Vers la Grèce

Posté par : Philippe
27 Octobre 2015 à 06h
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Alors si départ Vendredi on range le bateau, tout en ordre, repas préparés pour la navigation car il est difficile de cuisiner si le vent se lève, et la météo est moyenne... le risque d'orage est important! 
Je regarde toujours la situation générale sur le site Anglais (j'aime bien les couleurs...) pour avoir une idée de la position et de la pression au centre des anticyclones et des dépressions. Cela donne une bonne idée de ce qui va nous arriver...  Puis ensuite je prends au moins deux sites météo (lamma le site Italien qui tient plus compte de l'effet du relief pour la force des vents et Zygrib) pour avoir une idée moyenne. Des fois ils se contredisent... Alors je ne sais que penser... La Méditerranée est vraiment une mer étonnante, avec des calmes impressionnants et un vent qui se lève avec une rapidité stupéfiante. On passe de 3 noeuds à 25 noeuds en 3 minutes et on voit le vent arriver: la couleur de la mer change d'un coup, les vagues avec des crêtes blanches apparaissent sur une ligne à l'horizon et avancent irrémédiablement vers nous. Branle-bas de combat à bord: de la situation "vacance" on passe au mode "combat": on rentre vite le code 0 (c'est une grande voile d'avant, style génois"), on prend au moins un ris à la grande voile, on enroule un peu de solent, on enfile la veste de quart puis on range vite tout ce qui traine sur la table! Pendant que je m'occupe du bateau Vanessa s'occupe d'Adrien. On commence à être entrainé...
En attendant cela petit resto ce soir, un peu comme avant chaque traversée. J'ai réussi à lire le guide vert Michelin en Italien sur un présentoir de librairie et il y a deux restaurants sur Trapani: la "Cantina Siciliana"... Rien que le nom cela donne envie! En plus tout près du port mais dans une rue déserte très éclairée, au milieu de "nulle part" comme dit Vanessa. Vraiment l'endroit où l'on ne va pas par hasard surtout la nuit! Tout cela avec la poussette et Adrien dedans: il faut vraiment avoir faim! Aprés 10mn de marche pas totalement angoissante mais pas totalement sereine on trouve la "Cantina Siciliana" qui a plutôt l'air sympa et qui semble beaucoup plaire à Vanessa. il y a de la place pour nous, super, petite salle typique. On part pour les spécialités locales, calamars frits, pâtes aux crevettes et le délicieux couscous de poisson avec un vin Sicilien très bon: Zibibbo! On ressort sans même se soucier de la rue désertique... pour aller manger une "gelati" dans le centre ville et aller faire le plein de vin. Les gerricans sont sous la poussette... 5 litres de rouge et trois de blanc à 2,5 euros le litre... Retour au bateau à 23h, très content!!!
Départ le lendemain matin direction plein Est vers Messine et dans le port rencontre avec une vieille connaissance: l'ex "Club Med", beau voilier à 5 mâts qui débuta sa carrière à Nouméa. il s'appelle maintenant "Wind Surfer". Nouvelle vie aussi pour lui...
Comme prévu vent dans le nez... Alors on fait du près serré (on avance contre le vent). Le catamaran n'est pas le meilleur bateau pour cet exercice mais on ne va pas passer la journée au moteur... Alors on fait des zigzags le long de la côte Nord de la Sicile! De temps à autre la ligne de traîne démarre et l'on ramène un petit thon germon d'environ 1 kg, des fois plus petit... On essaie de passer entre les grains... L'après-midi le vent monte comme d'habitude, aujourd'hui 17 noeuds, pas trop méchant... Les villages défilent doucement, la nuit arrive et l'on n'a pas beaucoup avancé... Le vent retombe... Je décide vu les conditions météo meilleures que prévues et du fait de l'absence de mouillage sécuritaire de continuer de nuit vers Palerme que nous atteignons au petit matin après s'être pris un grain mémorable: 45 noeuds de vent, pluie torrencielle, éclair tout près du bateau... Le grand style! C'est monté comme d'habitude en 3mn: juste le temps d'affaler la grande voile, de démmarrer les moteurs pour pouvoir nous diriger. Ce n'est sans doute pas ce qu'il faut faire en "théorie"... Mais la théorie et la pratique... Aprés 24h de navigation à éviter les grains celui là je ne l'ai pas vu arriver... J'aurais du allumer le radar mais je ne peux pas le laisser allumé constamment pour la consommation élèctrique... Nous étions assez loin de la côte, donc pas de danger mais on s'est fait correctement secouer!!!
Puis aprés 1/2h tout se calme, on grelote sous la veste de quart détrempée mais toujours étanche sauf au col (j'avais du mal le fermer), le jour se lève... Et on se demande ce que l'on fout ici! Un peu heberlué par ce qui vient de nous arriver... Vanessa est quand-même un peu blème d'avoir vu s'afficher sur l'écran 43 noeuds... Heureusement ce n'est pas tous les jours.... Signe quand-même majeur: elle n'a pas pris de photo.... On est en plein axe d'entrée du port de Palerme et il y a 4 paquebots qui sont en train de nous doubler. L'alarme de l'AIS n'arrête pas d'hurler (un système basé sur les ondes radio de la  VHF et qui permet d'afficher tous les navires qui en sont équipés sur l'écran de navigation du poste de barre. Quand un bateau est à moins de 2 milles ça sonne). En gros c'est "Apocalysm now"...
Il y a des bateaux tout illuminés de tous les côtés et l'on se sent bien petit...
C'est dans ces moments là que les choses deviennnent relatives: on va aller dans le port de Palerme, même s'il a mauvaise réputation, même s'il est sale et même s'il est très cher: au moins il n'y aura pas de vagues et on pourra dormir! Le reste on s'en fout!
Quelques coups de téléphone suite aux recherches de Vanessa sur internet (on est à moins de 6 milles de côtes donc on capte avec le téléphone portable) et quelques appels VHF plus tard on s'amarrait dans un chantier naval de Palerme (Galizzi), avec une grande grue comme voisine. Il y a vraiment des moments de calme que l'on apprécie et qui n'ont pas de prix!
Je descends présenter les papiers du bateau, je discute un peu le prix... Finallement je fais copain avec le patron, il m'indique les endroits où aller, les restos, les magasins pas loin...  Il me demande si je suis propriétaire où si j'emmène le bateau pour du charter. Bien sur que je ne suis pas propriétaire... C'est marqué sur l'acte de Francisation... Le bateau est en leasing... "non je le convoie en Turquie... et on me paie pas les ports où je relâche quand il y a mauvais temps..." Il me refait encore une ristourne de 20euros... Je dois vraiment faire pitiée! Bon c'est pas terrible mais j'ai pas beaucoup raconté d'histoire... J'ai juste "arrangé" la vérité... Puis la caisse de bord, vu les prix des ports en Sicile, est vraiment à un niveau proche de zéro...
Impossible de dormir, Adrien est en pleine forme car heureusement cette nuit il dormait... Alors on reprend la poussette et en avant Palerme. On passera la journée à visiter la ville, à se perdre dans des quartiers incroyables, un marché aux légumes énorme en pleine rue avec des prix très bas compatible avec la caisse de bord (0,5 Euros le kilo de pêches, de pommes, 1 euros les harricots verts , le repas dans une ginguette typique: Mina, via Pannieri: encornet farci, calamar frit, aubergine à la mozarella, friture de tout petits poissons, poivrons farcis, boulettes au jambon... et j'en oublie, vin local tout cela pour 30 euros...! Tour en calêche l'aprés-midi avec "Cristobal" le cheval, visite de tous les monuments, incontournable "gelati" et retour à pieds au bateau en se perdant totalement! La journée parfaite de touriste! Palerme n'est pas la ville la plus propre au monde, loin s'en faut... On est vraiment pas loin de l'Afrique... Mais il faut oublier notre côté "pasteurisé" et prendre les choses comme elles sont. Les ruelles de la vieille ville sont très étroites, emcombrées de scooters qui se faufilent entre les passants, entre les tables des restaurants et des cafés qui sont en pleine rue. Il y a des échoppes de tout, du magasin d'épices et d'olives au poissonnier et à tout ce que l'on peut imaginer dans des senteurs souvent "originales"... On passe des quartiers de viande pendus dans la rue aux légumes, aux poissons découpés sur quatre planches branlantes, au magasin d'objets en plastique de tout genre... C'est sûre que la chaîne du froid ne doit pas être totalement respectée... Mais c'est si beau, si vrai... Tout cela dans une ambiance "foraine" comme j'imagine être au moyen âge, où les passants parlent fort, s'interpellent... Peu de touristes en cette saison, c'est la vraie ville que nous voyons! Combien de fois avons nous vu des femmes comme des hommes s'arrêter devant Adrien et nous dire "Che bello!". Nous n'avons vu que des gens sympathiques et pourtant nous avons demandé souvent notre chemin dans ce dédalle d'un autre âge... Des gens simples qui n'ont que le coeur à donner et nous avons apprécié! 
Nous sommes ressortis la pousette chargée de légumes, fruits, olives... Les pneus commencaient à s'applatir dangereusement!
Puis il y a la ville "moderne", avec de larges rues, toujours des scooters à fond, des voitures qui klaxonnent, des beaux monuments plus ou moins abandonnés, des beaux magasins, une fontaine superbe dont j'ai oublié le nom, l'Italie actuelle...  
Alors même si les rues sont jonchées de quelques détritus, si les crépis des murs ne sont pas de dernière jeunesse c'est plein de charme! Même plus fatigué...Mais quand-même content de se coucher le soir en rentrant au bateau que l'on a réussi à retrouver... après quelques kilomètres sans doute superflus...
Le dimanche Palerme est une ville déserte, tout est fermé. Grâce matinée pour tout l'équipage, petits plats avec tout ce que l'on a achété... La vie simple et le bonheur d'être tous les trois sous la grande grue et le long d'un quai en béton... Demain nous repartons. Le temps passe vite, la saison avance et il faut quand-même arriver en Turquie avant l'hiver...
Nous avons le vent dans le nez, presque comme d'habitude en Sicile. 18h nous mouillons à Cefalu qui à l'air d'un superbe village, temps très calme qui nous permet de cuisiner et de manger les poissons pêchés du jour. Petits regrets de ne pas pouvoir descendre à terre, mais nous reviendrons, c'est sûr! Le lendemain idem, on avance lentement en remontant le vent et mouillage à Sant'Agata di Militello, dans l'avant port... Nous téléphonons pour avoir une place de port le lendemain soir à Portorosa car pour Adrien trois jours de navigation d'affilé c'est le maximum, on ressent son besoin de courrir, d'aller jouer au ballon... 
Le lendemain beaucoup de moteur, vent aux abonnés absents... Et un seul poisson à la traîne... La moyenne baisse... 
La météo avait prévu le vent à 12h et 4 milles avant le port de Portorosa le "classique" mur de vent nous tombe dessus en trois minutes, vent plein Est de 20 noeuds d'un coup alors que l'on avait une mer "miroir"... Retéléphone au port pour annoncer que nous arrivons et ils me disent "pas besoin d'appeler à la radio"... Un peu bizarre... L'entrée du port est assez étroite et avec 20 noeuds de vent je ne jongle pas trop, les cailloux sont tout près. Je demande à Vanessa de mettre un message radio sur le canal VHF 9, canal du port,  quand-même... Cela se fait toujours en Italie. Une barque se dirige vers nous, super et très réactif dans ce port. Arrivé à notre niveau le "marin" nous dit que le port est complet et qu'il faut que l'on fasse demi-tour!!! Je lui réponds en Anglo-Italien que j'ai téléphoné et que l'on m'attend. Il insiste pour que je fasse demi-tour mais je refuse et je continue à avancer. Comme il ne fait pas trop le poids avec sa barque et que je dois avoir l'air assez décidé il se tire et va accoster à la pompe à essence... Un peu étonnant... J'avance toujours, le port devient un canal bordé de bateaux et je commence quand-même à me poser des questions... Manoeuvrer là-dedans avec le vent... Pas terrible... Je vois sortir d'entre les bateaux un zodiac, un peu plus grand que la précédente avec un homme en tee-shirt rouge. Il se dirige vers nous et je lui demande le "Yachting Club Portorosa" tout en me battant avec les manettes des moteurs car le vent me pousse sur des bateaux. Il me dit "momento please", sort son téléphone et commence à parler dedans... De temps en temps il lève la tête et me redit "un momento please...", me demande la longueur du bateau, le tirant d'eau... Tous ces renseignements je les ai déjà donnés... Ils sont un peu bizarre ici... Mais il a un tee-shirt qui ressemble à un uniforme où c'est marqué "ormoggieri" (on peut traduire par marin placeur du port) , il a une VHF à la ceinture (une radio portable), il a l'air plus sérieux que le précédent... Au bout de 5mn qui m'ont paru très longues car le port est assez étroit... Il me fait signe de le suivre. C'est étonnant: je les ai eu deux fois au téléphone et ils ont l'air surpris que l'on arrive... Trop heureux de quitter cet endroit très étroit à mon goût j'avance... Mais vers un véritable canal, bordé cette fois de bateaux des deux côtés et encore plus étroit. Toujours du vent... Ce qui complique beaucoup la manoeuvre! Vanessa commence à me regarder bizarement mais je ne peux même plus faire demi-tour. Il s'arrête, encore "momento", retéléphone et me montre une place superbe, facile d'accès si l'on peut dire... Je commence la manoeuvre: cela consiste à se mettre cul au quai en pivotant sur place en mettant un moteur avant et un moteur arrière puis en reculant jusqu'au quai. Je suis à la moitié de la manoeuvre quand son téléphone sonne et il me fait des grands signes: on va ailleurs... Cela commence à ne plus être drôle... On repart, l'ormoggieri devant nous et l'on s'engage dans un autre canal, avec un pont en béton au bout! Là plus le choix, je ne peux qu'avancer sans savoir où je vais... Vanessa devient vraiment nerveuse... Adrien doit sentir que la situation est difficile car il est à son poste de manoeuvre, à savoir avec gilet et attaché derrière moi sur la banquette et ne dit plus rien... Le marin me montre un trou entre deux bateaux juste avant le pont... Il faut que je me mettes là? J'avance presque jusqu'au pont car le vent va me pousser latéralement, je pivote le bateau: il y a un mètre devant et on frôle un bateau à l'arrière! Vanessa a une défense volante et courre partout. Finallement je rentre je ne sais pas trop comment dans le trou, le vent nous pousse sur le bateau d'à côté, j'entends les défenses (les gros boudins que l'on met de chaque côté du bateau) s'écraser entre les deux bateaux... Miraculeusement on ne s'est pas touché... Vanessa jette les deux amarres arrières au marin qui est sur le quai, je prends la pendille au vent (amarre qui est suspendue au quai et qui va sur l'avant du bateau). Elle est bien sûre pleine de vase, de coquillages qui arrachent les mains, mais le bateau s'écrase sur celui d'à côté alors on oublie tout cela... La vase gicle de partout quand je tire sur la corde, il y en a plein le pont et je suis déguisé en clown... Super! On arrive quand-même à s'amarer. Je suis couvert de vase mais tout va bien et on est à l'abri. Le vent souffle toujours à 20 noeuds minimum dehors...
Le marin attend que je lui montre les documents du bateau, mon passeport puis les prend et s'en va avec en me disant de venir les récupérer au bureau: c'est sûre que je ne vais pas traîner... Au moins ici ils ont compris la vie et trouvent les bons arguments...
Je vais me doucher, me changer puis direction le bureau avec l'annexe, moyen le plus rapide pour y aller, sinon une heure de marche vu l'endroit où l'on est. 
On trouve le bureau, on rentre et là une dame vient vers nous disant "Bonjour" en Français. Rien que d'entendre cela on est heureux! Au moins on va pouvoir bien se comprendre et on ne va pas être obligé de "baragouiner" un genre d'Anglo-Français avec des "o" partout pour essayer d'être compris... Après les formules de politesse, autour d'un café italien bien serré elle nous explique ce qui vient de nous arriver: il y a deux concessionnaires dans le port: un qui gère 50 places, "Marina Portorosa" et l'autre "Portorosa Yachting Club" qui gère 650 places et ils ne semblent pas être très copain... C'est l'Italie: chaque ponton appartient à une société différente... J'avais téléphoné au premier en l'appelant par le nom du second mais il ne m'avait pas dit que ce n'était pas l'interlocuteur que je croyais. Il m'a affirmé qu'il y avait de la place sans problème... 
Quand je suis arrivé ils ont une technique simple: ils demandent aux bateaux de ne pas appeler à la radio pour que le concurrent n'entende pas et refoule les gens systématiquement. Ainsi ils empêchent le Yachting club d'avoir des bateaux de passage. Heureusement que Vanessa avait envoyé son message radio qui a été entendu et ils ont envoyé un marin (la personne en tee-shirt rouge) voir qui arrivait. Il a du ensuite téléphoner plusieurs fois pour nous trouver la place... Tout s'explique... La dame s'appelle Pascale et elle est charmante. Le courant passe bien tout de suite. Elle nous donne le plan du port, la situation des magasins, du parc pour Adrien... Nous sommes les deuxièmes Calédoniens de l'année, elle me donne le nom de l'autre bateau et bien sûre je connais le skipper, on volait ensemble en planeur à Nouméa... Le monde est tout petit! Finallement le vol à voile (autre nom du planeur), la voile... toujours une histoire de vent... et pas de vapeur... C'est normal que l'on retrouve les mêmes!
Je récupère mes documents, mon passeport: il y a vraiment des choses à ne pas perdre dans notre situation... Nous l'invitons à manger Vendredi midi sur le bateau puis nous emmenons Adrien au parc: balançoires, tobogans... et il se défoule à fond! Il est nécessaire au bout de quelques jours de navigation de le faire courrir même si le bateau est grand et qu'il arrive à y faire du vélo...
Deux jours tranquilles pendant que le vent soufflait dehors, que le tonnerre grondait et que la pluie tombait... Deux jours en famille comme nous les apprécions, en travaillant quand-même un peu sur le bateau, en prévoyant nos prochaines escales... Autant nous apprécions les rencontres autant nous adorons ces moments où nous nous retrouvons tous les trois et où je suis totalement disponible pour Adrien et Vanessa, sans avoir à m'occuper du bateau. 

Portorosa est un mini Port Grimaud (650 places de port quand-même) pour ceux qui connaissent. Même esprit, une maison, une place de bateau. C'est joli, bien entretenu. Un peu trop de résidences fermées mais nous sommes mi-octobre! La marina où nous sommes est superbe, très bien entretenue, tout fonctionne (ce qui n'est pas toujours obligatoire...), les employés sont aux petits soins et passent matin et soir me demander si tout va bien! Je leur demande juste de retendre la drisse du bateau voisin qui cogne le long du mât, ce qu'ils font immédiatement. Super!
Nous faisons mieux connaissance avec Pascale qui est arrivée avec un livre pour Adrien, deux pots de confiture maison pour Vanessa et la météo pour moi. Nous faisons mieux connaissance: elle est française, mariée à un Sicilien et elle est la manager de la marina. Vanessa nous a conconcté un super repas "exotique" pour ici: mi-cuit de thon pêché à bord au Kikkoman, curry de poulet et bananes flambées! Des goûts qui nous rappellent Nouméa... C'est vrai que l'on avait pas eu ces sensations depuis longtemps! On mange plus souvent des pizzas et des spaghettis (bien sur Barilla!) Pascale nous prête sa voiture l'après-midi: cela me fait tout drôle de reconduire... Je suis sur le bateau depuis le 1er juin... Nous en profitons pour faire quelques courses, visiter le monastère de Tindari: j'appelle cela des églises "Staliennes". Architecture ressemblant à la basilique de Lisieux... à mes yeux aucun charme mais le spectacle est dehors avec tous les marchands, les pélerins... puis le panorama est superbe du haut de cette montagne. On devinne le port où est notre bateau et l'on voit notre trajet de demain...
A priori on a une fenêtre météo. Le détroit de Messine semble selon la litérature pouvoir être assez redoutable, donc nous allons choisir un jour calme...
Le soir repas sur le bateau de Francesco et Pascale. Un superbe 60 pieds à moteur fabriqué dans les Emirats. L'intérieur est magnifique, quel luxe!! Repas cette fois très exotique pour nous: involtini si je me rappelle bien du nom: c'est de la viande avec des herbes, du fromage et plein d'autres choses (citron, piment, légumes...) enfilés sur une brochette en bois. C'est absolument délicieux même cru et même un peu trop cuit... Voilà ce que c'est que de trop parler avec le cuisto! Un super repas qui nous fait découvrir la cuisine locale, de superbes gens d'une rare gentillesse et comme l'on aimerait en rencontrer beaucoup lors de notre voyage! nous repartons les bras chargés de produits locaux que Pascale veut nous faire découvrir. nous n'avons pas pu tout manger en un soir! 
Encore une belle rencontre, une amitié qui se lie, de beaux souvenirs et sans aucun doute  nous nous reverrons pour une navigation sur les îles Eoliennes lors de notre retour, ou ailleurs... La briéveté obligée des rencontres en bateau les rend sans doute plus intenses. 
Pas de vent le matin. Franchesco et Pascale viennent nous chercher pour un petit-déjeuner sur une terrasse au bord de la mer dans le village de Portorosa. C'est une habitude locale de prendre son petit déjeuner hors de chez soi. 
Puis cette fois départ pour de vrai, à 11h30.Pascale nous fait un dernier aurevoir du pont de son bateau et nous lui répondons tous les trois par de grands signes.Toujours pas beaucoup de vent et toujours dans le nez (quand on a le vent de face il y a un angle d'environ 40° de chaque côté du vent où les voiles ne propulsent pas le bateau car l'angle d'attaque du vent est trop faible pour remplir correctement la voile: on est donc obligé d'aller une fois à droite du vent puis à gauche du vent: cela s'appel "tirer des bord" de près). Nous tirons donc quelques bords, le gasoil est à 1,68Euros en Italie alors que nous l'avons payé 1,33 en Métropole... sur 400 litres on sent quand-même la différence... Nous faisons quelques heures de moteur et n'attrappons qu'un seul poisson... Nous arrivons au mouillage devant le village de Scilla à l'entrée du détroit côté Italie à 2h du matin. L'éclairage public nous montre bien la plage. Le fond tombe très vite, la zone de mouillage est étroite... C'est pas le genre d'endroit où l'on dort totalement sereinement... Heureusement sur l'écran on peut mesurer précisement les distances et nous savons que nous sommes à 180m de la plage!
J'ai hésité à prendre le détroit de nuit mais nous étions un peu tard par rapport à la marée. Dans le détroit il peut y avoir jusqu'à 5 à 7 noeuds de courant, alors il vaut mieux l'avoir avec nous... A fond je dois faire 7 à 8 noeuds au moteur!
Pour avoir le courant avec nous dans le sens Nord-Sud il faut passer 4h après la pleine mer à Gibraltar! Ainsi va le monde et ne me demandez surtout pas pourquoi: c'est comme cela. Il y a des gens très instruits qui ont du trouver que c'était la meilleure méthode de calcul. Donc pour nous c'est dimanche 18/10 à 11h48! En heure UTC, donc deux heures de plus pour nous, soit 13h48 locale. On ne se presse pas mais à 10h on est prêt!
Démarrage au moteur, on va éviter les voiles pour un premier passage, il paraît qu'il y a beaucoup de trafic au milieu entre les deux berges.
Je vois d'autres voiliers s'engager, ils ont l'air d'avancer donc nous y allons aussi. Nous sommes un peu en avance, pas trop de courant... Des rafales à 17 noeuds quand-même... Puis comme c'est de coutume ici le vent tombe d'un coup, la mer redevient plate et nous nous engageons entre les deux grands pylones rouge et blanc qui supportaient les fils électriques alimentant Messine il y a longtemps. Ils n'ont pas été démontés, ils font partis du payasage et comme amer (point remarquable vu de la mer) on ne fait pas mieux...
Quelques remous, deux noeuds de courant en plein milieu mais pratiquement rien sur le long de la Sicile où nous allons rejoindre les petits bateaux locaux qui avançent bien vite par rapport à nous. Quelques ferry traversent, des barques de pêcheurs, pour nous rien de bien embêtant: il fait beau et c'est dimanche... C'était sans doute le jour où il fallait passer! Merci la météo!
Un voyage comme le notre est très différent selon les conditions: c'est le club Med ou la galère, selon le temps qu'il fait... A dix noeuds de vent portant c'est le short et le tee-shirt, l'apéro, le repas tous ensemble, les petits plats, les jeux... A partir de 20 noeuds ce sont les rafales de vent, c'est la veste de quart, le secouage garanti, Vanessa et Adrien qui somnolent ou dorment, pas de cuisine... Ce n'est donc pas du tout le même voyage... Nous essayons donc de choisir nos fenêtres météo avec beaucoup de soins et nous prenons plutôt l'option pas assez de vent que trop... Tant pis si l'on fait un peu de moteur, c'est beaucoup plus confortable que les vagues... et que les orages! Enfin on essaie car la météo n'est pas une science exacte. On a déjà pu le tester... Le site le plus proche de la vérité semble être Zygrib, assez fiable sur trois jours, après c'est plus aléatoire... Mais les grains ne sont jamais prévus et on l'a vu à Palerme cela peut cogner...
Voilà le détroit est passé, finallement presque sans s'en rendre compte... Nous finissons la descente de la côte ouest Italienne à la voile, petit temps qui nous va très bien... nous slalomons entre les bateaux d'une régate sponsorisée par Rollex. tous les bateaux sont sous spi, c'est magnifique. Nous on remonte toujours le vent... Question d'habitude... Mais j'aimerais bien un jour du vent portant... car toute la Sicile a été au près!
Je n'ai aucun guide de la région car nous devions passer par la Tunisie et suite aux diverses rencontres tout le monde nous a conseillé de passer par la Sicile. J'ai donc le guide de la Tunisie mais qui ne m'est pas d'une grande utilitée... et je m'efforce de trouver un mouillage pour la nuit sur la carte: pas facile car la côte est trés lisse, accore (le fond tombe très vite) et je galère un peu... La carte Navionic de la tablette Apple (qui est mon deuxiéme système de navigation au cas où le principal s'arrêterait) m'aide un peu plus, mais rien de confortable pour la nuit, alors quitte à ne pas dormir autant avancer!
Les cartes Italiennes que j'ai sur l'écran sont loin de valoir les cartes Françaises du SHOM (service hydrographique français). On a l'impression d'avoir des bouts de carte qui ont été collés type "pashwork"... Un peu bricolage...
Un autre catamaran nous suit, la nuit tombe et pas grand chose à l'horizon si ce n'est une grande cheminée d'usine. Vanessa cherche aussi sur son téléphone, envoie un message à Pascale qui nous sauve en nous indiquant une plage où l'on peut mouiller. effectivement le site est marqué sur la tablette mais j'avais du passer un peu vite... Il faut grossir à fond pour voir la petite ancre rouge sur la carte qui indique le mouillage... Plage de Bova! A 23h nous laissons tomber notre ancre dans 8m d'eau sur un fond de sable en même temps qu"un autre voilier qui lui arrive du sud! Merçi Pascale et Franchesco! Nous devrions passer une nuit tranquille! 
Et une nuit tranquille en bateau c'est très appréciable! Pour bien dormir il faut se sentir en sécurité, être bien abrité du vent et surtout de la houle qui fait rouler le bateau dans tous les sens! Elle peut venir de n'importe quelle direction et n'est pas liée au vent existant. Dans certain mouillage, voir même dans des ports elle peut rentrer et ricocher sur un quai. En résumé c'est une vacherie et on la sent souvent! 
La nuit a été effectivement réparatrice, pas de vent, pas de houle et cela nous permet de nous sentir beaucoup mieux! 
Départ à 7h 30 pour finir la descente de l'Italie et attaquer la remontée de la côte Est jusqu'à Crotone puis santa Maria di Leuca. C'est l'endroit où la traversée est la plus courte entre l'Italie et la Grèce, environ 72 milles pour atteindre Corfou (nisos Kerkira). 
La côte calabraise défile doucement, puis le cap Spartivento qui nous fait virer plein nord... Le vent se lève doucement, du sud comme selon les prévisions. Enfin du vent portant, plein arrière, situation que les catamarans n'apprécient guère. Je remonte donc un peu vers l'Est, jusqu'au vent de travers et là le bateau décolle: sous gennaker (grande voile d'avant) nous filons 7 noeuds sans aucun bruit... Le vent est d'environ 10noeuds et devrait rester à cette force deux jours... et nous sommes en direction de la Grèce qui se trouve à 215 milles... Analyse rapide: si on fait 5 noeuds de moyenne il nous faut 43 heures... sachant que l'on a un coup de vent qui arrive sur l'Italie dans 48h et un autre beaucoup moins fort prévu sur la Grèce dans 72h... Cela s'appelle une fenêtre météo... Certe un peu étroite mais les prévisions s'avèrent exactes sur environ trois jours... Après nous avons pu voir qu'elles n'indiquent qu'une tendance... 
Donc si on remonte l'Italie il faut se cacher demain soir pour deux jours au moins... et surtout on n'avance pas dans la direction que l'on veut... Si on part sur la Grèce on se fait au moins deux nuits d'affilées mais on avance d'enfer dans les prévisions de voyage. Or l'hiver va arriver, ses coups de vents avec... Il faut donc avancer le plus vite possible pour progresser par sauts de puce entre les îles Grecques qui offrent une bonne protection et où les ports sont beaucoup moins chers!
Discussion avec Vanessa pour décider à deux, mais le bateau à 7 noeuds, la fenêtre qui semble super, à quand la prochaine... Alors banco: on part sur la Grèce pour la plus grande navigation que l'on ait jamais faite et sans aucun repli possible! On espère seulement que les prévisions météo seront exactes, sinon galère garantie...
Une fois une décision prise on est beaucoup mieux! le bateau file, je mets les lignes mais les poissons semblent absents... peut-être va-t-on trop vite... je change plusieurs fois les leurres, j'arrive même à en perdre un tout seul, mais toujours pas de poisson... Le vent se maintient, nous avançons selon les plans. Le pilote automatique est vraiment le troisième équipier et se charge de tout: super! je le mets en "mode vent", c'est à dire qu'il nous garde un cap par rapport au vent et non par rapport à une destination. cela évite les changement d'allure qui pourrait être dangereux. Si le vent change de plus de 10° le pilote sonne et j'arrive... Mais j'ai toujours beaucoup de mal à faire autre chose en navigation. Je suis toujours en alerte, je surveille si nous croisons d'autres bateaux... Et souvent je regarde juste le bateau marcher tout seul, admiratif et n'arrivant toujours pas à croire où je suis... Il existe comme cela des moments de plénitude...
La nuit le vent faibli un peu, nous n'avançons plus beaucoup... L'anticyclone a du remonter plus nord que prévu et trois heures de moteur sont nécessaires. J'ai vraiment pas envie de traîner avec ce que l'on a derrière et devant... On croise trois cargos, deux chalutiers... puis plus personnes. nous sommes sortis des routes maritimes et nous sommes trop loin des côtes pour voir des pêcheurs. J'arrive à dormir par segment de 30 minutes: c'est en effet le temps que met un cargo que l'on ne voit pas pour arriver sur nous! Donc je mets le minuteur de cuisine sur 30mn puis je m'allonge sur la banquette du carré.
Maintenant le radar reste en veille, plus question d'économie d'électricité... Je veux voir les grains arriver! il y a de grands éclairs au loin devant nous vers le Nord Est...
La première nuit se passe sans problème, pas d'orage,  mais je suis toujours heureux de voir le jour se lever. D'abord parce que je vois ce qu'il y a devant, puis parce que c'est beau, puis parce que je sais que Vanessa ne va pas tarder à me rejoindre...
Nous gardons notre moyenne selon les prévisions. Nous passons le milieu de la traversée. Maintenant c'est la Grèce, c'est sûr!
Le vent fraîchi un peu et je prends un ris à la grande voile, puis il faiblit et je remets la grande voile haute pour reprendre de la vitesse... Ainsi de suite à chaque changement de force du vent... Nous sentons que le temps se gâte derrière nous. Une grosse barre de nuages progresse vers nous... quelques grains apparaissent au loin... Vanessa prend le quart et je vais dormir un peu.
Nous attaquons la deuxième nuit. Le vent devient plus irrégulier, je vois les grainds apparaîtrent sur le radar: de grosses tâches vertes, jaunes et rouges au centre... Cela ressemble exactement aux amibes que je recherchais sur l'écran du microscope dans les prélèvements buccaux des patients et qui signaient une parodontite... Pas bien bon non plus...
Je vois les grains défiler sur le radar, les éclairs au loin sont plus nombreux que la nuit dernière... C'est vraiment une spécialité locale les orages nocturnes! Ou alors il y a un congrès d'orage dans le coin!
Malgré mes efforts on se fait rejoindre par un grain à 5h30 du matin  Celui là il allait trop vite pour l'éviter! Vanessa monte, prend la barre et je ne cherche pas trop à comprendre: en prévision j'affale la grand voile quand il n'y a pas encore trop de vent... puis les 30 noeuds de vent arrivent... Vent dans tous les sens... Pluie... Eclairs... Tonnerre plus ou moins fort... La totale, c'est un vrai! 
Puis tout se calme doucement... Le grain est passé... On se remet doucement de nos émotions. On remet la grande voile avec un ris car le vent reste à 18 noeuds... On déroule un peu plus le solent. Vanessa arrive bien à m'aider dans ces manoeuvres maintenant. Elle prend la barre et contrôle parfaitement le bateau, le met nez au vent et surtout arrive bien à le maintenir dans cette position malgré les vagues. Cela me facilite énormèment la tâche. Dire qu'il y a quelques mois elle ne pouvait pas dire d'où venait le vent... C'est beaucoup plus facile que de faire les manoeuvres en jonglant avec le pilote automatique... Je n'imagine plus une manoeuvre sans Vanessa. Elle s'est vraiment bien adaptée au bateau, chose assez rare pour une femme. 
Les prévisions ont été juste pendant les trois quart du trajet. Le vent a maintenant tourné Est mais nous pouvons atteindre le goulet entre les îles de Zakyntos et de Cephalonia sur un seul bord (on peut recevoir le vent de tribord ou de babord) si le vent ne change pas. Nous avançons à pratiquement 9 noeuds au près, le vent se stabilise à 18 noeuds et je lâche un peu de charriot de grand voile pour perdre de la puissance (le charriot sert à modifier le point de tire de l'écoute de grand voile: plus il est au centre du bateau plus il y a de puissance dans la voile) et je choque un peu l'écoute de grand voile (l'écoute de grand voile sert à modifier l'angle d'attaque du vent sur la voile: plus on "borde" plus l'angle est fermé et on avance plus vite et plus on "choque" plus l'angle est ouvert et on ralenti). Nous repassons à 7 noeuds, ce qui me rassure un peu. Le bateau pourrait aller beaucoup plus vite mais on perdrait énormément en confort et peut-être en sécurité. Néanmoins vu ce qu'il y a derrière et devant il faut que l'on avance. Nous ne sommes pas encore habitué à voir nos 15 tonnes lancées à cette vitesse contre les vagues. C'est assez impressionnant. Le bateau ne tappe pas du tout, reste bien stable sur sa route. Il y a des moments qui restent gravés dans la mémoire, l'équilibre parfait!
Nous commençons à bien distinguer les côtes, très montagneuses. Un nouveau pays... Il y a des moments comme cela où l'on se rend vraiment compte que l'on voyage... Je prépare le pavillon de courtoisie de la Grèce, j'irai le mettre quand nous serons un peu plus au calme... 
Midi nous passons dans les îles entre Zakyntos et Cephalonia. Le vent nous a mis plus près de Zakynthos donc cela sera Zakynthos! 
Nous croisons nos premiers pêcheurs Grecs qui comme dans les autres pays nous virent sous le nez avec leur chalut derrière... Nous sommes maintenant sous le vent de l'île et nous repassons à 10 noeuds puis au moteur à partir du cap Skinari. il va falloir se faire aux noms Grecs, pas évident...
Nous arrivons au petit port repéré sur la carte, Agios Nikolaos. Absolument désertique, quelques bateaux sur des bouées... Un grand quai désert... Nous en avons un peu marre après cette traversée, deux nuits sans dormir et nous nous mettons à quai. Le bassin est très calme, je mets quatre amarres et toutes les défenses du même côté. Un petit goûter, une sieste réparatrice et nous partons nous dégourdir les jambes à terre. C'est une petite station balnéaire point de départ d'excursions vers des grottes, appelées "blue caves". Il y a quand-même une petite "taverna" d'ouverte. Premier "retsiné" (vin blanc à la résine de pin) et nous mangeons nos premières salade grec et moussaka. Le voyage prend vraiment une autre tournure, nous voyons vraiment le changement tant au niveau de la langue, de l'architecture, de la nourriture... Nous commençons vraiment à être loin des zones connues. Prochaine étape Corinthe où les 3,2 milles du canal nous ferons basculer dans la mer Egée, dans le golf de Saronique....

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