Passage en mer Egée
Notre vie à Mesolonghi est très sympa: grasse matinée, petit-déjeuner, ballade en ville avec kebab, bricolage sur le bateau et sieste pour Vanessa et Adrien, le soir apéro avec les copains Français... Pas trop dur quand-même mais les jours passent vite... toujours beaucoup de vent et l'on est heureux d'être au port! Dimanche barbecue organisé par Bertrand. Merci. C'est toujours difficile d'être l'organisateur. Journée qui change un peu nos habitudes et très sympa. Le lendemain les "au revoir" car tout le monde part sur la France. Leur bateau est hiverné et va les attendre pour une reprise de la navigation vers le mois d'Avril, après la mauvaise saison.
Toujours de très chouettes rencontres, que ce soit des Français où l'échange est plus facile ou des étrangers: nous sommes surpris par nos progrès en Anglais... On arrive à causer... certe pas encore de la philosophie, mais on échange! Ce sont vraiment les rencontres que nous faisons qui nous changent le plus de notre vie de "terrien".
Le bateau c'est vraiment un style de vie avec une entraide que l'on ne trouve pas ailleurs, des rencontres, des découvertes car l'on va toujours dans l'inconnu, des fois des galères quand la météo est difficile... Ce qui est étonnant c'est la facilité et la rapidité d'oubli des galères pour nous tout au moins.
Il semblerait, d'après les discussions que nous avons eues, que ceux qui ne se font pas à cette vie ne pensent qu'aux galères et que ceux qui les oublient vite sont faits pour cette vie...
Doucement le vent se calme. Nous sommes surpris de voir le plan d'eau tout lisse. Cela fait cinq jours que cela souffle fort... Nous apprécions. Il faut penser au départ, je reprends la météo sur différents sites: ils sont tous d'accord, il semble qu'il fera beau sans trop de vent...
Nous préparons le bateau, eau, électricité full, les niveaux moteurs sont bons, les courroies bien tendues.
Mardi on se lève relativement tôt, on part! Nous larguons les amarres à 9h et quittons cet endroit inconnu il y a encore une semaine et qu'aujourd'hui nous aimons, qui nous est devenu familier, comme tant d'autres...
Nous reprenons le chenal sur 2 nautiques. Il est bordé de marais salans, de pêcheurs à pieds qui cherchent des coquillages, de petites maisons multicolores sur pilotis ... Le plan d'eau est "miroir", pas une ride sur l'eau. C'est magnifique avec ces grandes montagnes en arrière plan.
Direction plein Est à la sortie vers le pont de Patras, plus grand pont suspendu du monde, 2252m, 4 piliers et 45m de tirant d'air sur l'arche du centre (on peut passer avec un mât de 45m). Nous le voyons bien maintenant, le vent est toujours pratiquement nul mais nous sommes méfiants. Les bateaux copains nous ont tellement raconté de choses affreuses sur cet endroit, à qui aura eu le plus de vent, de courant... Bertrand y a pris 45 noeuds...
Ce détroit est un rétrécissement de 1852m de large entre le Péloponnèse et la Grèce continentale. Effet d'entonnoir garanti pour le vent, pour le courant... et souvent 40 noeuds de vent!!! Nous avançons doucement au moteur, toutes les voiles sont rentrées au cas où... En général nous laissons toujours la grande voile quand nous avançons au moteur. Cela permet de stabiliser le bateau, de moins "rouler" de gauche à droite, puis cela permet toujours de gagner quelques dizièmes de noeuds, voir un noeuds ou deux... Ce qui fait souvent la différence quand on arrive au mouillage car les derniers arrivés n'ont que les mauvaises places, voir pas de place du tout...
Vanessa appelle à la radio à 5 milles du pont. Elle est devenue la spécialiste des communications en Anglais. J'ai surtout remarqué qu'en général ce sont des hommes qui répondent et ils sont beaucoup plus gentil avec une voix féminine... J'en connais au moins un qui va me retraiter de "gentil enfoiré"... (c'est un message personnel).
Le pont grandit vite, tout blanc, on dirait qu'il est tenu par plein de ficelles, c'est assez impressionnant comme ouvrage. Le vent monte d'un coup à 3 nautiques du pont, 15 noeuds, puis 20 noeuds bien de face comme d'habitude. La mer blanchie. Vanessa confirme notre passage: on nous demande de passer sous l'arche centrale car nous avons 22m hauteur de mât: deux piles à gauche, deux piles à droites. Nous devons répéter à la radio pour être bien sur d'avoir compris.C'est simple comme technique mais même les simples d'esprit peuvent passer le pont. Nous en sommes à 28 noeuds, environ deux noeuds de courant contre nous. On mesure la vitesse du courant en comparant la vitesse donnée par le GPS et la vitesse donnée par les instruments du bateau: il y a une petite roulette sous la coque qui tourne en fonction de la vitesse par rapport à l'eau. Deux noeuds en moins au GPS. Je pousse un peu les moteurs. Voilà nous sommes dessous. Je regarde quand-même le haut de mât...
Trois nautiques après le détroit s'élargit, le vent tombe progressivement. Heureusement nous ne battrons pas le record de Bertrand mais on passe de zéro vent à 25 noeuds d'un coup... puis retour à zéro! Cette mer elle est vraiment étonnante...
Cap sur Trisonia, petite île sur la côte du continent, il parait que c'est sympa. Toute la route au moteur, pas de vent... Petit chenal d'accès assez étroit. La carte du GPS nous indique que l'on est sur la terre alors que nous sommes en plein milieu du chenal: la carte est fausse... Cela rassure toujours... Nous rentrons dans le port, plein de place, super. Nous voyons deux mâts sortir de l'eau en plein milieu du bassin: il y a un bateau coulé depuis de nombreuses années... Seuls les deux mâts dépassent... Toujours sympa de voir cela... Nous accostons en marche arrière, Vanessa attrapant les bites d'amarrages au lasso comme un vrai cow-boy! Voilà, nous sommes à quai.
C'est toujours un moment très chouette quand on éteind les moteurs. D'abord parcequ'il faut bien 1/2h entre la préparation du bateau (mettre les parre-battages, préparer les amarres) et la fin de l'accostage (réglage des parre-battages, réglage des amarres, mise en place des amarres croisées si on est cul au quai, mise en place de la passerelle, branchement au réseau élèctrique, à l'eau...). Puis c'est toujours la découverte d'un nouvel endroit, de nouveaux copains peut-être, puis on ne sait jamais si l'on aura de la place... C'est presque l'aventure...
Il y a deux façons de s'amarrer: soit "along side", c'est à dire parallèle au quai soit perpendiculaire au quai avec le cul au quai. En France il y a des pendilles (amarres accrochées à une chaîne dans l'eau que l'on met sur l'avant du bateau).
En Grèce c'est un peu original: il faut jeter son ancre puis reculer jusqu'au quai. là il me manque toujours une main: j'ai les deux manettes de gaz et le bouton de mise à l'eau de l'ancre à gérer... Là Vanessa met deux amarres sur le quai, une à l'arrière de chaque coque, qui bloquent le déplacement du bateau en avant puis on tire sur la chaîne de l'ancre pour s'éloigner du quai. L'ancre empêche le bateau de reculer et de venir tapper le quai. Ensuite on met deux amarres croisées sur le quai (celle de la coque bâbord se met sur le quai au niveau de la coque tribord et inversement) pour bloquer les mouvements latéraux du bateau (gauche-droite). Pas très facile au début car il faut reculer bien droit, s'amarrer sur le quai bien en face de son ancre. Quand il y a du vent le résultat n'est pas garanti... Souvent il y a des chaînes d'ancre qui se croisent et là c'est très folklorique: en partant le voisin relève ton ancre... et ton bateau n'est plus retenu dans le sens arrière et vient tapper contre le quai! C'est pourquoi on met des pare-battages à l'arrière. C'est arrivé à Thomas à Zakynthos... Heureusement je l'ai vu et j'ai pu le prévenir! C'est donc un bon petit boulot mais le bateau est en sûreté et l'apéro ensuite n'est pas volé!
En Grèce s'il y a de la place à quai on s'y met. C'est simple. Quand on arrive de France ou d'Italie cela étonne beaucoup: en Grèce les ports sont très peu chers, voir souvent gratuits! C'est une politique qui fait que les plaisanciers dépensent à terre: il vaut mieux payer un resto qu'une place de quai... En France c'est 80 Euros par nuit en moyenne, en Sicile à Palerme un port m'a demandé 240Euros... Et en basse saison nous avons payé en moyenne 60 euros par nuit....! Ici cela a vraiment l'air super: on m'avait prévenu mais j'avais du mal à le croire... Comme dit le proverbe "Chat échaudé craint l'eau froide"...
Ballade sur l'île de Trisonia qui est pleine de charme. Petit resto local, 24 euros à trois avec le vin... et le quai est gratuit. Superbe soirée peu honéreuse... Mais rentrée douloureuse pour Vanessa qui en regardant un peu trop l'intérieur d'un bateau, dans la nuit n'a pas vu l'escalier qui descend dans l'eau sur le quai... et s'est retrouvée allongée en bas, les quatre fers en l'air, sans chaussure... mais toujours sur le béton: l'eau n'était vraiment pas loin... comme elle tenait Adrien par la main il a valdingué aussi, mais est resté sur le quai! Des hurlements pour Adrien, quelques écorchures, beaucoup de bleus... et du mal à rentrer au bateau avec une démarche de "petite vieille". pour Vanessa...! C'est pas bien de regarder dans les bateaux...
Nous continuons notre route le lendemain, beaucoup de moteur car pas de vent... et arrivée à Corinthe à 17h. Le port de plaisance est minuscule, impossible d'y aller pour nous. Nous appelons le port de commerce sur la VHF mais il semble être trop tard, pas de réponse. Alors selon la coutume Grecque nous nous amarrons où il y a de la place, cul à quai, juste à côté du port de commerce en plein centre ville! C'est la Grèce... On commence à savoir faire. On descend à terre: ville moderne, des voies piétonnes partout, de très beaux magasins... Agréable. Nous y resterons deux jours et personne n'est venu nous demander quoi que ce soit.... Juste le temps d'aller visiter les ruines de la Corinthe antique en compagnie de pélerins. C'est là que Saint Paul séjourna et écrivit sans doute sa "lettre aux Corinthiens" dont on entend souvent des extraits dans les cérémonies catholiques. Puis Adrien va chez le coiffeur pour la première fois de sa vie... devant ses parents encore plus béats que jamais... C'est quand-même une étape!Un salon spécial enfants avec des manèges!
Vendredi 6 novembre nous entamons la procédure de la traversée du canal de Corinthe: Vanessa contacte par radio, on se positionne devant l'entrée, "rappeler à un mille de l'entrée", on laisse sortir un cargo et coup de chance pas d'attente: on est les derniers du convoi de trois bateaux et on nous demande d'accélérer: "SMILE full speed!" Pas de problème! Manettes à fond. Entrée dans le canal en passant entre deux jetées qui donnent tout de suite la dimension: 25m de large! J'arrive là dedans à 8 noeuds et cela semble très étroit... le feu est vert, on s'engage. On passe un pont qui s'immerge lorsque les bateaux passent. Nous le voyons sortir de l'eau juste derrière nous. Original. Le canal est très étroit, les 25m annoncés semblent très optimistes. Il a du rétrécir... Les falaises de chaque côté commencent à s'élever. Je me fais rappeler à l'ordre par radio car je ne vais pas assez vite! On fait un peu touriste dans le décor... Dans les instructions nautiques la vitesse dans le canal est limitée à 6 noeuds, je suis à 5! Bon je passe à 7... Ils sont contents... Nous passons sous trois ponts qui sont à 80m au-dessus de nos têtes... En moins d'une demi-heure les 3,2 milles sont franchis et nous sommes en mer Egée... Pas si compliqué finallement mais c'est grandiose! On s'amarre "along side" puis Vanessa va payer les 211 euros du droit de passage pendant que je discute avec un équipage qui ramène des Sables d'Olonnes à Athènes un Lagoon 40. Ils semblent avoir souffert... Ils me donnent plein de tuyaux sur les Cyclades en visitant SMILE. Leurs "Nice, Nice..." résonnent encore dans le bateau. Merci Roberto. Belle rencontre trop brève.
Nous mettons le cap sur l'île d'Aegina. Nous somme entourés d'énormes pétroliers qui attendent pour décharger à la raffinerie voisine de la sortie du canal. Le vent nous est favorable, 7 noeuds de travers. Sous grand voile et code 0 nous filons 6 noeuds sur une mer totalement plate. Le bonheur! C'est vraiment bon de retrouver les voiles après nos deux jours de moteurs... J'ai horreur du moteur en voilier même si je reconnais que c'est très pratique... Les pétroliers deviennent vite minuscules et on ne voit plus la raffinerie. Nous nous balladons entre les îles et les fermes à poissons cachées dans chaque recoin: le paysage a vraiment changé. Il y a des îles partout, plutôt arides et rocheuses, des petits bateaux de pêcheurs... Vers le Nord nous devinons Athènes au nuage de pollution... Le vent tombe et nous finissons au moteur en regardant un hydroglisseur passer à 30 noeuds: Athènes est tout prêt. Nous contournons un haut fond puis prenons la dernière place du quai de Perdika, petit village de pêcheurs avec l'aide des voisins Anglais. Des maisons blanches avec des volets bleus, des restaurants et des bars le long du quai, des bateaux de pêcheurs... Presque la carte postale! On a l'impression d'être en vacances! Merci Roberto pour l'adresse.
Adrien est bien enrhumé, un coup de vent est prévu sur les Cyclades: deux évènements qui nous engagent à rester quelques jours dans ce petit port, 5,20euros pour trois nuits... C'est juste la taxe communale. L'imprimé et le déplacement du fonctionnaire doivent coûter plus cher...
Ce midi Vanessa a eu toute sa famille sur Skype, outil magique quand on voyage comme nous. Elle a eu l'impression de participer un peu à la réunion familialle et Adrien était comme un fou devant l'ordinateur. Des moments supers!
Cet après-midi opération nettoyage annexe: je refais le plein d'essence, vérification du niveau d'huile, nettoyage à l'eau douce... en Grèce c'est un luxe: l'eau douce est une denrée déjà rare... Le bateau en face de nous part, remonte sopn ancre et se retrouve avec un énorme paquet de chaines emmélées sur son ancre... Le guindeau (le moteur qui remonte l'ancre) est puissant car il a résisté... et a tout remonté! Une bonne centaine de kilos...au moins! Mon annexe est à l'eau je ne peux faire moins que d'aller les aider... avec mon annexe toute propre... qui se retrouve maculée de vase en trente secondes! Mais j'arrive avec quelques bouts passés sous les chaines à libérer l'ancre... après 30mn d'efforts! J'ai tous mes doigts et c'est une bonne leçon.... il ne me reste plus qu'à renettoyer l'annexe...
Nous avons découvert la taverna Remetzo. On va choisir son poisson, on le pèse et on connait le prix. On choisit son mode de cuisson (grillé!). Absolument délicieux!!!! Pour moi poulpe grillé...
La bouffe est vraiment importante dans la découverte d'un pays, tout au moins pour nous. C'est extraordinaire de manger les produits locaux frais. La cuisine Gréque est simple: ce sont des produits frais assemblés plus que cuisinés mais c'est très bon... sauf pour la ligne! Ils abusent un peu du gras à notre goût et on fait quelques cures "légumes" sur le bateau après deux ou trois restos... De plus les prix sont très bas par rapport à chez nous (Nouméa), on mange à trois pour jamais plus de 35 euros sans se priver, avec vin à volonté... Les retours au bateau sont souvent difficiles... et même sans vent il y des fois du roulis au louillage, voir au quai!!!
Aujourd'hui pas de vent, petite étape moteur de 8 nautiques pour changer de port: nous sommes à Poros, petite île collée à la côte Est du Poloponnèse. Nous sommes amarrés "alongside" en plein centre ville de la "capitale", dans un petit chenal entre le continent et l'île de Poros: le rêve... Désolé de vous faire mal mais on ne peut pas imaginer la Grèce à cette saison, c'est à dire avec personne sauf nous et un soleil magnifique, mer d'huile... Nous avons mangé ce midi au resto qui est juste de l'autre côté de la route par rapport au bateau: calamars frais grillés, crevettes tomate-fetta et frites avec un petit vin blanc local... Vue imprenable sur notre bateau... Je vous raconte pas! Incroyable...
Demain petit coup de vent quand-même pour nous rappeler que l'on est en hiver. J'ai doublé les amarres et normalement mercredi fenêtre météo correcte pour notre dernière traversée de 50 nautiques. après il ne restera plus que des sauts de puces à faire...Il nous reste 185 nautiques à parcourir pour aller hiverner le bateau en Turquie.
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