le 1er avril, trois ans après notre départ de Saint-Malo, un bon vent de nord-est, force 5 avec des rafales à 7, nous propulse, sous génois seul, jusqu'à l'Anse à la Barque sur Basse-Terre d'où nous repartons le lendemain pour rejoindre Deshaies au nord-est de l'île. Alors que nous ne comptons plus les tortues qui nous entourent, Katia aperçoit des dauphins qui folâtrent entre les bateaux au mouillage. J'attrape mon masque et me met à l'eau, espérant les apercevoir de plus près et dans leur élément. Pendant une bonne demi-heure, je peux en observer huit, parfois à moins de trois mètres de moi. Presque en surface, ils viennent vers moi (impressionnant !) et, au dernier moment, plongent et passent en dessous. Ouah ! Comme dans les documentaires de Cousteau, mais en vrai !!!
Le dimanche de Pâques nous nous rendons à la sortie de la messe pour admirer les jolies tenues des Guadeloupéennes.
Le 8 avril, vers midi, nous reprenons la mer avec deux ris dans la grand-voile et un génois au 2/3, espérant arriver à Saint-Barthélémy le lendemain en tout début de matinée. Mais Spip, au bon plein, avec un vent d'Est 5 à 6 alors que la météo nous annonçait 4-5, dépasse par moment les 9 nœuds... Nous nous préparons à une arrivée de nuit à Gustavia. Après un peu plus de 15 heures pour parcourir 115 milles, un beau slalom en nocturne entre les nombreux bateaux au mouillage, une petite collation et nous retrouvons notre couchette avec plaisir vers 4 heures du matin, même si la houle qui s'engouffre dans la baie continue de faire rouler Spip. Dans l'après-midi, je vais faire les formalités d'entrée et dois m'acquitter de 12 euros de taxe de mouillage. Comme je m'étonne de ce prix puisque nous sommes sur notre ancre, je m'entends répondre : « Oui, mais vous êtes à Saint-Barth ! ». Passant devant l'Office de tourisme, je vais y chercher une carte routière de l'île et demande s'il y a des bus pour se déplacer. En me regardant comme si j'arrivais de Mars, « non, Monsieur, il faut prendre un taxi » me répond la jeune employée. Le lendemain nous croiserons un de ces taxis : un Porsche Cayenne !!! C'est donc à pied que nous nous rendons de l'autre côté de l'île. Nous longeons le petit aérodrome dont la construction a fait décoller (et oui, j'ose !) l'essor touristique, flânons entre les jolis bungalows de l’Éden Rock, hôtel-résidence 4 étoiles en bord de mer, et rendons visite à Marie, la fille d'une de nos amies qui travaille ici depuis quelques années. Sur le port, où les boutiques de luxe se bousculent, c'est le branle-bas de combat : il faut accueillir les 80 voiliers de compétitions qui viennent, avec leurs équipages, régater pendant une semaine. Et dire que pendant des siècles cette île était essentiellement habitée par des bretons et des normands à l'origine de son peuplement qui s'échinaient à y survivre, amélioraient l'ordinaire avec quelques actes de piratage, et qui s'y sont maintenus même pendant la domination suédoise avant que la France ne rachète l’Île au XIXème siècle. Ce n'est qu'après 1950, sous l'impulsion d'un maire quelque peu aventurier mais bien en cours qui ose construire l'aérodrome - une piste de moins de 650 m entre une colline et une plage dont l'approche doit se faire à vue - et sait attirer de très riches investisseurs que, trois siècles après l'arrivée de leurs ancêtres, les héritiers de terres quasiment incultes deviennent milliardaires !
Nous quittons donc rapidement ce monde de la jet-set (et un mouillage décidément très inconfortable) pour poser notre ancre dans la très agréable baie du Colombier dans le sud de l'île.
Décidément, une tortue en surface, c'est plus beau qu'une Rolex en devanture !
Nous assistons, stupéfaits, au débarquement et à l'installation sur la plage, depuis un gros yacht à moteur, des fauteuils pour l'apéro et de la table pour le déjeuner (à l'abri des parasols, of course !) que le personnel transporte depuis les cuisines du bord...
De grandes propriétés, aux jardins luxuriants, se répartissent sur les hauteurs face à l'île toute proche de Saint-Martin que nous rallions sous génois seul le 14 avril. Pour rejoindre la baie de Marigot au nord, nous longeons la partie néerlandaise où se trouvent l'aéroport international et le port de Philipsburg, véritable parking à navires de croisières. Heureusement Marigot est une petite bourgade beaucoup plus calme au fond d'une grande baie où mouillent de très nombreux voiliers attirés par la zone franche et qui profitent de l'exonération de taxes pour renouveler leur équipement, faire le plein de gas-oil (0,83 euros/l) ou de cigarettes quatre fois moins chères qu'en métropole. Vendeurs de bibelots, restaurants et gargotes attendent les cohortes de touristes-croisiéristes que déversent les autocars venues de la zone hollandaise. Et c 'est «Chez Coco» que Katia m'invite à fêter mon anniversaire avec un excellent plat de poisson et des frites !
Nous quittons la France pour l'île voisine d'Anguilla, indépendante depuis 1980, après un référendum et le retrait des troupes britanniques intervenus onze ans auparavant pour ramener l'ordre. La plus au nord des îles sous le vent, Anguilla est une terre plate et aride composée de corail et de calcaire, couverte principalement de rochers, clairsemée de chênes nains, de quelques arbres.
Nous jetons l'ancre à Road Bay, sur la côte ouest, dans 3 m d'eau, devant une magnifique plage de sable poudreux d'un blanc immaculé. Toujours quelques tortues mais aussi une belle raie léopard. Quelques maisons et commerces bordent la route qui sépare la plage du marais salant encore exploité il y a moins de 20 ans mais qui n'intéresse plus aujourd'hui que quelques canards, aigrettes et autres échassiers.
Pour nous rendre à la capitale, The Valley, distante d'une dizaine de kilomètres nous tentons le stop : à l'aller comme au retour, la première voiture qui passe s'arrête. Ville étrange où se mélangent vieilles maisons de bois et de bardeaux et immeubles flambant neufs, sièges de sociétés venus profiter de l'absence totale d'imposition. Une église avec une drôle de façade est dédiée à... saint Gérard !
La météo nous annonce des vents modérés de sud-est : nous allons en profiter pour franchir les 80 milles qui nous séparent des Îles Vierges Britanniques.
Cap à l'ouest !
Le jeu
Vous êtes plus forts en architecture qu'en botanique : bravo à tous ceux qui ont reconnu des lambrequins. J'ai même appris que c'était courant aussi bien à Nancy qu'à... Madagascar !
Cette fois ci, pas d'indice : qu'est-ce que c'est ?
Vous devez vous identifier pour laisser un commentaire : cliquez ici pour vous connecter .