De Lanzarote à Gran Canaria

De Lanzarote à Gran Canaria

Posté par : Tanguy
17 Diciembre 2013 à 23h
Última actualización 31 Diciembre 2014 à 12h
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Nous laissons donc nos invités prendre l'avion vers Gran Canaria et la Belgique, et profitons encore un peu de la marina avant de nous préparer à une traversée sans histoire. Nous ne voulons pas partir trop tôt: il n'y a que 90 milles à parcourir, et vu le vent annoncé, ça devrait être bouclé assez rapidement, ce qui implique que nous risquons d'arriver avant la fin de la nuit.

Nous partons au coucher du soleil, grand-voile haute et génois plein, avec presque pas de vent, mais venant juste de la bonne direction. Le bateau est bien appuyé et nous glissons sur l'eau en silence. Pas très vite, moins que prévu, mais presqu'aussi vite qu'au moteur, le bruit et les gaz en moins. Seul le reliquat de houle qui nous a dérangés la veille vient troubler ce bel équilibre, pas suffisamment cependant pour être inconfortable. La lune couchée, le ciel s'emplit d'étoiles et la mer de plancton luminescent. C'est amusant: chez nous ce sont des myriades de petites étoiles qui s'éloignent dans le sillage du bateau, ici ce sont de gros amas qui lancent des éclairs. On distingue maintenant au loin le feu blanc d'un autre voilier, et deux autres qui pourraient peut-être aussi en être, difficile à dire. Les enfants insistent pour tenir le quart. Maxence prend le premier, de 20 à 21 heures, suivit de Théodore, de 21 à 22.30. Soizic ne se réveillera pas pour le changement de quart des adultes à 23 heures, ce sera pour une autre fois. Pendant son quart, Anne-Sophie dépasse le voilier que nous avions vu, Tanguy se réveille avec un grand sourire, chassez le naturel... Même en croisière, et même si Boomerang est rapide de nature et qu'il n'y a pas beaucoup de mérite à dépasser les autres, ça fait toujours naître un petit sentiment de satisfaction qui, tout compte fait, n'est pas désagréable. Tanguy reprend donc le quart, le vent adonne, mollit, on se met en ciseaux, les voiles battent dans la houle, la vitesse chute, il faut empanner, ça ne fonctionne pas, on repasse de l'autre côté, ça ne va pas mieux, il faut gréer une retenue, puis le vent revient... au changement de quart. Il est cinq heures, avec tout ce raffut, Anne-Sophie n'a pas dormi, pfff. Et en plus, en plus, l'autre bateau nous a dépassés!!! Pas possible! Tks, tks, Tanguy n'est pas fier de sa performance, mais bon, c'est comme ça. Et puis de toute façon, on n'est pas en régate, alors... Mauvaise foi, quand tu nous tiens ;-)

Anne-Sophie reprend le quart, le vent refuse un peu, puis encore, puis encore. Elle borde, elle borde, et les 3 noeuds deviennent 4, puis 5, puis 8! Le jour se lève, on sort les lignes de traîne.

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A neuf heures, non seulement on a dépassé le bateau que nous pourchassions, mais en plus, on gagne sur les deux autres. Oui, ce sont bien deux voiliers, et on s'en rapproche très vite. Les 8 noeuds deviennent 9, puis 10, on file, on sera à Las Palmas avant midi!

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On les rattrape, on les dépasse. Peu de mérite, ce sont des bateaux plus solides que rapides. Mobilis, entrevu à Graciosa et Arrecife, nous reconnaît. Des dizaines de dauphins nous accompagnent. On remonte les lignes, on sort les appareils photos et les caméras, on se photographie mutuellement... et il est temps de préparer l'arrivée.

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Photo Chintouna.

Enrouler le génois, démarrer les moteurs, affaler la grand-voile, préparer amarres et pares-battage, prendre contact avec la marina, contourner un énorme porte-containers qui évite en plein milieu de l'avant-port, se faufiler sans interférer dans les régates du dimanche, et entrer dans la marina... pleine à craquer! Plus de 800 (!) bateaux, dont un bon paquet attendent que le vent tourne pour traverser l'Atlantique, et se préparent au coup de vent annoncé pour les prochains jours. Heureusement que nous avions réservé...

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La marina nous impose une place sur pendille, que nous hésitons à prendre. Le vent – 15 nœuds, plus dans les rafales – est de travers, la place est étroite, il n'y a pas beaucoup de recul, le dernier exercice du genre qui remonte à deux ans s'était terminé très moyennement: la manœuvre s'annonce scabreuse. Pour arranger le tout, les voisins sont tous plus grands, plus beaux et plus brillants que Boomerang. Valse hésitation, mais quand on apprend que l'alternative, c'est d'aller ailleurs, où il n'y a pas nécessairement de place pour nous, on se décide, après avoir reçu l'assurance de l'assistance d'un zodiac et d'une personne sur le ponton. Tout se termine bien... deux heures plus tard! Le temps de changer les amarres, de faire la manœuvre, puis de les fixer juste comme il faut en prévision du gros temps à venir, et l'heure du déjeuner est largement passée! On sait quand on part, jamais quand on arrive ;-) On apprendra plus tard que les autres voiliers avaient fait l'essentiel de la traversée au moteur, et qu'ils ont pêché plusieurs thons!!! On ne peut décidément pas tout avoir...

Le coup de vent arrivera comme prévu. Boomerang, suspendu à ses amarres et pendilles, est parfaitement protégé. Ce n'est malheureusement pas le cas de tout le monde: la houle de sud-est rentre dans le port, certains bateaux doivent être déplacés, entassés dans une partie plus protégée du bassin. D'autres restent à leur place, mais équipages et matériel vivront des jours difficiles. Au mouillage juste derrière le port, un bateau rompt son filin, dérive et va s'échouer sur la plage, heureusement sans faire de dégâts aux autres voiliers mouillés aux alentours. Il sera rapidement renfloué et amarré au port.

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De notre côté, nous passons tout ce temps à bord du bateau, Tanguy sur d'autres ou aux shipchandlers: la bricolite aigüe est de retour, et nous retrouvons ici de nombreux équipages croisés sur notre route, comme à Camarinas ou Vigo, ou plus récemment sur Lanzarote. L'occasion de retrouvailles, de partages, et d'échanges de vues sur le matériel et/ou sur les prochaines étapes. On découvre que l'hydro bénéficierait d'une goupille qui permettrait d'épargner ces pauvres manilles textiles qui ne sont pas faites pour ça. Bonne nouvelle: elle est disponible en magasin juste à côté. Mauvaise nouvelle: en fixant le prix, ils ont dû la croire en or, pas en inox. Il va falloir bricoler...

NB: Petit lexique du plaisancier modèle

Adonner: pour le vent, s'éloigner du cap suivi par le bateau. C'est en général une bonne nouvelle, sauf quand il vient déjà de trois-quart arrière, auquel cas le bateau ralenti.

Mollir: pour le vent, diminuer.

Mettre les voiles en ciseaux: Mettre une voile d'un côté du bateau, une autre de l'autre. En général, il s'agit de la grand-voile et du génois, mais sur Boomerang, on a constaté que ça fonctionne très bien avec le couple génois/trinquette.

Trinquette: voile d'avant située en arrière du génois.

Empanner: passer le lit du vent quand celui-ci vient de l'arrière. La manœuvre est délicate par vent fort, la bôme passe rapidement d'un côté à l'autre, il ne faut pas être dans son chemin.

Gréer: installer de l'équipement

Retenue de bôme: Cordage qui empêche la bôme de passer d'un côté à l'autre de manière imprévue. C'est surtout utile vent arrière dans la houle.

Border: pour une voile, tirer sur son écoute pour la régler. Le contraire, c'est choquer. Dans le cas d'une drisse, le cordage qui sert à hisser la voile, on utiliser le terme étarquer.

Lignes de traîne: Lignes de pêche accrochées au bateau et qu'on laisse traîner en espérant que ça morde un jour. L'espoir fait vivre.

Pendille: système d'amarrage beaucoup utilisé en méditerranée. On rentre en général en marche arrière, d'où l'on passe deux à quatre amarres au ponton/quai, et on s'attache à l'avant avec une ou deux amarres qui attendent patiemment au fond qu'on les utilise, les pendilles. Elles sont le plus souvent pleines de coquillages qui n'attendent que de pouvoir couper les mains rendues humides par la navigation, et poisseuses de vase qui n'attend que de s'introduire par lesdites coupures. En plus, on en met plein le pont, on adore! L'avantage, si, si, il y en a un, c'est qu'une fois installé, il n'y a pas grand chose qui peut arriver au bateau.

Ubicación

Je continue à suivre avec impatience et intéresse vos progrès - et avec les lexiques du plaisancier que vous venez d'introduire, ça me permet même d'apprendre un peu de Français nautique. Que du bon donc. Beaucoup de plaisir souhaité pour le passage de la grande piscine profonde qui vous attends maintenant... A+, DD

Merci merci heureux de vous voir bouger .. Que de boulot a bord´..... Felicitations aux jeunes barreurs . Et vos nouvelles sont tres amusantes ! A quand la grande traversee...?

Merci beaucoup pour le bon récit; je viens de tout découvrir d'ici: Austin (TX). Je vous souhaite du tout bon. Quelle est la prochaine destination? Je transmets le lien à David et Cathi, à Christophe et Marie Alix. Grand hugh. Jacqueline.

Nous vous remercions pour votre récit détaillé et soigné. Nous vous souhaitons un très joyeux Noël et une excellente année 2014. Nous pensons bien à vous, gros bisous Blanche et Etienne

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