Catamaran en difficulté en mer de Tasman

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Catamaran en difficulté en mer de Tasman
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réponse n°72478

Le catamaran est maintenant en sécurité à Nouméa. Voici l'article des "Nouvelles Calédoniennes":
« Te Marama à bon port
Comme un oiseau blessé, « Te Marama » est entré hier matin à Port Moselle, à couple des chaloupes de la marina. Après une
vilaine tempête et une brutale rencontre avec un cargo, après dix jours de dérive solitaire, Patrick Humbert a sauvé son
étrange voilier.

Souvenez-vous, terriens, de la dépression de la fin juin. La pluie, le vent, les routes coupées, les champs inondés, les tribus et
les villages isolés. Il ne faisait pas bon être dehors.
C’est cette même dépression que Te Marama a essuyée en mer, alors qu’il faisait route de la Nouvelle-Zélande vers Nouméa. A
bord, quatre membres d’équipage : Leslie, Marco, Gabriel et Patrick Humbert, le propriétaire et skipper.

Non manœuvrant dans la tempête

Comme si le mauvais temps ne suffisait pas... Te Marama, qui a pourtant fait ses preuves en traversées hauturières, a subi un
terrible enchaînement de mauvais coups. D’abord un turbo grillé. Puis l’embrayage cassé. Et pour finir la rupture d’un support de
safran. Plus de moteur, plus de gouvernail. Le voilier non manœuvrant, à la dérive, s’est mis perpendiculaire à la lame, au beau
milieu de la dépression, par un vent de 50 nœuds et les vagues qui allaient avec.
« Ça déferlait constamment. Les vagues passaient par-dessus la cabine. J’avais peur de faire un soleil mais le bateau s’est très
bien comporté », raconte Pierre Humbert qui depuis hier midi, apprécie l’immobilité d’un mouillage sûr entre deux catways.
N’empêche qu’il y avait risque. Si les vagues avaient fracassé les larges hublots de cabine, presque aussi grands que des
fenêtres, Te Marama aurait fait l’eau au-delà de ce que les pompes auraient pu étancher.

Blessé à l’aile

« Mon équipage s’est admirablement comporté. Mais je m’inquiétais pour lui plus que pour moi-même », explique le skipper.
Raisonnablement, alors que le bateau navigue comme dans une lessiveuse près de Norfolk, Patrick Humbert déclenche donc sa
balise de détresse. « Nous avons eu le contact avec les autorités néo-zélandaises, poursuit-il. Ils ont envoyé un avion, et ont
contacté un cargo. C’est la tentative de sauvetage qui a tourné au désastre. »
La mer était encore trop forte, le cargo trop gros et trop haut sur l’eau, et le catamaran trop petit malgré ses 22 mètres. « On
roulait bord sur bord. En essayant de passer la remorque, on a failli passer sous l’étrave, on a failli passer dans l’hélice et on a
tapé trois fois. » Bilan : les deux étraves embouties, et l’aile endommagée sur son bord de fuite. Sans compter les traces de
peinture antifouling que le cargo a laissées sur les flancs du cockpit du voilier, pourtant à deux bons mètres au-dessus de l’eau.
C’est dire si ça devait rouler...
« C’est de la folie de tenter un sauvetage avec un cargo dans du mauvais temps », constate le skipper. Il n’a d’ailleurs pas
insisté. Via Auckland, c’est la marine française qui est alors alertée. Et c’est La Glorieuse qui est finalement venue chercher
l’équipage du voilier sans moteur, sans safran et désormais presque sans voile.

Dérive solitaire

Patrick Humbert, lui, na pas voulu quitter son bateau. « Le commandant de La Glorieuse a insisté. Mais j’avais repris du poil de la
bête. Il était inconcevable que j’abandonne Te Marama. Un bateau, c’est plus que de l’argent. Les gens qui ont travaillé dessus
ou navigué dessus y ont mis leur âme. J’aurais eu l’impression de les trahir. »
C’est donc seul qu’il a fini le voyage. S’il a envisagé un remorquage depuis Nouméa, le prix l’en a dissuadé : cinq millions. Il a
refusé.
« En jouant sur le profil de l’aile, j’arrivais à maintenir un cap de dérive. Même pas un nœud de vitesse, mais j’avais de l’eau, des
vivres, de l’énergie, explique-t-il. J’avais le contact avec la Marine, la famille, les amis. C’était une aide morale très importante.
Le bateau restait une plate-forme de vie avec tout ce qu’il fallait. Calédonie, Vanuatu ou Fidji, je serais bien arrivé quelque part
en bonne santé. »
Un quelque part qui a finalement été la destination prévue, grâce à un ultime remorquage. « Un bateau ami est venu à ma
rencontre et m’a pris en remorque à 300 milles d’ici. Nous sommes arrivés jeudi à 23 heures. »

Solidarité discrète

Sur le bateau ami, sur la manière dont a joué la solidarité des gens de voile, il n’en dira pas plus. « Ils veulent rester discrets. »
Respectons.
En revanche, Patrick Humbert adresse ses remerciements aux autorités néo-zélandaises, à la marine française, à tous les amis
venus le remorquer et à tous ceux qui l’ont accueilli avec gentillesse.
Et la suite ? « Je vais changer la propulsion et installer deux moteurs, peut-être électriques. Je vais remettre l’aile en état et je
vais découvrir votre beau pays... »
Un perce-vagues à gréément aile
Te Marama, dont le nom maohi signifie « la lumière de l’esprit » est un étrange voilier. Même sans son odyssée, il aurait attiré les
curieux au ponton des visiteurs de Port-Moselle.
Long de 22 mètres, large de 9, ce catamaran construit à Raïatéa (Polynésie) et lancé en décembre 99 est un « perce-vagues ».
Ses deux coques, longues, fines et basses sur l’eau, sans trampoline, ont pour fonction de percer les vagues plus que de les
chevaucher. La structure habitable est ainsi ramenée vers l’arrière, et supporte un mât aile. Sur Te Marama, pas de voiles au
sens habituel du terme, mais une aile d’avion à profil et orientation réglable. Le choc contre le cargo n’en a pas abîmé la
structure en carbone, seulement la « peau » en kevlar. Elle pourra être remplacée par de l’aluminium.

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