Traversée vers l'Archipel de Madère
D'Albufeira sur la côte sud du Portugal à Porto Santo dans l'archipel de Madère : 458 miles en ligne droite
Dimanche 4 septembre 2016 : L'été se termine. Il est temps de descendre vers le sud avant les premières grandes dépressions d'automne. C'est Max aux commandes. Je me paye la corvée des pare-battages et le lovage des amarres. Il fait une chaleur d'enfer et j'ai hâte d'être en mer pour trouver un peu de fraicheur! Nous partons pour l'archipel de Madère qui se compose de deux îles habitées, Madère et Porto Santo, et des îles et îlots protégés par le statut de réserve naturelle, les îles Desertas proches de Madère et Selvagens, un peu plus loin, à mi chemin des Canaries. Ce petit archipel est très visité, y compris par les bateaux en partance pour les Caraïbes (850 voiliers environ chaque année s'arrêtent à Porto Santo). Les places sont rares dans les marinas.
11h20 à Albufeira : moteur et mise en place du Code D (c'est un Gennaker assez polyvalent). La météo promet du vent faible et variable sur la côte de l'Algrave, la mer est belle. Nous avons fait un routage avec un grib de vent sur plusieurs jours et consulté plusieurs sites météo. Tous annoncent un temps maniable même sans vent par moments. Le routage nous annonce une arrivée pour le 8 au petit matin. Navigation tranquille par un vent de 10 noeuds au début, que nous exploitons au maximum avec le code D. Vitesse fond 4 à 6 nœuds.
A 17h, enfin un peu d'activité ! Le dévidoir de la ligne de traîne s'emballe ! Une touche ! Une vraie ! Pas une algue ou un plastique non une vraie touche. C'est un petit thon Albacore qui nous regarde de son bel œil noir. Mais la chaîne alimentaire fait qu'il passe de vie à trépas. Nous en ferons 8 belles parts en levant les filets, 6 dans le congélateur et 2 pour le soir.
A 19h, le soir s'annonce et nous passons le Cap Sao Vicente au sud du rail qu'empruntent les cargos. Il y en a peu, mais c'est vrai, certains sont très gros, et ils arrivent vite !
A 21H, premier quart de nuit. Nous avons choisi des quarts de 4 heures, c'est notre rythme. Le cockpit bien protégé et l'alarme de proximité de l'AIS en marche facilitent la veille. Beaucoup de plancton phosphorescent dans les vagues d'étrave. Beaucoup d'étoiles dans le ciel. C'est beau ! La mer est belle, le vent ne devrait pas trop forcer. Nous avons gardé le code D et atteignons 7,5 noeuds avec 15 noeuds de vent.
Au matin du lundi 5 septembre, le vent force et nous arrivons à la limite d'utilisation du code D, la gîte 20 à 25° est sensible. Notre voilier marche mieux quand la gîte ne dépasse pas 15°, et de plus, c'est plus confortable.
A 8 h, nous roulons le code D et passons sous génois.
A 12h, nous avons parcouru 148 miles sur les dernières 24h. Le bateau marche bien, nous sommes contents. Il nous reste environ 370 miles à faire en ligne droite.
Le soir, un peu avant 19h, le vent tombe. Moteur. Mer belle, presque pas une ride.
Nous garderons le moteur jusqu'au lendemain matin 9h. Nous ferons quelques tentatives de voiles, mais le vent est trop faible ou carrément absent, conformément au grib de vent. Ces tentatives seront surtout des exercices pour nous faire faire quelque chose et rompre la monotonie du moteur.
Le mardi 6 à 9h30, le vent n'est que de 6 noeuds au près serré, mais la mer est plate et nous remettons GV et Génois et coupons le moteur : 4,5 nds sur le fond ! Un courant nous aide peut-être, mais notre bateau aime bien le près.
Puis au cours de la journée du 6 septembre, le vent va se renforcer peu à peu. A 21h, pendant son quart, Guylaine prendra même un ris dans le génois, qu'elle relâchera dans les minutes suivantes. La mer est belle et la caresse du vent lui donne la chaire de poule. Le bateau glisse sur l'eau et nous renvoie le bruit de l'étrave qui fend la mer.
L'alternateur d'arbre d'hélice nous fournit du courant qui étale toute notre consommation : frigo, congélateur, pilote, instruments et feux de navigation. Ceci dès que nous dépassons 5 noeuds, c'est une merveille !
Le Mercredi 7, le bateau marche bien, mais le barillet de la clé de mise en marche de l'alternateur d'arbre d'hélice est bloqué. La clé ne peut plus tourner et l'on ne peut plus éteindre cet alternateur. Nous ne pouvons plus mettre en marche le moteur sous peine d'un conflit entre les alternateurs et le risque d'en griller un. Le manuel du propriétaire est formel ! A 4 h du matin, nous débranchons donc un fil derrière le tableau électrique pour couper le contact de l'alternateur d'arbre d'hélice. L'opération faite à la lampe électrique se passe bien : Aucune vis n'est perdue et nous ne faisons aucun court circuit (nous avions tout gardé sous tension pour rester en marche sous pilote, et nous éviter de mettre en panne).
Nous arrivons aussi à cette heure là, sur un vaste haut fond, "Seine Seamount", qui remonte brusquement les fonds de plus de 4000 m à moins de 200 m. La mer est belle, d'un bleu profond mais il fait nuit, il est difficile de se rendre compte si la mer lève sur ce haut fond et l'on change de cap pour ne pas risquer de se trouver en zone dangeureuse. Cela rallonge un peu la route, mais c'est bien ainsi car nous ne voulons pas arriver de nuit à Porto Santo que nous ne connaissons pas, les filets et engins de pêche vus sur la côte du Portugal nous ayant donné envie de voir clair à leur approche.
A 8h, le jour s'est levé, la mer ne présente aucun signe de vague particulière, et nous reprenons notre cap direct vers Porto Santo en rasant le haut fond, ligne de traîne à l'eau, pour tenter d'attraper un poisson. J'ai mis le frein assez serré car j'espère un "gros". Mais rien !
Le vent adonne et nous mettons à nouveau le code D à 11H. Vent 7 nds, vitesse fond 4 nds.
La journée se passe ainsi très tranquillement.
Max relève la ligne à 19h30 comme il le fait chaque soir. Cette fois ci, il le fait un peu désabusé car il n'y a eu aucune touche de toute la journée. Et, surprise ! Une dorade coryphène est au bout, traînée sans doute depuis des heures, le frein du tambour de ligne très serré a empêché le fil de se dévider et de voir la touche. Heureusement, le fil n'a pas cassé. La dorade est petite, et nous n'en ferons que 4 belles parts. Congélateur !
20h00 des dauphins !Toute une quiriade de dauphins mouchetés jouent dans l'étrave et nous pouvons les filmer ! Nous ne connaissons pas cette race que nous voyons pour la première fois. Si vous, vous savez merci de nous le dire (voir film).
A 22h, le vent est complètement tombé à nouveau : moteur, pour toute la nuit, jusqu'à l'arrivée.
La mer est lisse, le ronron du moteur régulier, on passe une bonne nuit (en assurant quand même les quarts comme d'habitude).
A 1h du matin le 8 septembre, on devine des lumières à l'horizon dans la direction de Porto Santo.
A 2h, le phare à 3 éclats 15 s de l'Ilheu de Cima est bien visible. C'est une petite île qui touche l'ouest de Porto Santo et que nous devons laisser sur tribord. Il reste 22 miles.
A 3h30 Porto Santo se distingue bien aux jumelles. Il ne reste plus que 15 miles jusqu'au phare, avant de pouvoir virer l'île. Derrière il y a le port et la grande plage de Porto Santo (6 km de long et seule plage naturelle de l'Archipel). Une belle étoile filante passe dans le ciel à ce moment.
Nous ralentissons pour ne pas arriver trop tôt.
A 5h, Guylaine vient prendre son quart. Je reste avec elle voir l'arrivée sur l'île, les paysages qui se découvrent peu à peu. On se rapproche, le ciel s'éclaircit, les détails s'affirment. Le moteur est ralenti pour arriver au port au jour.
Marina ou mouillage devant la plage ? Mais il faut faire les papiers d'arrivée et c'est la marina qui est choisie.
Quand on y rentre, le jour se lève à peine. La marina semble pleine mais il y a une zone de mouillage dans l'enceinte du port. On se prépare à mettre l'ancre. Cette fois, c'est l'ancre qui n'est pas prête car pour la marina, ce sont les amarres et les pare-battage qui étaient en place !
Au moment de descendre l'ancre, un bateau quitte la marina : une place !
On remonte le peu de chaîne descendu et l'on va prendre cette place inespérée.
A 8h l'amarrage est terminé.
Nous sommes jeudi 8 septembre 2016. Nous sommes à Porto Santo. Le jour se lève sur une belle journée.
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