LES MARQUISES : FENUA ENATA, TERRE DES HOMMES

LES MARQUISES : FENUA ENATA, TERRE DES HOMMES

Posté par : Guylaine et Max
16 May 2018 à 07h
Last updated 24 May 2018 à 06h
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LES MARQUISES : FENUA ENATA, TERRE DES HOMMES

 

De toute la Polynésie, l'archipel des Marquises fut découvert en premier (en fait c'est en deuxièpe  car les femmes et les hommes qui y vivaient l'avait découvert avant)  par l'espagnol Alvaro MENDIANA DE NEIRA le 21 juillet 1595. Lorsqu'il vit surgir  des eaux ce décor féérique, MENDIANA DE NEIRA crut un instant que son rêve s'était réalisé et en l'honneur du Marquis de Mendoza, vice-roi du Pérou, qui avait pris l'expédition sous sa tutelle, il  nomma l'archipel "LES MARQUISES". Les habitants de l'époque  le nommaient FENUA ENATA ce qui signifie TERRE DES HOMMES.

MENDIANA avait atteint l'île de FATU-HIVA mais il ne put y débarquer en raison des conflits entre les habitants. COOK, le célébre navigateur anglais, lors de son 2ème voyage à bord de "Résolution" redécouvre l'archipel en 1774. En 1791, le navigateur français Etienne MARCHAND,  prend possession des Marquises à bord du "Solide" le 22 juin au nom de Louis XVI. En 1797, le pasteur William CROOK avec James HARRIS essaient d'évangéliser les Marquisiens mais devant l'hostilité des habitants, ils furent contraints de rembarquer. En 1813, les américains tentèrent  en vain d'implanter un camp militaire. En 1820, les pasteurs protestants revinrent sans plus de succés. En 1838,  DUPETIT-THUARS sur "Vénus" déposa sur l'île de TAHUATA des prêtes catholiques qui prirent possession des Marquises le 1 mai 1838 au nom du roi Louis-Philippe. Les îles Marquises étaient déjà bien connues du monde des baleiniers et les pillages allaient bon train. Le bois de santal a pratiquement disparu de la végétation en 1920. Au contact des européens,  les marquisiens furent fragilisés par les maladies importées. De plus, les guerres tribales entre les différentes vallées, le fléau de l'alcool qui servait de monnaie d'échange avec les baleiniers et les santaliers, diminuèrent considérablement la populations des Marquises. De 60 000 personnes selon les estimations au début du XIXème siècle, il ne restait plus que 20 000 marquisiens lors de l'implantation de la mission catholique. Au début du XXème en 1927, on dénombre 2094 habitants. Fin du XXème siècle la population est remontée à 10 000 habitants.

Le samedi 10 mars, après 32 jours de mer, en provenance des Iles Perlas du Panama, le vent nous amène sur HIVA-OA. C'est avec un moteur désacouplé, 1 taquet d'arraché et 2 alternateurs hors service que nous jetons l'ancre dans la baie de d'Atuona en poussant un grand ouf de soulagement.           La baie d'Atuona.

La baie déjà bien remplie est assez petite. Son eau n'est pas propice à la baignade. Un peu nauséabonde et d'une couleur verdâtre, elle n'invite pas à réaliser quelques brasses. Des requins la fréquenteraient régulièrement et elle serait la pouponnière des requins-marteaux.

Les larves d'anatifs  collectées pendant la traversée du Pacifique sont mangées en quelques jours par des poissons affamés qui aident ainsi au nettoyage de la coque. Rapidement, nous faisons la connaissance de Franck et Céline qui vivent depuis 2 ans dans la baie sur leur bateau "KAVEKA".  Ils sont recensés comme habitants de l'île. Franck, nous donnera un sérieux coup de main au niveau de nos pannes d'alternateurs. Michel, mon frère de Tahiti nous enverra 2 alternateurs neufs. Pour le désacouplement, nous préférons réparer bien ficelés à un ponton, le tangage et le roulis de la baie étant contre indiqué dans ce type de travail qui nécessite de reculer le moteur de 10 cm.   Aussi, nous attendrons d'être à la marina de Papeete pour le faire. Pour le moment, les 2 vis tiennent le coup à condition de ne pas dépasser 1500 tours. Nous commandons chez Amel à la Rochelle, un kit de réparation que nous faisons livrer chez Michel à Tahiti.

La ville est à 3/4 heure de marche mais le patron du  libre-service accepte volontiers de ramener à la marina ses clients marins. Pour l'eau et le gas oil, c'est la corvée. Avec des bidons, nous  remplissons notre réservoir d'eau de 700 litres en effectuant des allers-retours avec l'annexe. Idem pour le gasoil. L'accostage de l'annexe est assez épique. J'y laisserai une paire de lunettes et quelques lambeaux de peau !

L'île est assez jolie.     

Nous en faisons le tour avec John, le taxi, et grâce à lui, ce n'est pas de simples cailloux  que nous regardons dans le paé-paé mais ici c'est la chaise du tatoueur, là son miroir, là-bas la pierre pour couper les têtes puis celle pour accoucher.  Chaise pour le tatoué et son encrier   Pierre creuse qui remplie d'eau sert de miroir                  Table d'accouchement             Pierre pour décapiter les têtes.

Nous pique-niquons dans un décor irréel, sur une table dressée par John avec une nappe rouge, en bordure de mer.

La beauté et le calme apparent de l'île, cachent des querelles intestines, comme d'ailleurs dans beaucoup d'endroits. John, nous relate la mésaventure de son fils qui a voulu s'établir avec 150 têtes de bétail. Des voisins jaloux de son succés, ont tué une partie du cheptel et éparpillé le reste. Le jeune ruiné a dû arrêter son activité. Le patron du magasin en nous ramenant à la marina, nous parle de son concurrent (2 magasins dans le village) en terme d'ennemi !

  Nous deux.

Le coprah est une activité commerciale sur les îles des Marquises. Il s'agit de récupérer la pulpe de la coco et  la mettre à sécher. Un bateau passe régulièrement sur les îles pour récupérer le coprah ainsi collecté.

Ci-contre un séchoir à coprah :   Nous ne pouvons quitter  HIVA-OA sans rendre hommage à un grand homme  : Jacques BREL. 

Nous découvrons sa philosophie :         Elle tourne autour du nomadisme ; la sédentarité, pour lui, étant synonyme de malheur.

D'une grande générosité, avec son avion Jojo, il parcourait les îles, apportant des médicaments, des  denrées indispensables aux îliens et assurait des évacuations sanitaires vers Papeete. Jojo, ainsi nommé en hommage à son meilleur ami, Georges Pasquier.   

  Son brevet de pilote privé

L'Aranui 5 est un gros bateau qui nécessite pour venir au port que certains yachts au mouillage se poussent pour le laisser passer. C'est alors un peu la panique au mouillage, le temps que les bateaux lèvent l'ancre et remouillent dans un espace autorisé , les bateaux tournent sur zone.   L'Aranui est attendu. Il livre les fournitures et les provisions aux magasins en plus du transport de passagers.   Faites de la place !

 

Avec Frank et Céline, nous lions amitié et partons certains soirs à la pêche.  Les chevrettes, une sorte de crevettes d'eau douce ne sont pas faciles à attraper, elles se pêchent la nuit avec une lampe frontale et un petit trident.  j'aurai un peu plus de succés avec l'anguille. Céline nous fait découvrir le crabe de terre. Il se ramasse la nuit également, en l'éblouissant (comme la chevrette). Sa chair est délicieuse, et nous le préférons même au crabe breton ! Franck et Céline partent un soir à la chasse. Céline attrape un cochon à main nue ! I Et, le lendemain  c'est le barbecue marquisien auquel nous sommes conviés. Ci-contre, film du barbecue et Céline au youcoulélé.

Le vendredi 6 avril, nous partons à deux bateaux pour TAHUATA, une île  au sud -ouest d'HIVA-OA, avec Frank et Céline. C'est une petite navigation de quelques heures. Ils nous guide vers une petite baie non cartographiée. Elle est jolie tout plein avec 2 palmiers sur une plage de sable blanc. Nous l'apellerons la baie "Kavéka" du nom de leur bateau. "Kavéka" signifie petite sterne. L'eau et claire et limpide. La tête sous l'eau, fusil harpon en main, Max et Franck rameneront de quoi nous sustenter. Ils se méfieront des requins en mettant tout de suite leurs prises dans l'annexe pour ne pas avoir à partager avec eux ! De belles raies grises majestueuses volent en plein eaux. Ci-après le film :

Céline nous initiera à l'art du lait de coco. Il faut avant tout choisir ses noix de cocos. Nous les prenons un peu germées avec de l'eau dedans. Enlever la bourre qui les entoure n'est pas une mince affaire. Il faut avoir de la poigne ! c'est fibreux et ça adhère. Ensuite,  couper la noix en 2. Le germe du coco est un vrai délice. Nous en sommes devenus très friands. Puis, c'est l'heure de la rape. N'ayant pas le 220V à bord, nous utilisons une rape manuelle et nous rapons à tour de rôle pendant plusieurs heures. Une fois cette action finie, Céline prend un tissu humidifié, y met de la coco rapée et essore . Il coule alors un lait blanc, onctueux qui servira au repas du soir : de la pieuvre (pêchée par Franck) au lait de coco. Un petit  régal !   Céline commence à raper.  Récupération de la coco rapée.                                                                                                                                             Pieuvre, pêchée par Franck, au lait de coco et quinoa.

Nota : tu peux obtenir  du lait de coco en achetant de la coco rapée et en la pressant dans un linge humidifié et le poisson chez ton poissonnier.

Puis  Franck et Céline retournent sur HIVA-OA tandis que nous continuons la découverte de l'île de  TAHUATA de baie en baie.  Celle d'Hanamoenoa est également très belle. Elle est large et profonde. Une rangée de cocotiers ornent sa plage de sable coralien blanc.  Les falaises de basalte  sont couvertes d'une végétation que viennent brouter les chèvres. Quel calme ! Nous sommes tout seul au mouillage. C'est grandiose. Nous restons plusieurs nuits et nous nous prenons pour des " Robinson Crusoé" ! Max tirera un mérou caméléon que nous cuisinerons au lait de coco à l'ail que Céline nous a laissé.

  Le calme de la baie d'Hanamoenoa

Vaitahu est la ville principale de l'île. Sa baie  profonde est fréquentée par les bateaux de pêches locaux. Le débarquement en annexe est facile. Construite en pierre balsatique, d'une belle sobriété, l'église est spendide avec un magnifique vitrail de Marie avec son enfant sur fond de motifs marquisiens.        L'église dans son écrin de verdure.     Magnifique vitrail.

De grandes ouvertures en forme d'ogive invitent le passant à participer aux célébrations.         De toute les églises que j'ai pu visiter durant ce voyage, celle de Vaitahu est vraiment la plus belle par son architecture et sa sobriété ; une église ouverte sur le monde. Sculpture sur un rétable en bois marquisien.      

A l'épicerie, Max craque pour un coutelas. Il a l'intention de continuer la fabrication du lait de coco ! Il faut une gaine pour le ranger. Au bar, nous discutons avec les locaux. Bruno fabrique des étuis en PVC, un bout de tuyau de plombier passé au chalumeau. On croirait du cuir à s'y méprendre !   L'imitation est parfaite avec des points de couture à la base. La peau de chèvre ou celle de vache ne supportent pas l'eau et se raccornissent. Avec le PVC, pas de problème ! Max fait affaire avec lui. De plus, contre un morceau de cordage qui leur servira pour les animaux, nous récoltons des citrons et une citrouille.

Hapatoni est la prochaine baie que nous visitons. En cherchant l'artisanat local, une femme, Téhina, nous aborde, nous renseigne et nous invite à venir partager son repas.   Copieux et délicieux,  à la fin du repas, nous lui demandons ce que nous lui devons.  Téhina nous déclare que nous ne lui devons rien si ce n'est remplir son cahier d'accueil. Téhina, femme généreuse, offre ainsi le repas aux navigateurs qui viennent se perdre dans son village.  Le Gauguin, un bateau de touristes doit arriver prochainement. Les habitants organisés en association, nettoient gracieusement les rues du village en désherbant et brûlant les feuilles mortes afin d'offrir aux yeux des touristes leur joli village bien entretenu.

Nous poussons la balade jusqu'à l'école primaire. La cour de récréation est très bien aménagée avec beaucoup d'amusements. Sur des tables extérieures, des jeux sont gravés. Ci-contre  celui des petits chevaux : Jeu de petits chevaux gravé    Un arbre, le Tamanu aime le la proximité de la mer. Avec ses fruits, on fait une huile aux bienfaits médicinaux reconnus.

Nos amis, de "Maïna" et "d'Eleuthera" arrivent sur FATU-HIVA, depuis leur traversée du Pacifique en passant par les Galapagos. Ils sont dans la baie mythique d'Hannavavé ou baie des Vierges. Nous partons les rejoindre. Après une nuit de navigation et une journée, nous découvrons cette magnifique petite baie. De grands rochers de balsate ornent ses flancs.  Elle est trés trés encaissée. Une vingtaine de bateaux y séjournent déjà. Nous trouvons un emplacement et mettons 60m de chaîne. Le vent est souvent terrible et dévale ses flancs à grande vitesse. De plus, le fond est de mauvaise tenue. Aussi, nous restons le soir, par prudence, sur le bateau afin de vérifier la tenue de notre mouillage. Nous nous amusons à voir des visages dans la forme des rochers. C'est ainsi qu'un rocher, à droite, représente pour moi la Joconde.     Max verra sur un autre, à gauche, un personnage.  Le lendemain, nous partons tous ensemble pour une petite marche vers la cascade.

Bruno, Max et Jean-Pierre de dos.  En cette saison séche, peu d'eau coule de la cascade mais son bassin est suffisament rempli pour nour rafraîchir.    Ci-contre un cochon domestique. Le cochon domestique a des plus grandes oreillles que le cochon sauvage.

Nous réservons également le repas du soir chez un local et un taxi pour le lendemain pour se rendre à OMOA faire du shopping. Mais, le vent en décidera autrement. En fin d'après midi, il se lève de façon inquiétante. Un premier bateau dérape et tente à maintes reprises de retrouver un mouillage. Au bout d'une bonne heure, il y renoncera et partira vers la haute mer. Derrière nous, un catamaran dérape et vient heurter "Maïna" sans dégat heureusement.  Nous surveillons notre propre mouillage. Le vent atteint les 35 noeuds. La situation est plutôt angoissante et dure maintenant depuis plusieurs heures. Nous sommes tout prés les uns des autres, avec des longueurs de chaîne différentes et le risque peut venir de tous côtés. Notre ancre dérape légèrement ! Avec Max, nous sommes bien d'accord. Pas question de mettre 10 m de plus de chaîne,  sinon nous allons taper le catamaran qui est derrière. Pas question de remouiller non plus à cause du désacouplement moteur et pas question non plus de faire des quarts de nuit au mouillage ! La seule solution c'est de prendre la mer. Nous relevons l'ancre et traversons sans heurt tout le mouillage, direction UA-POU. Nous y arrivons le lendemain en milieu d'après midi. La baie est large et très conviviale.

L'Aranui est là avec son lot de passagers. Nous les suivons et assistons à un spectacle de danses marquisiens. Nous sommes très impressionés par ces terribles guerriers marquisiens !

Jérôme un guide nous emmenera visiter son île. La baie d'Akahau où nous sommes ancrésLa jolie baie aux requins.  Des enfants s'amusent. Paysage montagneux. Les cascades sont l'un des attraits des îles. Pierre gravée.  La piste d'aéroport, la plus difficile des Marquises. Pics de phonolithe vus depuis "Légende du Val".

Il nous contera les merveilleuses légendes de la création des  Marquises.

Sur l'île de NUKU-HIVA, distante de quelques miles nautiques de UA-POU, nous retrouvons nos amis. Selon notre habitude, nous louons les services d'un guide, Christian, pour  visiter l'île. C'est un décor prodigieux que nous découvrons ! Des belles vallées vertes et fleuries, de profonds ravins, des promontoires rocheux, des espaces boisés d'arbres indigènes, des chevaux et des vaches qui paissent en toute liberté, autant de sujets d'émerveillement. Promontoires rocheux.    Max devant un paysage sublime. Max et Christian notre guide. Paysage lénifiant.    La pirogue de Christian.

Un banian gigantesque. Des chevaux paissent en toute liberté. La très jolie vallée où Christian réside.

Christian n'est pas un simple guide. Il oeuvre pour son île en luttant contre les espèces envahissantes comme le myconia, les faux pistachiers ou encore l'accacia. Ses connaissances en matière herboriste, nous paraissent sans limite. Il nous montrera que telle herbe soigne les douleurs, que telle autre soulage les déchirures musculaires. Il nous expliquera que certaines graines enfilées sur un fil de tapa, brûlent les unes après les autres en donnant une douce lueur. La suie qu'elles dégagent est récupérée et sert comme teinture noire pour les tatouages. Christian a fait sa formation de guide à Papeete. Il nous raconte son désarroi d'avoir dû vivre pendant 6 mois dans cette grande ville. Pour rien au monde, il y retournera, trop heureux de vivre dans sa magnifique vallée.

C'est avec un  bateau plein de délicieux pamplemousses, de mangues, de petites bananes que nous quittons le 2 mai 2018 l'archipel des Marquises. Nous avons  rendez-vous le 10 avec le mécano à la marina de Papeete. Arriverons-nous à temps ? Une des 2 vis restantes de l'accouplement s'est cisaillée   dès la sortie de la baie et probablement que l'autre est en train de l'imiter ! Nous ne pourrons pas  nous servir du   moteur même en cas de manque de vent durant ces 800 miles nautiques ! 

 

 

 

 

 

 

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