Ne vous fiez pas aux fichiers Grib en Méditerranée

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Anonyme (non vérifié)
Ne vous fiez pas aux fichiers Grib en Méditerranée
sujet n°94878
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HERMINE 36
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réponse n°160204

Bonjour,
Le manque de fiabilité en Méditerranée des sources météo que tu cites ne m'étonne pas. Ce sont des modèles synoptiques à grande maille qui ne sont pas réalistes dans cette zone.
Pour ma part j'utilise les modèles à petite maille italien (LAMMA, le meilleur amha) et grec (université d'Athènes). Voir les liens ci-dessous.
De plus ils ont aussi une prévision de vagues assez fiable, ce que je trouve aussi important que le vent pour le routage.
J'ai encore parcouru cette année plus de 3000 milles entre France, Sardaigne, Tunisie, Malte, Sicile et Grèce, ce n'est pas la première fois et je ne regarde plus que ces deux.
Concernant l'usage intensif du moteur en med, ce n'est vrai que si on se fixe un planning trop serré avec des dates impératives. Si on a le temps il y a heureusement moyen de faire surtout de la voile. Ce fut mon cas cette année.

http://forecast.uoa.gr/LINKS/ICLAMS/iclams_anim.php?field=speed&domain=2NDGRID&lan=en

http://www.lamma.rete.toscana.it/ww3/

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HERMINE 36
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réponse n°160210

 PS : je ne vois pas ce qu'est la baie de Valone. Serait-ce le nom italien de Vlore ?

Si c'est le cas, il aurait mieux valu y aller (facile à dire après, bien sûr ...).
Je ne connais la côte albanaise que jusqu'à Himaré (en venant du sud), mais l'accueil est plutôt bon même si les ports n'ont pas nos standards. Dans les conditions du moment le seul vrai abri était Vlore.
En tout cas le guide Imray est vraiment obsolète concernant l'Albanie. Une nouvelle édition est en cours paraît-il.

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KENDO
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réponse n°160212
a écrit :
Titre Article : Adriatique Octobre 2010
En ce début octobre 2010 nous nous préparons à une croisière automnale sur un Dufour 365 de Tivat (Monténégro) à Kilada (Péloponnèse) via le canal de Corinthe, soit 600 milles en 2 semaines.

Arrivant de Paris le samedi 9 octobre au soir nous récupérons le bateau au chantier situé en bout de piste de l’aéroport. Nous sommes 3 à bord pour la traversée de Tivat à Corfou (180 milles au Sud-Sud-Est le long de la côte Albanaise) : Denis le propriétaire et skipper, mon épouse Marie-Pascale et moi-même. Le temps de remettre les voiles en place, de faire l’avitaillement nécessaire et de télécharger les fichiers météo au café internet du coin, nous décidons d’appareiller le dimanche vers midi. Les prévisions des différents sites consultés (Passage Weather, Weather-online, Wetteronline, et Meteo France) sont assez cohérentes : une dépression à 995 hpa se développe en mer Tyrrhénienne; pas de vent jusqu’à lundi matin et 15-20 nœuds de face le lundi dans la journée en mer Adriatique, avec un peu moins de vent le long de la côte Albanaise notamment lors de l’arrivée au nord de Corfou. En prévision d’une 2ème partie de traversée au louvoyage nous gréons le Solent sur étai largable avec un ris.

De fait la journée et la nuit se passent au moteur conformément aux prévisions, avec un ciel complètement dégagé. Le lundi matin lorsque je prends mon quart vers 9 heures, le temps a bien changé : ciel plombé et un clapot désagréable avec 10-15 nœuds de vent de secteur Est. Nous avons parcouru 130 milles depuis le départ et nous sommes à une dizaine de milles de la cote Albanaise juste par le travers de la baie de Valone. Vers 9 heures 30 le vent rentre subitement et passe à 20-25 nœuds de secteur Sud-Sud-Est. Nous prenons 1 ris et nous établissons le Solent arisé en tirant un premier bord bâbord amures pour éviter de se retrouver trop à la côte. Au cas où nous aurions du mal à faire route directe, je consulte le guide IMRAY pour voir la qualité de l’abri dans la baie de Valone. Au-delà de la mauvaise réputation de l’accueil par les autorités Albanaises, les instructions nautiques ne sont pas très engageantes : pas de port, des fonds assez accores, un abri très moyen avec des rafales descendant des montagnes et une zone militaire limitant les mouillages disponibles. Je regarde alors du côté italien et je repère le port d’Otranto qui se trouve à une quarantaine de milles au vent de travers avec un accès facile et une bonne protection par vent de Sud-Est. Alternativement nous pouvons aller sur Brindisi qui se trouve plus loin (35 milles au nord d’Otranto).

J’enfile mon ciré et je mets mon harnais avec 2 longes. En remontant sur le pont les choses se sont aggravées : le vent est maintenant à 25-30 nœuds et la mer s’est bien creusée, avec des creux de l’ordre de 2 mètres. A peine le 2ème ris est-il pris que nous décidons de prendre le 3ème car le vent ne cesse de monter. Une première déferlante couche le bateau et Denis qui était à la barre et qui n’a pas eu le temps de mettre son ciré est trempé. Je prends la barre et Denis rentre à l’intérieur pour se changer et se reposer. Il est 10 heures. A partir de là les choses s’accélèrent : le vent continue de monter pour s’établir à 35-40 nœuds, les creux atteignent 3 mètres et le pilote automatique décroche en permanence. Marie-Pascale et moi sommes harnachés dans cockpit et je lui demande régulièrement de choquer l’écoute de grand-voile. Il n’y a bientôt plus rien à choquer… Les premiers grains arrivent vers 11 heures et les surventes avec (45-50 nœuds). Le bateau partant en survitesse, j’envisage à un moment de descendre complètement la GV, mais c’est impossible car je ne peux pas quitter la barre. La mer est énorme avec des trains de vagues de plus de 3 mètres 50 toutes les 2 minutes et les déferlantes remplissent régulièrement le cockpit en nous couchant à plus de 45 degrés. Nous décidons de fermer le capot de la descente, le temps de s’apercevoir que Denis à l’intérieur est sur « off » victime du mal de mer.

A partir de là il n’y a plus qu’à tenir. La barre est très sportive avec ce vent et cette mer de travers. L’amplitude des mouvements sur la barre à roue est telle que je tente de limiter les écarts de barre à +/- 25 degrés par rapport à la route directe : 3 quarts de tour à l’abattée, dès que je sens une déferlante nous prendre par le flanc, puis 1 tour complet au lof dès qu’elle est passée et ainsi de suite. Mais il faut que je gère mes efforts car j’ai plus de 5 heures de barre à ce rythme avant d’atteindre Otranto. Et les douleurs aux épaules, au dos et aux genoux commencent à faire leurs apparitions en début d’après-midi. En outre même si le bateau se comporte relativement bien, le poste de barre du Dufour 365 est particulièrement inconfortable dans ces conditions extrêmes, sans possibilité de se caler les pieds. Il m’arrive à plusieurs reprises de glisser dans un coup de gite avec pour conséquence de beaux départs au lof augmentant le risque de chavirage.

Heureusement le GPS traceur Geonav fixé à la colonne de barre m’indique le bon cap et la progression par rapport au waypoint: à chaque fois que nous passons en dessous du seuil des 30 milles, puis des 20 milles, puis des 10 milles, c’est la fête dans le cockpit!

Enfin vers 16 heures 30 il ne nous reste plus qu’une poignée de milles et nous nous préparons à l’arrivée. C’est à moins de 1 mille de l’entrée du port d’Otranto que nous prenons le grain le plus violent : 50 nœuds, la mer striée de blanc fume et, Denis ayant repris la barre et démarré le moteur pour l’arrivée, je crapahute sur le pont pour aller affaler et rabanter le Solent et la GV. Quelques minutes plus tard nous sommes amarrés à couple d’un catamaran le long du brise lame.

On se blottit dans le carré, complètement trempés de la tête aux pieds. Vers 23 heures après un diner réparateur (nous n’avons rien avalé depuis la veille au soir), nous voyons arriver un Sun Odyssey 47, la GV et le génois sur enrouleur en vrac: un échange rapide avec l’équipage visiblement crevé –2 convoyeurs professionnels Suisses venant de Bonifacio et à destination de Venise– nous confirme qu’ils ont vécu l’enfer : ils ont cru qu’ils ne passaient pas le cap San Maria Di Leuca à la pointe sud de la botte italienne sous GV à 3 ris appuyé au moteur, subissant des grains à plus de 50 nœuds ! Comme nous ils ont été surpris par les prévisions des modèles météo et n’ont été prévenus que par un BMS par VHF le lundi en début d’après-midi. Trop tard…

Les leçons à retenir :

- Je navigue depuis 7 ans sur mon OVNI435 (15.000 milles dont 2 transats) et j’ai utilisé régulièrement les prévisions météo via les fichiers Grib. Elles se sont toujours révélées très fiables en Atlantique jusqu’à 3-4 jours et je n’avais jamais je n’ai connu un tel écart : de 20 nœuds prévus (sur les fichiers Grib ce sont des vents moyens à 20 nœuds avec donc des rafales à 25 nœuds) nous avons eu 40-45 nœuds de vent moyen avec des rafales à 50 nœuds. La Méditerranée est vraiment le cauchemar des météorologues. Donc en dehors des navigations côtières à la journée, vous ne savez pas vraiment ce qui peut vous tomber dessus… A vos risques et périls !
- Pour la petite histoire nous n’avons fait que 3 heures de voile lors de la suite de notre croisière, tout le reste au moteur… Une fois de plus le dicton bien connu « en Méditerranée c’est trop ou pas assez » a été confirmé. J’avais déjà vécu cela sur mon bateau entre 2004 et 2007 en Méditerranée effectuant 2.500 milles de Gibraltar à St Raphael, via la Corse, la Sardaigne, la Tunisie, Malte, Sicile et l’Italie : 90% de moteur !
- Sur mon OVNI j’ai pris l’option « gyroscope » du pilote Raymarine. Il m’est arrivé d’avoir plus de 60 nœuds de vent au portant en hivers au large du Portugal et le pilote anticipait très bien les mouvements du bateau créés par les déferlantes. En outre grâce à la dérive entièrement relevée nous pouvions faire route « relativement tranquillement » en confiant la barre au pilote automatique sans que nous partions une seule fois au lof ou à l’abattée en près de 40 heures. J’ai pu donc constater qu’un quillard avec un pilote standard était beaucoup moins sûr par mer très forte…
- Nous avons bien fait de mettre le Solent arisé à poste avant le départ. Il aurait été impossible de le faire au moment où le vent est rentré.
- Du point de vue du gréement il aurait été préférable d’avoir une vraie trinquette sur enrouleur par rapport au Solent arisé, et le 3ème ris de la GV était vraiment trop haut (à la hauteur de la 2ème barre de flèche). Sur mon OVNI j’ai prévu un 3ème ris à mi-chemin entre la 1ère et la 2ème barre de flèche, rendant ainsi le bateau beaucoup moins ardent
- La sécurité apportée par le GPS traceur sur le poste de barre est incomparable. Cela m’a permis de corriger en permanence le cap en fonction de la dérive et des écarts de barre. Vu les conditions (équipage réduit, habitacle fermé et impossibilité de quitter la barre) nous aurions eu des difficultés à atterrir sur l’entrée du port à 0,1 mille près… Je ne parle même pas de mes jeunes années de navigation dans les années 1980 lorsque tout se faisait à l’estime. Merci la technologie !

Frdelorme59@gmail.com
 

 

mcremault@gmail.com

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KENDO
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réponse n°160214

a propos des fichiers "Grib" ils ne sont ni meilleur , ni pire que les autres

pour un marin , la premiére qualitée est l'observation en permanence ; surtout en adriatique ,justement , il y a deux difficultés la Bora (de nord) qui ne dure pas et en principe l'été les annonces sont trés rapprochées.
 
et le fameux vent de sud - est - l'humidité arrive avant le vent et ce vent devient souvent trés fort et dur qq fois plusieurs jours avec pluie.

je navique depuis 30 ans entre Venise - Mer Noire - Egypte , vous rencontrerer beaucoup de marin , qui vous dise ,c'est bien la Med qui est la plus difficile dans un tour du monde

avis trés personnel , je n'aime pas les dériveurs qq fois c'est tres surprenant , moi j'ai un 14ml avec 2ml de tirant d'eau et subit des vents infernales au nord de Minorque , ce n'es-t pas un partie de plaisir , mais de bons souvenirs

ça ira mieux la prochaine fois

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réponse n°160274

Bonjour 
 Votre mésaventure ne me surprend pas tellement après 20000 milles en Méditerannée. Les prévisions météo globales sont en général assez fiables mais l'importance des phénomènes locaux ou régionaux(reliefs très elevés des cotes) fait qu'il faut toujours être très prudent, un écart de 2 ou 3 Beaufort par rapport aux prévisions synoptiques des modèles généraux n'est pas rare. Il n'en reste pas moins que vous avez été "gâtés". En général c'est la mer qui pose le plus de problèmes car ces variations brutales de vent fort avec des fetch réduits créé des mers très courtes et "casse bateau"(j'ai un souvenir ému d'un Lastovo-Brindisi avec force 3 à 7 qui a fait en 24h le tour de la rose des vents ). L'avantage est qu'elle tombe en général très vite en quelques heures.
Bienvenue au Club des Méditerannéens

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VOYAGE 12.50
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réponse n°160741

Bonjour à tous
Pour suivre régulièrement les Gribs (U-Grib), depuis 3 ans, ici en méditerranée orientale, je souhaiterai apporter quelques précisions sur ce que nous dit Franck

  • Effectivement, en météo pré mâchée (le jour pour le lendemain), aucune météo n’est totalement fiable en Méditerranée.
  • C’est le suivi en historique de l’évolution des prévisions qui donne la bonne indication de la météo à venir. Là dans le cas de Franck, ils auraient pris les prévisions de Ugrib, 5 jours avant de partir, le coup de vent était annoncé. Par le plus grand des hasards, j’ai archivé les prévisions U-Grib du 5 octobre. Dès cette date, ils annonçait (photo jointe) pour la nuit du 11 au 12 octobre 30 nœuds de vent synoptique sur le détroit d’Otrante. Il faut garder en tête que les Grib annoncent toujours le vent synoptique, et qu’en l’occurrence avec ce type et cette direction de vent, une aggravation de 10 à 20 nœuds sous les rafales n’avait rien d’étonnant.
  • A l’attention de François : la définition des Gribs peut être demandée jusqu’à une valeur de un demi degré. Ce qui est le cas sur la photo jointe.

Cordialement
Michel

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