Nous en avions tant parlé, tant rêvé... Nous en avions tant vu partir, tant revenir... Et aujourd'hui nous  partons! Nous avons nous même du mal à y croire... Mais nous habitons maintenant sur le bateau, nous n'avons plus d'autre maison depuis 3 mois,  le frigo et le congélateur sont pleins, le bateau pour la première fois semble bien marcher, Vanessa est partie  mettre la voiture dans   son "garage", nous n'avons même plus de voiture ... Il n'y a pas de doute, nous partons...

Que de chemin parcouru, que d'épreuves plus ou moins surmontées  depuis que nous avons pris cette décision d'arrêter de travailler, puis de résilier le bail de location de l'appartement, puis de vendre les meubles, d'abandonner les souvenirs, les amis, les connaissances, les lieux familiers... Nous avons tout abandonné   pour acheter un bateau: il ne doit pas y avoir plus déraisonnable, plus ruineux, plus fou... Mais c'était plus fort que tout,  il fallait que nous   le fassions!  Il y a quelques moments dans la vie où une force  "supérieure" nous propulse vers   des voies  surprenantes... Cela a été notre cas!  Nous sommes aujourd'hui à la charnière : il y a l'histoire d'avant le départ et il y aura l'histoire d'après le départ...   Ces quelques mois de navigation nous ont déjà beaucoup apporté, que ce soit en problèmes techniques  ou  en joie d'être ensemble, sans heure, sans même savoir quel jour nous sommes car cela n'a aucune importance pour notre vie, pour notre bonheur quotidien.

Ce soir où je me retrouve seul à bord en attendant le  "premier  équipage" de l'aventure qui arrive demain (mon frère et sa femme),  ce dernier soir au chantier, sur ce quai de Canet en Roussillon que nous connaissons bien pour y être longuement resté, pour y avoir préparé le bateau, pour  y avoir "longuement" attendu les modifications (voir les réparations après quelques navigations)   indispensables à notre départ  je coupe le cordon ombilical avec  le chantier, je  crée ce blog, véritable naissance de l'aventure ,  pour expliquer à nos proches qui ne comprennent pas toujours et leur  permettre de nous suivre quand ils le voudront , voir  sans doute  peut-être les rassurer  sur notre sort...  puis partager  avec qui voudra, avec tout ceux qui n'ont pas pu partir.  

Voilà un résumé de notre histoire, texte que j'ai écrit à la demande du chantier pour son journal:

J'avais lu tous les livres sur le "grand départ" que j'avais pu trouver. Je pensais au  bateau que j'achèterais depuis des années. C'était presque devenu l'Arlésienne...
Nous avions arpenté avec Vanessa tous les salons nautiques de Sydney à Paris en passant par Lorient et La Grande Motte, les quais de Nouméa et d'ailleurs des centaines de fois en regardant les bateaux et ceux qui avaient franchi le pas du grand voyage... En arrivant chez moi à Nouméa ils avaient déjà réalisé la moitié d'un tour du monde...  Ils étaient tout bronzés, avaient les yeux qui pétillaient quand ils parlaient de leur vie, de leur voyage et je ne saisissais pas tous leurs propos... C'est sûr, ils semblaient appartenir à un autre monde... Ils nous faisaient rêver. Pour nous c'était le boulot le lundi, la vie courante heureuse... 
A force d'y penser, d'en parler, sans doute la saturation du quotidien aidant, nous avons aussi franchi le pas avec le plein accord de ma femme: nous avons tout vendu, acheté un bateau, ce qui n'est pas chose facile! Le hasard a mis sur notre route le Bali 4.5 et les gens qui l'on construit. On a eu immédiatement l'impression que ce bateau avait été fait pour nous alors que nous n'avions vu que les plans! Nous avons acheté le numéro un en Mai 2014, puis tout s'est accéléré entre les stages de formations, la cessation d'activité, le retour en Métropole, les visites au chantier, les liens qui se sont créés avec l'équipe Catana, le bateau qui prenait forme... 
Aujourd'hui nous naviguons depuis plus de trois   mois, avec beaucoup d'escales au chantier  pour réparation, modifications.... La découverte et la prise en main du bateau se sont faites assez rapidement même s'il nous reste beaucoup de choses à apprendre. Notre fils de deux ans Adrien s'est extraordinairement bien adapté à cet environnement qui a tout d'un manège, où il peut grimper partout, tirer sur tous les bouts, faire crisser les winchs, donner à manger aux goélands, aux poissons, voir les dauphins jouer autour du bateau... malgré notre vigilance constante pour sa sécurité.  Nous apprécions chaque jour notre nouveau confort, personnalisons le bateau, le regardons filer sur l'eau quand les voiles sont gonflées et que nous coupons les moteurs, nous avons le ciel, le soleil et la mer... 
Mais tout n'est pas toujours "rose": il y a eu les coups de vents imprévus, un dérapage nocturne au mouillage, des difficultés de mise en oeuvre, les attentes pour les travaux, des réglages à comprendre, les manœuvres de quai à affronter quand le vent souffle... 
Mais on oublie vite tout cela devant les liens extraordinaires qui se créent entre les membres de la famille pendant tous ces bons moments et ces quelques épreuves que nous avons eu à affronter. C'est sans doute ce qui rend les yeux pétillants quand on en parle et qu'on ne peut comprendre que quand on le vit! C'est encore mieux que je n'avais pu le lire et que nous n'avions pu l'imaginer ... C'est la dimension que je n'avais pas saisie! Et si le bonheur en bateau c'était tout simplement cela?