Le catamaran est maintenant en sécurité à Nouméa. Voici l'article des "Nouvelles Calédoniennes":
« Te Marama à bon port
Comme un oiseau blessé, « Te Marama » est entré hier matin à Port Moselle, à couple des chaloupes de la marina. Après une
vilaine tempête et une brutale rencontre avec un cargo, après dix jours de dérive solitaire, Patrick Humbert a sauvé son
étrange voilier.
Souvenez-vous, terriens, de la dépression de la fin juin. La pluie, le vent, les routes coupées, les champs inondés, les tribus et
les villages isolés. Il ne faisait pas bon être dehors.
Cest cette même dépression que Te Marama a essuyée en mer, alors quil faisait route de la Nouvelle-Zélande vers Nouméa. A
bord, quatre membres déquipage : Leslie, Marco, Gabriel et Patrick Humbert, le propriétaire et skipper.
Non manuvrant dans la tempête
Comme si le mauvais temps ne suffisait pas... Te Marama, qui a pourtant fait ses preuves en traversées hauturières, a subi un
terrible enchaînement de mauvais coups. Dabord un turbo grillé. Puis lembrayage cassé. Et pour finir la rupture dun support de
safran. Plus de moteur, plus de gouvernail. Le voilier non manuvrant, à la dérive, sest mis perpendiculaire à la lame, au beau
milieu de la dépression, par un vent de 50 nuds et les vagues qui allaient avec.
« Ça déferlait constamment. Les vagues passaient par-dessus la cabine. Javais peur de faire un soleil mais le bateau sest très
bien comporté », raconte Pierre Humbert qui depuis hier midi, apprécie limmobilité dun mouillage sûr entre deux catways.
Nempêche quil y avait risque. Si les vagues avaient fracassé les larges hublots de cabine, presque aussi grands que des
fenêtres, Te Marama aurait fait leau au-delà de ce que les pompes auraient pu étancher.
Blessé à laile
« Mon équipage sest admirablement comporté. Mais je minquiétais pour lui plus que pour moi-même », explique le skipper.
Raisonnablement, alors que le bateau navigue comme dans une lessiveuse près de Norfolk, Patrick Humbert déclenche donc sa
balise de détresse. « Nous avons eu le contact avec les autorités néo-zélandaises, poursuit-il. Ils ont envoyé un avion, et ont
contacté un cargo. Cest la tentative de sauvetage qui a tourné au désastre. »
La mer était encore trop forte, le cargo trop gros et trop haut sur leau, et le catamaran trop petit malgré ses 22 mètres. « On
roulait bord sur bord. En essayant de passer la remorque, on a failli passer sous létrave, on a failli passer dans lhélice et on a
tapé trois fois. » Bilan : les deux étraves embouties, et laile endommagée sur son bord de fuite. Sans compter les traces de
peinture antifouling que le cargo a laissées sur les flancs du cockpit du voilier, pourtant à deux bons mètres au-dessus de leau.
Cest dire si ça devait rouler...
« Cest de la folie de tenter un sauvetage avec un cargo dans du mauvais temps », constate le skipper. Il na dailleurs pas
insisté. Via Auckland, cest la marine française qui est alors alertée. Et cest La Glorieuse qui est finalement venue chercher
léquipage du voilier sans moteur, sans safran et désormais presque sans voile.
Dérive solitaire
Patrick Humbert, lui, na pas voulu quitter son bateau. « Le commandant de La Glorieuse a insisté. Mais javais repris du poil de la
bête. Il était inconcevable que jabandonne Te Marama. Un bateau, cest plus que de largent. Les gens qui ont travaillé dessus
ou navigué dessus y ont mis leur âme. Jaurais eu limpression de les trahir. »
Cest donc seul quil a fini le voyage. Sil a envisagé un remorquage depuis Nouméa, le prix len a dissuadé : cinq millions. Il a
refusé.
« En jouant sur le profil de laile, jarrivais à maintenir un cap de dérive. Même pas un nud de vitesse, mais javais de leau, des
vivres, de lénergie, explique-t-il. Javais le contact avec la Marine, la famille, les amis. Cétait une aide morale très importante.
Le bateau restait une plate-forme de vie avec tout ce quil fallait. Calédonie, Vanuatu ou Fidji, je serais bien arrivé quelque part
en bonne santé. »
Un quelque part qui a finalement été la destination prévue, grâce à un ultime remorquage. « Un bateau ami est venu à ma
rencontre et ma pris en remorque à 300 milles dici. Nous sommes arrivés jeudi à 23 heures. »
Solidarité discrète
Sur le bateau ami, sur la manière dont a joué la solidarité des gens de voile, il nen dira pas plus. « Ils veulent rester discrets. »
Respectons.
En revanche, Patrick Humbert adresse ses remerciements aux autorités néo-zélandaises, à la marine française, à tous les amis
venus le remorquer et à tous ceux qui lont accueilli avec gentillesse.
Et la suite ? « Je vais changer la propulsion et installer deux moteurs, peut-être électriques. Je vais remettre laile en état et je
vais découvrir votre beau pays... »
Un perce-vagues à gréément aile
Te Marama, dont le nom maohi signifie « la lumière de lesprit » est un étrange voilier. Même sans son odyssée, il aurait attiré les
curieux au ponton des visiteurs de Port-Moselle.
Long de 22 mètres, large de 9, ce catamaran construit à Raïatéa (Polynésie) et lancé en décembre 99 est un « perce-vagues ».
Ses deux coques, longues, fines et basses sur leau, sans trampoline, ont pour fonction de percer les vagues plus que de les
chevaucher. La structure habitable est ainsi ramenée vers larrière, et supporte un mât aile. Sur Te Marama, pas de voiles au
sens habituel du terme, mais une aile davion à profil et orientation réglable. Le choc contre le cargo nen a pas abîmé la
structure en carbone, seulement la « peau » en kevlar. Elle pourra être remplacée par de laluminium.
Le catamaran est maintenant en sécurité à Nouméa. Voici l'article des "Nouvelles Calédoniennes":
« Te Marama à bon port
Comme un oiseau blessé, « Te Marama » est entré hier matin à Port Moselle, à couple des chaloupes de la marina. Après une
vilaine tempête et une brutale rencontre avec un cargo, après dix jours de dérive solitaire, Patrick Humbert a sauvé son
étrange voilier.
Souvenez-vous, terriens, de la dépression de la fin juin. La pluie, le vent, les routes coupées, les champs inondés, les tribus et
les villages isolés. Il ne faisait pas bon être dehors.
Cest cette même dépression que Te Marama a essuyée en mer, alors quil faisait route de la Nouvelle-Zélande vers Nouméa. A
bord, quatre membres déquipage : Leslie, Marco, Gabriel et Patrick Humbert, le propriétaire et skipper.
Non manuvrant dans la tempête
Comme si le mauvais temps ne suffisait pas... Te Marama, qui a pourtant fait ses preuves en traversées hauturières, a subi un
terrible enchaînement de mauvais coups. Dabord un turbo grillé. Puis lembrayage cassé. Et pour finir la rupture dun support de
safran. Plus de moteur, plus de gouvernail. Le voilier non manuvrant, à la dérive, sest mis perpendiculaire à la lame, au beau
milieu de la dépression, par un vent de 50 nuds et les vagues qui allaient avec.
« Ça déferlait constamment. Les vagues passaient par-dessus la cabine. Javais peur de faire un soleil mais le bateau sest très
bien comporté », raconte Pierre Humbert qui depuis hier midi, apprécie limmobilité dun mouillage sûr entre deux catways.
Nempêche quil y avait risque. Si les vagues avaient fracassé les larges hublots de cabine, presque aussi grands que des
fenêtres, Te Marama aurait fait leau au-delà de ce que les pompes auraient pu étancher.
Blessé à laile
« Mon équipage sest admirablement comporté. Mais je minquiétais pour lui plus que pour moi-même », explique le skipper.
Raisonnablement, alors que le bateau navigue comme dans une lessiveuse près de Norfolk, Patrick Humbert déclenche donc sa
balise de détresse. « Nous avons eu le contact avec les autorités néo-zélandaises, poursuit-il. Ils ont envoyé un avion, et ont
contacté un cargo. Cest la tentative de sauvetage qui a tourné au désastre. »
La mer était encore trop forte, le cargo trop gros et trop haut sur leau, et le catamaran trop petit malgré ses 22 mètres. « On
roulait bord sur bord. En essayant de passer la remorque, on a failli passer sous létrave, on a failli passer dans lhélice et on a
tapé trois fois. » Bilan : les deux étraves embouties, et laile endommagée sur son bord de fuite. Sans compter les traces de
peinture antifouling que le cargo a laissées sur les flancs du cockpit du voilier, pourtant à deux bons mètres au-dessus de leau.
Cest dire si ça devait rouler...
« Cest de la folie de tenter un sauvetage avec un cargo dans du mauvais temps », constate le skipper. Il na dailleurs pas
insisté. Via Auckland, cest la marine française qui est alors alertée. Et cest La Glorieuse qui est finalement venue chercher
léquipage du voilier sans moteur, sans safran et désormais presque sans voile.
Dérive solitaire
Patrick Humbert, lui, na pas voulu quitter son bateau. « Le commandant de La Glorieuse a insisté. Mais javais repris du poil de la
bête. Il était inconcevable que jabandonne Te Marama. Un bateau, cest plus que de largent. Les gens qui ont travaillé dessus
ou navigué dessus y ont mis leur âme. Jaurais eu limpression de les trahir. »
Cest donc seul quil a fini le voyage. Sil a envisagé un remorquage depuis Nouméa, le prix len a dissuadé : cinq millions. Il a
refusé.
« En jouant sur le profil de laile, jarrivais à maintenir un cap de dérive. Même pas un nud de vitesse, mais javais de leau, des
vivres, de lénergie, explique-t-il. Javais le contact avec la Marine, la famille, les amis. Cétait une aide morale très importante.
Le bateau restait une plate-forme de vie avec tout ce quil fallait. Calédonie, Vanuatu ou Fidji, je serais bien arrivé quelque part
en bonne santé. »
Un quelque part qui a finalement été la destination prévue, grâce à un ultime remorquage. « Un bateau ami est venu à ma
rencontre et ma pris en remorque à 300 milles dici. Nous sommes arrivés jeudi à 23 heures. »
Solidarité discrète
Sur le bateau ami, sur la manière dont a joué la solidarité des gens de voile, il nen dira pas plus. « Ils veulent rester discrets. »
Respectons.
En revanche, Patrick Humbert adresse ses remerciements aux autorités néo-zélandaises, à la marine française, à tous les amis
venus le remorquer et à tous ceux qui lont accueilli avec gentillesse.
Et la suite ? « Je vais changer la propulsion et installer deux moteurs, peut-être électriques. Je vais remettre laile en état et je
vais découvrir votre beau pays... »
Un perce-vagues à gréément aile
Te Marama, dont le nom maohi signifie « la lumière de lesprit » est un étrange voilier. Même sans son odyssée, il aurait attiré les
curieux au ponton des visiteurs de Port-Moselle.
Long de 22 mètres, large de 9, ce catamaran construit à Raïatéa (Polynésie) et lancé en décembre 99 est un « perce-vagues ».
Ses deux coques, longues, fines et basses sur leau, sans trampoline, ont pour fonction de percer les vagues plus que de les
chevaucher. La structure habitable est ainsi ramenée vers larrière, et supporte un mât aile. Sur Te Marama, pas de voiles au
sens habituel du terme, mais une aile davion à profil et orientation réglable. Le choc contre le cargo nen a pas abîmé la
structure en carbone, seulement la « peau » en kevlar. Elle pourra être remplacée par de laluminium.
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