Spip reprend la mer... vers l'Ouest !
23 octobre 2015, 4h30, nous débutons notre long périple de retour vers les Antilles : Pascale, ma cousine qui habite Genève, vient nous chercher à Sallanches pour nous emmener à l'aéroport. EasyJet nous transporte jusqu'à Londres où Caribean Airlines prend le relais et nous achemine à Trinidad. Nous partageons un taxi avec un couple de français rejoignant aussi son bateau et arrivons au chantier vers 19h 30 locale soit un peu plus de 20 heures après avoir quitté la Haute-Savoie où une première chute de neige nous avait averti que l'hiver approchait.
Nos amis de Bilbo, Domie et Domi, ont la gentillesse de nous accueillir alors qu'ils repartent à l'aube le lendemain pour le Canada. Nous ne les avons pas revus depuis le Brésil et nous avons tant de choses à échanger que la soirée se prolonge assez tard... avant que nous retrouvions notre couchette à bord de Spip perché sur ses béquilles et plein de moisissures.
Après les inévitables formalités de douanes - particulièrement fastidieuses à Trinidad - sous une chaleur accablante et lourde (nous mesurerons jusqu'à 40 degrés sous l'auvent !), nous commençons par un grand nettoyage du bateau. Débutent ensuite les menus réparations indispensables avant de reprendre la mer : mise en place et test de la balise Dolink, ferrures de capots, annexe, etc.
Nous trouvons sur le chantier, tous les corps de métier pour faire faire quelques travaux plus conséquents. Andy et son équipe nettoient et polissent la partie émergée de la coque puis mettent à nu la partie immergée de Spip avant de passer trois couchent d’apprêt puis trois couches d'antifouling. Carlos, un sellier, renforce les coutures et change les plastiques transparents de notre capote mis à mal par le soleil caribéen. Un menuisier refait les entourages de capots du carré tandis qu'Anthony change les plexiglas qui devaient avoir l'âge du bateau...
Je profite de l'élévateur du chantier pour me faire hisser au sommet du mât afin de vérifier l'enrouleur de foc et l'état du gréement. De ce côté là tout va bien mais surprise les plexi en couleurs des feux de mâts (qui permettent de signaler le bateau la nuit que ce soit au mouillage ou en mer) ont disparus sans que nous en trouvions la raison. Le grutier accepte de me remonter pour en mettre un neuf heureusement trouvé chez le marchand d'accastillage local !
Nous passons quelques soirées fort agréables avec nos copains qui « hivernent » sur le chantier : Sylvie et Laurent sur Ovéa ainsi que Caro et Philippe sur Yvadel. Sonia et Brice nous invitent à fêter Halloween avec leurs deux enfants, Awen et Arthur, et les équipages des bateaux voisins de leur Chintouna.
Katia se charge de quelques allers-retours en bus au supermarché pour refaire un peu d'avitaillement : nous allons, pendant près d'un mois, naviguer dans des zones peu habitées. Il vaut donc mieux prévoir...
Remise en place des voiles, nettoyage du pont, vérification du moteur, plein d'eau : le 11 novembre nous remettons à l'eau un Spip tout beau, tout propre ; effectuons les formalités de sortie et profitons du « duty free » pour faire le plein de bières et de rhum.
Le lendemain nous levons l'ancre à 5 heure du matin, en compagnie de Chintouna, pour rallier Grenade et des eaux plus calmes et plus propres que celle de cette grande baie de Chaguaramas où chantiers navals, remorqueurs en tout genre et navires avitailleurs des plates-formes de forage polluent à qui mieux-mieux.
Un petit vent d'Est, force 4, et une mer peu agitée attisent notre plaisir de retrouver le large. Première pêche de la saison : un petit baracuda de 50cm ! 14 heures plus tard et 80 milles plus au nord nous jetons l'ancre à Prickly Bay sur la côte sud de Grenade. Nous allons retrouver un peu de fraîcheur et nous débarrasser des moustiques !
C'est là qu'un SMS sibyllin de Joël, le frère de Katia, nous laisse penser que de graves événements se passent à Paris. Un coup de téléphone satellite à Florent et Amélie nous rassure mais nous apprend l'ampleur de la tragédie... Depuis le bar de la marina toute proche, nous envoyons quelques méls pour prendre des nouvelles de mon frère et de nos amis parisiens. Difficile de comprendre une telle folie alors que, comme nous le voyons chaque jour autour de nous, le monde est si beau et si paisible...
Une petite virée à Saint-Georges en taxi collectif, quelques achats chez le boucher français qui s'est installé tout près de la marina il y a quelques mois, une soirée d'au revoir sur Chintouna qui va remonter vers le nord (merci Sonia pour la délicieuse pizza, Awen pour la jolie tortue en aquarelle, Arthur pour la présentation de ta collection de peluches et Brice pour l'excellent rhum vieux) et nous hissons les voiles le 17 novembre à 8h du matin pour profiter des prévisions météo favorables pour au moins les trois jours à venir.
Cap à l'Ouest : 300 milles à parcourir le long du 12 ème parallèle pour atteindre l'archipel vénézuélien de Los Roques situé à près de 150 kms du continent sud-américain.
Partis avec deux ris dans la grand voile et génois entier, nous envoyons finalement toute la grand voile et enroulons le foc difficile à gérer par plein vent arrière. Les 36 premières heures Spip file à plus de 6 nœuds de moyenne sur un océan peu agité avec une petite houle d'un peu plus d'un mètre qui suffit cependant à faire rouler le bateau.
Sous une belle demi-lune, la première nuit, en l'espace de deux heures, nous croisons 6 bateaux : une grosse vedette, un navire à passagers et 4 pétroliers. Nous sommes bien au large du Vénézuela !
Hélas le vent faiblit - un peu plus que ce que la météo nous avait annoncé - et nous contraint à mettre en route notre moteur. À l'aube du 19 novembre, le ciel s'est couvert et la pluie commence à tomber mais trois dauphins viennent nous remonter le moral.
Tout à coup des dizaines d'oiseaux se rassemblent autour de Spip alors que, un peu en avant de l'étrave, des poissons - sorte de petits thons - bondissent hors de l'eau chassant un menu fretin dont se régalent fous et frégates ! Bien sûr, je saute sur ma canne à pêche pour tenter d'avoir ma part du butin... Devant nous le manège va durer une heure mais, à l'arrière, peine perdue : il n'y a que deux fous pour se prendre les ailes dans le fil de nylon !!!
C'est sous un ciel plombé typiquement breton que nous apercevons les contours de Gran Roque, l'île principale. Katia à la carte, nous empruntons une belle passe entre îlots et récifs de coraux qui nous conduit au mouillage devant le village de Puerto Roque. Nous jetons l'ancre sur un fond de sable dans 4 mètres d'eau limpide d'un bleu de rêve !
Il est près de 11 heures : nous avons parcouru 310 milles en 51 heures. Deux voiliers sont au mouillage : des français auprès de qui je vais me renseigner sur les formalités d'entrée.
La chose ne s'avérant pas simple, nous décidons de récupérer un peu et de remettre au lendemain cette corvée.
À suivre donc... (mais vous pouvez toujours nous suivre au jour le jour sur Dolink !)
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