12 janvier - 25 février 2021 Deuxième partie Martinique – Guadeloupe

12 janvier - 25 février 2021 Deuxième partie Martinique – Guadeloupe

Posté par : Dominique
02 Août 2021 à 19h
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Nous appareillons le 16 février, au petit matin, et en trois heures trente gagnons la rade de Pointe-à-Pitre : traversée d’une vingtaine de milles, pas trop inconfortable, poussés par un vent d’est de vingt-cinq à trente nœuds, sur une mer agitée, augmentée d’une forte houle, avec visibilité réduite sous les grains, génois et artimon arisés. Autant dire qu’il est moins pénible de faire cette route au grand largue depuis Marie-Galante, que d’avoir des conditions similaires pour remonter au près depuis les Saintes !

Une fois amarrés, nous organisons notre séjour touristique. Sur la Grande-Terre, nous allons jusqu’à la Pointe des Châteaux, où la forte houle rend le paysage des roches déchiquetées impressionnant.

Deux ou trois morceau d’une épave en bois nous rappellent la triste fin de la goélette « Bielle » sur ce cap, en juin dernier.

Le port du Moule et sa passe dans les récifs, marquée par des fûts de canon fichés dans le corail semble peu hospitalier. Ces fûts en guise de pieux ou de balises, devaient servir à déhaler les navires sucriers venus chercher dans ce port leur cargaison. Plus au nord, le Porte d’Enfer et les falaises de le Pointe de la Vigie sont également battus par les flots ;

les sargasses ont envahi le lagon de la Porte d’Enfer et les bulldozers s’activent pour ramasser ces algues qui se décomposent en dégageant une odeur pestilentielle.

Après les côtes de la Grand-Terre, nous parcourons les Grands Fonds, au sud : un vaste plateau calcaire, couvert de villas et de champs de cannes à sucre, sur lequel se succèdent petites collines et vallées formées par le ruissellement des eaux de pluie.

Les routes y forment un dédale reliant les villages aux nom évocateurs : Deshauteurs, Belle-Place, Bellevue…

Outre les visites en voiture, nous souhaitons prendre le temps de parcourir de beaux sentiers. Sur la côte sud, nous découvrons le sentier du littoral de Saint Félix : la plage de la Saline est le rendez-vous des surfeurs, et kiteurs ; nous admirons les figures des uns et des autres, nous étonnant que les ailes ne s’emmêlent pas tant ils sont nombreux. C’est sur cette plage que le 2 juin 1794, débarquèrent de nombreux soldats pour apporter le premier décret lors de la première abolition de l’esclavage. Après les forêts sèches ou les mangroves de bord de plage, nous montons sur la pointe Canot remarquable par ses mares autour desquelles viennent s’abreuver les vaches qui paissent sur ses flancs.

 

Nous poursuivons vers l’Anse Vinaigri et savourons le point de vue sur l’îlet du Gosier, et les récifs sur lesquels la mer déferle. Le retour par derrière les étangs nous fera patauger dans la boue, mais le bord de mer n’est pas très loin pour un bon nettoyage des pieds et des jambes !

 

La Basse Terre nous occupera également plusieurs jours. Nous en faisons le tour, par tronçons, et terminons par la Route de la Traversée. Le temps très pluvieux de ce mois de février ne nous permet pas de marcher vers les célèbres chutes du Carbet ou d’autres cascades. Des inondations ont emporté des promeneurs, et nos voisins de panne l’ont éprouvé puisque l’épouse du skipper a été portée disparue pendant vingt heures, avant d’être retrouvée avec blessures superficielles, et ecchymoses. Notre tentative vers le Saut des Trois Cornes, au nord, en passant par les eaux sulfureuses de Sofaïa a tourné court : le chemin glissant entre racines et boue, et le retour de la pluie nous ont vite fait revenir sur nos pas hésitants. Notre désappointement a été bien compensé par la vue sur le Grand Cul de Sac, ses cayes et ses îlets que nous réservait la route lors de la redescente vers Sainte Rose.

La rivière Corossol et la Cascade au Ecrevisses, sur la Route de la Traversée nous ont permis de donner à Etienne un aperçu de ce que peut être le décor des cascades en forêt humide.

Nous avons cherché au-dessus de Pointe Noire le Saut d’Acomat : après une descente entre les arbres, dans un terrain assez boueux également, nous avons rejoint les belles roches grises dans lesquelles la rivière au bleu limoneux saute de vasque en vasque.

Enfin, nous n’avons pas manqué le bain dans l’Anse Bouillante pour un chaud massage à l’embouchure de la rivière.

Une belle promenade sur un chemin de bord de mer remplace les sentiers en forêt vers des cascades. Un peu après Saint Rose, vers l’Anse des Amandiers, nous laissons la voiture sur un parking de plage et longeons la côte vers l’ouest, vers la Pointe Allègre. De vastes et surprenantes prairies, à l’arrière des plages offrent de belles pâtures aux vaches et taureaux, et des mares leur permettent de s’abreuver. L’une d’elle se fraye un passage à travers la plage, son petit courant créant de belles ondes de sable.

 

A défaut de cascades, nous partons à l’assaut de la Soufrière. La route, raide, nous fait traverser Saint Claude et ses bâtiments universitaires à l’allure coloniale, avant d’atteindre le parking des Bains Jaunes.

Le temps est gris, très couvert ; la température est plus fraîche, vingt et un degrés, nous nous couvrons. Entre des arbres gigantesques, couverts de lianes et de philodendrons, nous longeons les bassins en pierre, aménagés pour retenir l’eau tiède et légèrement sulfurée qui s’écoule des flancs du volcan. Un chemin dallé, le Pas du Roy, s’élève dans cette forêt humide primaire, riche en végétaux, fougères, plantes épiphytes, et troncs élevés à la recherche de la lumière dans la canopée.

Il débouche soudain sur une savane : un petit replat sur lequel pousse une végétation plus rase, verte et dense ; il n’y a plus un seul arbre. L’éruption de 1976 aurait eu raison des arbres … Un gros rocher abrite un oratoire, dédié à Notre-Dame, des bancs sont disposés devant et un panneau demande le respect de ce lieu, qui prend un charme mystérieux, entre le vert de la végétation, la roche sombre et le blanc-gris ouaté des nuages et où le bruit du vent est dominant.

Le Chemin des Dames s’enroule autour des flancs de la Soufrière, ainsi nommé lorsqu’au début du XX° siècle il a été aménagé pour permettre aux dames de gravir le volcan de manière plus confortable et moins dangereuse. Il est agrémenté de panneaux explicatifs. Nous sommes complètement dans les nuages qui déposent leur humidité sur nos vêtements et cheveux, et sur toute la végétation alentour. Le vent violent se fait plus ou moins sentir au fur et à mesure de l’ascension, selon le versant sur lequel nous nous trouvons, apportant par la même occasion de fortes odeurs de soufre. Le sentier nous fait passer entre des roches de différentes couleurs (de l’ocre, du rose, du gris selon les veines de laves), dans des tunnels de feuillages dégoulinants d’humidité ;

des panneaux nous permettent d’apprécier les failles provoquées par les éruptions et dont on devine la profondeur entre nuages, roches et végétation. D’autres panneaux nous signalent les particularités de la végétation, comme l’ananas montagnard qui apporte une touche de rouge vif, par sa fleur, au milieu de toutes ces nuances de vert.

A l’approche des bords du cratère, les marques au sol sont de plus en plus proches et réfléchissantes, permettant de ne pas se perdre dans la mer de nuages. Un refuge est construit entre des roches, vers la fin du sentier ; on descend dans une salle basse, laissant dehors quelques instants le rugissement du vent. Dehors, le sentier se poursuit sur quelques mètres encore jusqu’à des barrières au bord d’une faille, offrant par temps clair un point de vue sur les cratères. Son accès est délicat en raison de la force du vent qui manque de nous renverser à chaque pas. Des cratères, nous n’en verrons que le blanc des nuages mêlé aux fumeroles de soufre, si l’on en croit notre odorat. Malgré la fraîcheur extérieure, au retour vers le parking, un bain dans l’eau chaude, en prenant garde à ne rien toucher (en raison des amibes), permet de bien se délasser après cette marche dans ce lieu à part, mystérieux et imposant.

Il était difficile de passer davantage de temps en Guadeloupe sans prendre le temps de s’approvisionner dans une distillerie. Nous avons d’abord visité la distillerie Damoiseau, sur la Grande-Terre. ; installée sur les plaines à l’ouest de l’île, au milieu des champs de cannes à sucre, elle était en pleine préparation de la saison de broyage des cannes et de distillation. Le personnel, chacun à son poste de remise en état de l’usine, nous invitait gentiment à parcourir les galeries au-dessus des broyeuses, autour des évaporateurs de jus, des colonnes de distillation, répondant volontiers aux questions.

Etienne a passé de longs moments devant les écrans de surveillance des machines pour comprendre le fonctionnement des installations. A côté de ces bâtiments modernes, dans les jardins, on peut monter dans l’ancien moulin à vent, voir les engrenages en bois, qui permettaient d’actionner les broyeuses de cannes du rez-de-chaussée.

Le lendemain, la visite du musée du rhum, à la distillerie Reimonenq, a apporté toutes les réponses à nos interrogations lors de la visite de la veille ; très pédagogiques, des panneaux et des installations présentent les différentes évolutions de la coupe, du broyage et de la distillation des cannes, depuis les alambics jusqu’au système des colonnes à double distillation vues la veille. La visite se poursuit à l’étage avec la présentation de quelques éléments du patrimoine antillais : coupe-coupe ou machettes des différentes îles, scènes de la vie quotidienne, vêtements traditionnels, espèces endémiques d’insectes et de papillons, maquettes des navires ayant croisé dans les eaux caribéennes. Une dégustation, en conclusion, nous permet de compléter notre approvisionnement…

Le séjour d’Etienne en Guadeloupe touche à sa fin et à défaut d’avoir pu naviguer jusqu’aux Saintes, nous partons prendre la navette à Trois-Rivières pour une courte journée sur Terre-de-Haut.

Cela lui permettra d’avoir un aperçu de cet archipel si contrasté avec le reste de la Guadeloupe. Les vingt minutes de traversée, travers à la houle, nous confirment notre choix d’éviter une navigation dans cette mer forte. Le pont supérieur de la vedette est vite trempé et seuls quelques courageux subissent les paquets de mer levés contre le navire lancé à pleine vitesse !

Une fois débarqués, nous louons deux scooters et partons à la découverte du Fort Napoléon, qui domine au nord le bourg de Terre-de-Haut. Il a été érigé sur le modèle des fortifications Vauban, sur les ruines d’un fort (Fort Louis), ordonné par Louis XVI en 1777 ; c’est en 1805 qu’il reçut son nom actuel, sans que jamais l’empereur n’y mît les pieds. Monument historique classé, il abrite, dans son bâtiment principal, un musée des arts et traditions et un jardin exotique. Passant le pont levis et le passage sous les remparts, nous pénétrons dans la cour gazonnée au centre de laquelle se dresse le fort proprement dit. Nous ressentons immédiatement le calme du lieu. Au rez-de-chaussée, une succession de salles de part et d’autre d’un couloir central expose différents aspects des particularités des Saintes : formation géologique, faune, flore, cétacés et poissons ; une salle est consacrée à la saintoise, barque traditionnelle de pêche et à sa fabrication. A l’étage, une salle est consacrée à la bataille des Saintes, qui se déroula entre le 9 et le 12 avril 1782. Elle opposa le Comte de Grasse à l’amiral anglais Rodney ; la France désirait envahir la Jamaïque, alors colonie anglaise. Partie de Martinique dans cette intention, la flotte française est poursuivie par la flotte anglaise. L’affrontement a lieu au nord de l’île de la Dominique, tandis que les navires français non militaires participant à ce convoi, tentent de trouver refuge dans la baie des Saintes. Les variations de vent sous le vent de l’île de la Dominique et aux abords du canal entre les îles ont joué en défaveur des français ; de plus, le Comte de Grasse accusera ses capitaines Vaudreuil et Bougainville de n’avoir pas exécuté ses ordres, conduisant ainsi à cette défaite. A la suite de cette dernière bataille navale, le traité de Versailles de 1783 redistribue les colonies britanniques, espagnoles et française des Antilles. La salle d’exposition présente des tableaux des vaisseaux, des documents et rapports de mer de cet événement, des portraits des amiraux, et du frère de la côte Borgnefesse, célèbre pour ses mémoires retrouvées dans les ruines de Saint Malo, après la deuxième guerre mondiale. Ce marin raconte sa vie agitée de boucanier dans ces îles que nous visitons, mais nous ne savons pas pourquoi son portrait se trouve dans cette salle. Une autre salle à l’étage, présente les activités artisanales, avec notamment la fabrication du salako ; ce chapeau a été importé par les Amanites de Cochinchine envoyés en Guadeloupe, puis a été adopté et adapté par les saintois : il est fabriqué en bambou, couvert de tissu : un premier maillage permet de fabriquer un vaste auvent rond auquel se fixe un tour de tête. Ce chapeau à la forme particulière, ainsi recouvert protège ainsi à la fois du soleil et de la pluie. Un tour rapide sur les remparts entre les cactus du jardin botanique permet d’apprécier la vue sur le bourg, l’îlet à Cabrit,

Terre-de-Bas, au loin, et sur la baie de Marigot.

Une pause déjeuner aux saveurs créoles, un tour de l’île et de ses différentes plages, envahies de sargasses, un petit plongeon dans la moins envahie, un petit tour vers le Pain de Sucre, et c’est déjà l’heure de la vedette retour !

 

Après ce temps de tourisme, Etienne prépare ses bagages pour son retour ; les lunettes commandées à notre arrivée, sont prêtes juste à temps avant notre départ, et avant la fermeture des grands centres commerciaux pour cause de Covid… Il est temps pour nous de partir naviguer vers le nord, et ses îles françaises que nous ne connaissons toujours pas : Saint Martin et Saint Barthélémy…

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